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Appels à contributions
La langue de Shakespeare

La langue de Shakespeare

Publié le par Marion Moreau (Source : Yan Brailowsky)

Congrès 2013 de la Société Française Shakespeare

La langue de Shakespeare

21-23 mars 2012

Texte de cadrage par Jean-Michel Déprats et Nathalie Vienne-Guerrin

Le Congrès 2013 de la Société Française Shakespeare se tiendra du 21 au 23 mars 2013 à l’auditorium de l’INHA (Paris).

Enter Shakespeare, painted full of tongues

La langue de Shakespeare est et n’est pas la « langue de Shakespeare ». Si Shakespeare a largement contribué à l’évolution et à l’enrichissement de l’anglais, la langue que son oeuvre déploie semble à maints égards être une langue tout aussi étrangère à l’anglais de son temps qu’à l’anglais de nos contemporains. Langue étrangère creusée dans la langue anglaise, tout à la fois proche et lointaine, morte et vivante, cette langue est d’autant plus fertile qu’elle résiste à la compréhension, à la prononciation, à la traduction, empêchant toute fixation de son et de sens. Il n’est qu’à voir le nombre de dictionnaires que l’oeuvre de Shakespeare engendre pour comprendre que la langue de Shakespeare n’est pas une mais multiple, langue de théâtre, langue vivante par excellence qui parle et que l’on parle depuis plus de quatre siècles, sur les scènes du monde entier. Elle est la langue d’un temps mais aussi de tous les temps. « He hath the tongues » (Much Ado About Nothing, 5.1.163), pourrait-on dire de Shakespeare : celui à qui l’on a pu reprocher de ne pas maîtriser le latin et le grec semble bien connaître la langue et les langues.

L’anatomie de la langue dans le monde de Shakespeare

Dans son traité Lingua (1525), Érasme décrivait la langue comme le meilleur et le pire organe, l’appelant « organe ambivalent », faisant écho à l’histoire des langues d’Ésope et rejoignant le proverbe biblique selon lequel « Vie et mort sont au pouvoir de la langue » (Prov. 18 : 21). Les pièces de Shakespeare évoquent la langue dans sa matérialité, comme organe du goût et de la gourmandise (« gormandizing », 2 Henry IV, 5.3.53), du dire et du faire/fer, organe qui a ses freins et dont les barrières sont souvent transgressées. Étudier la langue de Shakespeare, c’est étudier la représentation de la langue dans le corpus shakespearien, où la Harvard concordance recense plus de 600 occurrences du terme « tongue » et de ses dérivés. « There’s a double tongue ; there’s two tongues » (Much Ado About Nothing, 5.1.165-66) : caressante ou blessante, empoisonnée ou suave, éloquente ou rebelle, féminine ou masculine, la langue chez Shakespeare est l’objet de multiples commentaires qui sont ancrés dans une culture biblique et classique mais dont on pourra tenter de formuler les spécificités.

Shakespeare, langue étrangère

L’objet de ce congrès est aussi d’explorer les spécificités de la langue shakespearienne et de mesurer la part que Shakespeare joue dans la création, l’invention de la langue élisabéthaine et dans l’évolution de la langue anglaise. On pourra analyser ce qui différencie la langue de Shakespeare de la langue de Marlowe ou de Jonson et les raisons pour lesquelles la « langue de Shakespeare » désigne, par périphrase, la langue anglaise dans son ensemble. On pourra également s’interroger sur l’évolution de la langue de Shakespeare, d’une pièce à l’autre, d’une période à l’autre. Il conviendra aussi d’évoquer le défi que cette langue constitue pour le traducteur. Mais on pourra aussi analyser le rôle de l’hétéroglossie dans la galimafrée shakespearienne, la présence des langues étrangères (le français, le latin, l’italien, l’espagnol), des dialectes (irlandais, écossais, gallois), ou des idiolectes telles que le « Pistolisme », ou le « Quicklyisme ».

Shakespeare, langue(s) vivante(s)

Langue poétique, la langue de Shakespeare est aussi langue de théâtre qui se donne en spectacle, conçue pour être vue, mise en corps, en bouche, en voix. Tout à la fois bonne et mauvaise, langue amoureuse et injurieuse, douce et amère, pécheresse ou vertueuse, la langue de Shakespeare met en scène une « guerre des langues » qui ne trouve tout son sens qu’en représentation. On pourra analyser les modalités de cette guerre des langues ou encore les bonnes et mauvaises langues qui habitent le corpus shakespearien. On pourra également étudier la langue de Shakespeare dans toute son oralité en en examinant les modes de prononciation et d’articulation.

Adaptant l’adage biblique (Jacques 3 :7-8), nous pourrions avancer que : « Nul ne peut dompter la langue … de Shakespeare ».

Appel à contributions

Dompter l’indomptable : ceux qui souhaitent embrasser cette entreprise paradoxale sont invités à envoyer leurs propositions de communication avant le 15 octobre 2012 à contact@societefrancaiseshakespeare.org.