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L’implicite et ses ramifications : regards croisés (Gabès, Tunisie)

L’implicite et ses ramifications : regards croisés (Gabès, Tunisie)

Publié le par Marc Escola (Source : Abdallah Terwait )

Appel à communication

L’Implicite et ses ramifications : regards croisés

Colloque international

L’Institut Supérieur Des Sciences Humaines De Médenine (ISSHM) (Université de Gabès, Tunisie),

20-21 avril 2020

 

Argumentaire  

Dans tout ce que nous disons, chaque fois que nous parlons, il y a une grande part d’implicite. Si nous devons nous exprimer toujours totalement, nous y passerions un temps infini. Aussi notre langage comporte-t-il inéluctablement une part de signification laissée à l’interprétation, et qui est susceptible d’être déduite par divers biais.

L’implicite est, comme le montre nombre de grands linguistes dont nous citons entre autres Ducrot, Anscombre, Maingueneau et Orecchioni, un sujet fondamental pour l’étude de plusieurs phénomènes langagiers. Dans cette perspective, ce colloque soulèvera de nouvelles pistes de réflexion sur les diverses facettes de la catégorie de l’implicite : la définition et le concept de l’implicite, ses fondements épistémiques, etc.

L’un des objectifs poursuivis est de mettre en évidence la diversité des relations qualifiées d’implicites dans le discours en général et d’en faire, nous l’espérons, une typologie. L’accent, dans ce contexte, sera notamment mis sur la complexité des structures discursives en lien avec l’Implicite. L’enjeu principal de ce colloque consiste alors à aborder, sous un jour nouveau, la question soulevée par ce qui est communément désigné par sens implicite.  

Sur ce plan, en dépit de leur omniprésence dans tous les genres textuels, les relations discursives dites asyndétiques, qualifiées souvent d’implicites, n’ont pas fait, jusqu’à ce jour, l’objet d’une description englobant leurs différentes interprétations ambiguës, les contextes qui les déclenchent ou, selon le cas, les bloquent, les mots clés tels que les marqueurs épistémiques ou inférentiels, etc. qui seraient en mesure de faciliter leur compréhension.

Le colloque fera la lumière sur tous ces aspects en tenant compte des avantages et désavantages de différents encodages suscités. (Moeschler, 2003)

Il faut rappeler ici qu’il faut toujours avoir à l’esprit que le sens, même quand il se traite comme étant explicite (conventionnel), se conçoit en tant qu’une donnée intrinsèquement associée au cerveau des interlocuteurs. Pour tout dire, le sens n’a pas d’autre réalité que mentale. La question directrice qui peut, dans cette optique, se poser est la suivante : Que veut dire l’opposition constamment faite entre sens explicite et sens implicite ?

De façon un peu simpliste, le sens explicite (conventionnel) est le sens qui s’associe immédiatement à un segment précis de l’énoncé ou bien qui résulte directement de la combinaison des segments qui le composent. (Christian Touratier, 2010) 

Pour ce qui concerne l’Implicite ou plus simplement le sens implicite, on en parle quand tout ou partie du sens des énoncés ne peut pas être affecté aux items lexicaux constitutifs des énoncés en jeu. Cela soulève une question : comment les interprétateurs peuvent-ils ainsi comprendre plus ou autre chose que ce qui est dit ?

Sans chercher à être complets, nous évoquerons, dans ce colloque, un certain nombre de faits où, à tort ou à raison, on peut considérer que le sens est implicite, au moins partiellement, et nous nous demanderons par quels mécanismes les interprétateurs, quand ils écoutent ou lisent, parviennent à reconstituer un sens de ce type.

Rappelons, dans ce contexte, que le sens implicite peut représenter tout ou partie de l’information à transmettre, quand l’énoncé est descriptif ou confère des indications référentielles, mais qu’il inclut aussi les actes de langage, les intentions communicatives chaque fois qu’ils doivent être identifiés par le destinataire pour que la communication réussisse. Bien plus, la question de l’Implicite peut soulever d’autres problématiques dont nous citons, entre autres, le sous-entendu, la présupposition, les inférences, etc.

Pour plus de lisibilité, la catégorie du sous-entendu  ou plus simplement les mots sous-entendus qui, dans la rhétorique classique, sont qualifiés de zeugme ou de zeugma, seraient susceptibles d’être matériellement rétablis à partir du contexte ; ce qui entraîne le rétablissement de leur sens. S’ils sont implicites, c’est dans la mesure où ils ne sont pas prononcés, dans certains cas, pour des raisons d’économie. Dans de nombreux enchaînements, leur absence est signalée par une lacune syntaxique et/ou sémantique : l’énoncé n’est analysable que si l’on restitue le ou les mots sous-entendus. Pour mieux rendre compte de cette propriété, soit à traiter le discours dans ce vers de Victor Hugo :

« L’air était plein d’encens et les près de verdure. »

Dans l’exemple présent, le syntagme étaient pleins se trouve sous-entendu dans le second hémistiche ; si l’on ne le rétablit pas, alors que cette restitution ne présente aucune difficulté étant donné de parallélisme de L’air était plein d’encens, le segment les près de verdure devient à la fois asémantique et agrammatical. Pour palier ce hiatus, il serait utile de faire appel au principe de bonne formation selon lequel chaque énoncé produit devrait être grammaticalement correct et recevoir ainsi un sens raisonnable. (Christian Baylon, 2005)

Dans le même ordre d’idées, une autre forme de sous-entendu a été répertoriée par la rhétorique classique sous le nom d’Ellipse. Sur ce point, l’existence, dans l’ellipse, d’un parallélisme permettant de compléter le sens en rétablissant à coup sûr les lexèmes manquants, n’est pas toujours garantie. Face à un procès pareil, on doit se contenter de retrouver en gros le sens.

Afin de mieux rendre compte de ce phénomène qu’est l’Ellipse, dans le domaine littéraire, il est à noter que « la littérature a affaire à l’implicite à deux niveaux : à l’intérieur des œuvres, bien entendu, mais aussi dans la communication qui s’établit entre l’œuvre et son destinataire. » (Maingueneau, p. 291).

Somme toute, force est de constater que tout usager du langage semble avoir des capacités d’inférence, auxquelles l’interlocuteur fait confiance et qui lui permettent de comprendre en dépit de l’ellipse.

En outre, les relations discursives en général sont intimement liées à la catégorie de l’Implicite. La causalité, notamment celle dite paratactique (asyndétique), en est témoin. A l’en croire, dans une série d’éventualités, il suffit très souvent d’indiquer la cause pour suggérer l’effet, ou l’effet pour suggérer la cause.

Dans cette même optique, des paroles que quelqu’un prononce, il est tout à fait légitime de tirer des inférences. Pour ce faire, on prend généralement appui sur deux compétences : la compétence logique, autrement dit l’aptitude à raisonner, et la compétence encyclopédique en quelque sorte ; c’est-à-dire les connaissances dont on dispose et qui, combinées à ce qui a été dit ou à ce que l’on en a déjà déduit, permettent des raisonnements.

Pour finir ce tour d’horizon, les présuppositions semblent introduire le plus souvent un sens implicite ; notamment celles dites existentielles. Sur ce point, évoquer, dans un énoncé descriptif, une personne ou un objet ou un événement, cela présuppose qu’il existe.  (Frege, Ducrot)

Afin d’élargir le champ de cette perspective, il importe de signaler que le silence dans la littérature s’envisage, par les spécialistes, en tant qu’un rapport à l’intériorité du texte ; traduit notamment par un vide laissé (in)consciemment par l’auteur à la charge du récepteur de l’œuvre littéraire. L’enjeu principal du lecteur, dans cette situation, consiste en quelque sorte à combler ledit vide en lui conférant conséquemment un sens. Vu sous cet angle, le lecteur s’attribue le rôle de faire parler le silence textuel.   

Par ailleurs, la connotation semble être étroitement liée à la catégorie de l’implicite dans la mesure où elle se considère comme une composante sémantique particulière d’une unité lexicale,  qui sert de pont sémantique entre un sens littéral et un sens figuré.

Ajoutons que, dans cette perspective, le rapport entre l’image et le sens en général est très intrinsèque. Sur ce point, le linguiste Igor Mel’chuk a mis à profit la notion de structure imagière du sens.

A la lumière de ce qui précède, il est à noter que le véritable sens des énoncés dépasse largement ce que disent expressément les lexèmes mêmes qui les constituent, et que l’interlocuteur est souvent amené, pour comprendre ce qui lui est dit, à admettre des choses qui ne lui sont pas expressément dites. Comme l’a bien vu Vincent Nyckees :

« Tous les énoncés requièrent ainsi, peu ou prou, des informations annexes demeurant implicites. Un message n’est jamais totalement explicite. » (Nyckees, 1998, p.249)

Pour récapituler, l’objectif principal de cette rencontre scientifique consiste à rassembler des chercheurs autour de la question que l’Implicite soulève, et ce, dans le but de faire la lumière sur les approches adoptées dans le traitement de cette thématique et qui sont issues de domaines variés et complémentaires. Dans le but de répondre à l’objectif fixé, nous mettrons à profit, dans ce qui suivra, quelques pistes de réflexion qui se veulent de simples suggestions :

  • Le sens explicite et le sens implicite : formes et interactions
  • La relation Texte / Lecteur (Interprétateur) et les enjeux de l’Implicite
  • Les relations discursives asyndétiques : des formes de l’Implicite
  • Comment l’œuvre littéraire peut-elle susciter la quête des implicites ?
  • Comment un texte littéraire montre-t-il du doigt un sens au-delà des contenus immédiats ?
  • L’œuvre littéraire et la problématique du sens caché
  • Le rapport Image/sens (Implicite)
  • Le silence dans l’œuvre littéraire: une facette de l’Implicite
  • L’allégorie et le symbolique : deux ramifications stylistiques de l’Implicite

 

Les communications peuvent aborder des sujets en rapport avec un autre domaine non cité parmi les axes de recherche susmentionnés à condition de respecter la thématique générale du colloque.

*

Les propositions de communication devront être envoyées avant le 15 janvier 2020 à l’adresse électronique du colloque : Implicite2020@gmail.com

  • Lieu du colloque : L’Institut Supérieur Des Sciences Humaines De Médenine (ISSHM) (Université de Gabès, Tunisie)
  • Langues du colloque : français, arabe et anglais

 

Comité scientifique :

Georges Kleiber (Université de Strasbourg)

Catherine Fuchs  (CNRS)

Gilles Corminboeuf (Université de Fribourg)

Bourguiba Ben Rejeb (Université de Carthage)

Mohamed Bouattour (Université de Sfax)

Mokhtar Sahnoun  (Université de la Manouba)

Mongi Kahloul (Université de Gabès)

Samir Laabidi (Académie militaire / Université de Tunis)   

Chokri Rhibi (Université de Gabès)

Radhouan Briki (Université de Kairouan)

Mustapha Trabelsi (Université de Sfax)

Kamel Skander (Université de Sfax)

Sonia Zlitni-Fitouri (Université de Tunis)

Salwa Béji (Université de Sousse)

Philippe Monneret (Sorbonne Université)

Foued Laaroussi (Université de Rouen) 

 

Comité d’organisation et de coordination (par ordre alphabétique) :

Abdallah Terwait (ISSHM, Université de Gabès, Tunisie)

Chokri Rhibi (ISSHM, Université de Gabès, Tunisie)

Faouzi Horchani (ISSHM, Université de Gabès, Tunisie)

Jamal Zaidi (ISSHM, Université de Gabès, Tunisie)

Lassaad Heni (Institut Supérieur Des Langues De Gabès, Tunisie)

Mourad Abdelkabir (ISSHM, Université de Gabès, Tunisie)

Naoufel Fathallah (ISSHM, Université de Gabès, Tunisie)

 

Responsables : Abdallah Terwait et Chokri Rhibi 

 

Dates importantes :

  • 15 janvier 2020 : dernier délai d’envoi des propositions (Nom et prénom, affiliation, statut, adresse électronique, titre de la communication, résumé et bibliographie)
  • 31 janvier 2020: réponse du comité scientifique
  • 15 avril 2020: confirmation de la participation et envoi de la version intégrale des communications acceptées
  • 20-21 avril 2020 : la tenue du colloque
  • Responsable :
    Abdallah Terwait
  • Adresse :
    L'Institut Supérieur Des Sciences Humaines De Médenine, Université de Gabès, Tunisie