Édition
Nouvelle parution
J. Baldwin, Blues pour l'homme blanc (1964, éd. G. Cogez)

J. Baldwin, Blues pour l'homme blanc (1964, éd. G. Cogez)

Publié le par Université de Lausanne (Source : Gérard Cogez)

James Baldwin, 

Blues pour l'homme blanc, 

traduction de l'anglais (États-Unis) et présentation de Gérard Cogez,

La Découverte, collection "Zones", 2020.

EAN13 : 9782355221569.

 

James Baldwin a écrit cette pièce en 1964 en réaction à l’assassinat de son ami Medgar Evers, militant des droits civiques, abattu devant son domicile du Mississippi le 12 juin 1963 par un suprémaciste blanc.
L’accumulation des meurtres racistes aux États-Unis (dont celui de quatre jeunes filles noires dans un attentat à la bombe contre une église baptiste de Birmingham, Alabama, le 15 septembre 1963) constitue l’arrière-plan de ce cri de révolte scénique. La quasi-impunité qui suit ces actes sera l’élément déclencheur de ce travail.

C’est aussi le meurtre atroce en 1955 de l’adolescent Emmett Till qu’il décide d’évoquer : « Dans ma pièce, écrit-il, il est question d’un jeune homme qui est mort ; tout, en fait, tourne autour de ce mort. Toute l’action de la pièce s’articule autour de la volonté de découvrir comment cette mort est survenue et qui, véritablement, à part l’homme qui a physiquement commis l’acte, est responsable de sa mort. L’action de la    pièce implique l’effroyable découverte que personne n’est innocent […]. Tous y ont participé, comme nous tous y participons. »

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Sommaire

Présentation, par Gérard Cogez
Blues pour l’homme blanc
Remarques à propos de Blues, par James Baldwin
Liste des personnages
Acte I
Acte II
Acte III.

Voir le livre sur le site de l'éditeur…

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James Baldwin (1924-1987) est un écrivain africain-américain, auteur de romans, de nouvelles, de pièces de théâtre, de poésies et d’essais. Il est notamment l’auteur du roman La Conversion (1953), de l’essai La Prochaine Fois, le feu (1962) et de la nouvelle Blues pour Sonny (parue dans le recueil Face à l’homme blanc, 1965).

Gérard Cogez, professeur de littérature à l’université de Lille, a travaillé sur Michel Leiris et Aimé Césaire. Après avoir consacré divers travaux et articles à James Baldwin, il prépare actuellement sa biographie.

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Revue de presse :

On peut lire sur en-attendant-nadeau.fr un article sur cet ouvrage :

"Baldwin fourvoyé", par Claude Grimal (en ligne le 30 septembre 2021)

En 1964, James Baldwin publia une pièce, Blues pour l’homme blanc (Blues for Mister Charlie), qui fut jouée la même année à Broadway et reçut un accueil poli. La pièce a depuis été peu reprise, sa dernière mise en scène remontant au début des années 2000, lorsque Talawa, une compagnie noire anglaise, en donna quelques représentations. La désaffection pour l’œuvre est, il faut bien le dire, méritée, et seul un inconditionnel de Baldwin ou un amateur de « period pieces » pourrait aujourd’hui y trouver un intérêt. 

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"La pièce est construite avec un art vivifiant de la réplique. Elle n’est pas conçue linéairement, ou destinée à raconter seulement des événements. Elle constitue une écriture vivante qui, sans angélisme ni haine, fouille les croyances racistes et les élaborations de la haine sociale et politique.

Baldwin refuse de laisser le bien et le mal se faire face. Car cela n’explique rien et trop d’anti-racistes se contentent de ces dichotomies ou de leur renversement, rejoignant par-là les racistes, malgré tout. On pourrait affirmer plutôt qu’il explore la manière dont la bêtise est confondue avec l’intelligence et la beauté avec la vulgarité.

Dans ce dessein, mais évitons de raconter la pièce, trois actes se déploient dans une mise en scène (souhaitée ou effective) partagée, laquelle permet de voir/entendre des partis contraires, mais aussi le passé et le présent, le Nord et le Sud (des États-Unis), etc. La lecture solitaire est d’ailleurs toujours conduite, dans cette édition, par les remarques de mise en scène prévues par l’auteur.

Cette édition est cependant assortie d’une « présentation » qu’il convient de ne pas négliger, car non seulement elle rappelle les événements essentiels qui peuvent mobiliser un discours, mais elle amplifie les propos en les reliant à tout un contexte de discours et d'auteurs (Martin Luther King, Malcolm X, Philip Roth).

Au-delà de l’exploration des affirmations du suprématisme blanc, reste une question que le lecteur ne peut pas éviter. Elle porte sur les rapports de la littérature et de l’ordre du monde (comme elle pourrait porter sur les rapports de l’art et de la société). À quoi conduit vraiment le théâtre, quelle fin se propose-t-il, que réussit-il ? Ce sont les questions d’Ernst Bloch indiquées en note par Gérard Cogez, présentateur et traducteur de la pièce, devant le peu d’impact social de l’art. S’il n’a pas les moyens de changer le monde, l’art permet peut-être de déployer moins d’indifférence."

Christian Ruby, www.nonfiction.fr

Lire l'article dans son intégralité…

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Située dans la ville imaginaire de Plaguetown, la pièce tourne autour de la mort d’un jeune Noir dont le seul tort fut de tenir tête à un commerçant blanc. Dense, rythmé par des flash-back, se déroulant sur trois actes – le premier, dominé par la présence des Noirs, le deuxième, par celle des Blancs, le troisième consacré au procès du commerçant -, le texte s’attache à montrer comment cette mort est survenue, ce qui l’a motivée et qui en est responsable. Baldwin s’exprime avec sincérité, intelligence et humanité. S’il condamne, parfois avec rage, il sait aussi se faire avocat de la défense, cherchant à comprendre les racines du racisme. La pièce, au souffle romanesque, a presque 50 ans ; on la croirait écrite aujourd’hui tant l’Amérique de 2020, celle qui a vu George Floyd agoniser sous le genou d’un policier, semble ne rien avoir appris des leçons de l’Histoire.

  Dominique Poncet - Lire / Le Magazine littéraire - 01/09/2020

Derrière l’apparente simplicité de cette présentation, il y a chez Baldwin le souci de restituer un contexte évidemment plus complexe, où la situation socio-économique fait de « Monsieur Charlie » –le blanc « de base » qu’on désigne dans l’argot noir–, une victime collatérale du racisme dans lequel il s’enferme. Subtilité des représentations et des registres de langage, comme cet argot que Baldwin mobilise souvent mais ne revendique jamais pour ne pas l’opposer, ce qui serait essentialisé comme la langue légitime, la langue qui domine. La pièce est un coup de maître.

    Cyril Marchan - Slate.fr - 06/09/20

Baldwin sait montrer la mécanique tendue et implacable d’un assassinat, il sait peindre des personnages complexes, sans les piéger dans des dichotomies trop faciles – côté Noirs comme Blancs –, et il sait mettre en œuvre sa conviction profonde, déclinée d’essais en romans, conviction bouleversante parce qu’elle fait basculer le regard : le racisme n’est pas un problème de Noirs, c’est un problème de Blancs ; mais ce sont les Noirs qui savent ce qu’est le racisme et non les Blancs.

  Lise Wajeman - Mediapart - 03/09/2020.