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La recherche dix-septiémiste outre-atlantique

La recherche dix-septiémiste outre-atlantique

Publié le par Marc Escola


L'UFR de Littérature et Linguistique Françaises et Latines de l'Université de Paris 3 a invité, au second semestre de l'année scolaire 2004-2005, le professeur John Lyons (Université de Virignie, USA). Cercle 17-21 profitera de sa présence pour organiser, les 2-3-4 juin prochain, un colloque autour de la recherche dix-septiémiste outre-atlantique.

En effet, on constate, au fil des années, que les rencontres franco-américaines laissent souvent à leurs participants un sentiment d'incompréhension mutuelle. La critique américaine est mal connue en France, et assez rapidement mal accueillie, pour des raisons diverses dont les traditions françaises de fermeture et d'orgueil culturel jouent sans doute un rôle non négligeable : le " grand siècle " ne serait-il pas pour " nous ", et sans doute à notre insu, difficile à partager ? Cet orgueil n'induit-il pas des effets d'optique concernant l'existence d'un tel " nous ", illusion qui tend à accréditer l'hypothèse d'une double homogénéité des approches " américaines " d'un côté, et " françaises " de l'autre. Or, vu d'ici, le " point de vue français " recouvre de tels litiges qu'il paraît incompréhensible que des chercheurs puissent incarner une " voix/voie française(s) ", et l'on peut soupçonner qu'il en va de même outre-atlantique.

Sans doute y va-t-il aussi de vraies différences, qu'il serait intéressant de comprendre en décidant de réfléchir à partir des voix – et des voies - de la critique américaine. Cette rencontre aura alors deux buts :

- d'abord, et très simplement, faire connaître la critique américaine dans toutes ses facettes, voire ses conflits.

- ensuite, débattre dans la plus grande confiance, en acceptant le présupposé critique suivant : ni l'interprétation des textes ni même l'histoire ne sont des sciences. Ceci implique que la première preuve d'excellence dont puisse témoigner un chercheur est d'abord sa capacité d'écouter, y compris des analyses qui le dérangent dans sa formation intellectuelle et ses habitudes critiques.

On pourra notamment se poser une question.
Pourquoi est-ce aux USA que les " grandes pensées de la modernité " – c'est-à-dire notamment la philosophie française, même si ce n'est pas exclusif (pensons par exemple à la présence tout à fait accessoire de la psychanalyse dans la critique dix-septiémiste française) – ont été massivement mobilisées par la critique littéraire, dix-septiémiste comprise ? Pourquoi au contraire le " déconstructionnisme ", pour ne prendre qu'un exemple, n'a-t-il jamais pénétré la critique littéraire française sauf à la marge et dans d'autres siècles que le XVIIe siècle ? Pourquoi les noms de Michel Foucault, Gilles Deleuze, Jacques Lacan, Jacques Derrida, Sarah Kofman, Jean-Luc Nancy, Jacques Rancières, etc. apparaissent-ils si rarement dans les notes de bas de page des ouvrages français consacrés au XVIIe siècle ? Pourquoi seule la référence à Pierre Bourdieu apparaît-elle également partagée de part et d'autre de l'atlantique ? Pourquoi aujourd'hui Louis Marin est-il surtout mobilisé par les historiens, c'est-à-dire peu ou prou en dehors de son appartenance à la dite " modernité " philosophique ?

Bien sur, il y a sans doute des raisons institutionnelles à ces points aveugles. Je suggère qu'elles n'organisent pas notre réflexion afin que nous cherchions surtout à profiter de la présence de nos amis américains pour progresser dans la connaissance de leurs travaux et des écoles critiques dont ils se recommandent, tout autant que pour dessiner les présupposés théoriques qui organisent l'état de la recherche dix-septiémiste en France. Ainsi ce colloque, situé en France, sera-t-il une occasion d'opérer un décentrement qui nous renvoie à nos impensés idéologiques et théoriques et nous permette de mesurer nos propres manques.

Les communications, qui ne devront pas excéder 30 mn, mais pourront aussi être courtes, voire très courtes, pourront dès lors suivre deux voies différentes :

- présenter un aspect de la critique dix-septiémiste américaine (une école, un livre, une oeuvre…), en essayant de le rattacher au " backgroung " des sciences humaines aux USA.
- Partir d'un type de recherche (lecture déconstructionniste, féministe, multi-culturaliste, psychanalytique, etc.) bien représenté aux USA et quasi absente de la recherche dix-septiémiste française pour faire la critique (positive ou négative) de démarches françaises.

Le colloque se terminera enfin par une table ronde à laquelle tout le monde pourrait participer.


Les propositions sont à adresser à :
Hélène Merlin-Kajman
Professeur de littérature française du XVIIe siècle
à l'Université de Paris 3 – Sorbonne Nouvelle
Directrice de Cercle 17-21