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Infox, Fake News et « Nouvelles faulses » : perspectives historiques (XVe – XXe siècles)

Infox, Fake News et « Nouvelles faulses » : perspectives historiques (XVe – XXe siècles)

Publié le par Université de Lausanne (Source : Vincent Masse)

Appel à contributions pour un numéro thématique de la revue Dalhousie French Studies

Infox, Fake News et « Nouvelles faulses » : perspectives historiques (XVe – XXe siècles)

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DESCRIPTION :

Déjà en 1537 La Prognostication des prognostications de Bonaventure des Périers dénonçait l’engouement pour les « nouveautez nouvelles » dont souffrait un monde désormais « affamé de Nouvelles », cherchant à dévorer constamment les nouvelles, n’importe quelles nouvelles, toujours plus de nouvelles, avec une insatiabilité qui attire, qui se repait tout particulièrement des « nouvelles faulses » :

Et tant tu es les Nouvelles leschant,
Que tu prens tout, le bon, et le meschant :
Car bien souvent les faulses et meschantes
Sont celles là pour lesquelles plus chantes.

« Tu vas », accuse des Périers, s’adressant à un monde transformé par ce nouveau média qu’était alors l’imprimerie (et plus particulièrement les brochures et publications occasionnelles), « tu cours ça et là, par ces rues, en mengeant [les nouvelles], et [en les] rongeant toutes crues ».

Tantost de toy sont bonnes [nouvelles] approuvées,
Tu les reprens, tu les prises et notes,
À belles dents [...] les grignotes,
En te saoulant de tes Nouvelles faulses,
Comme ung souillard cuysinier de ses saulses. (1)

Notre XXIe siècle, persuadé par ses propres pulsions médiatiques que tout est inouï, extraordinaire, nouveau, n’aurait-il pas avantage à ralentir le pas, ou même à revenir en arrière, pour faire l’archéologie de ces « nouveautez nouvelles », ou peut-être de ces fausses nouveautés, que sont les Fake News ? Il y aurait fort à faire. L’historien Robert Darnton l’affirmait récemment : « on retrouve tout au long de l’Histoire l’équivalent des textes et tweets venimeux que l’on observe aujourd’hui » ; il donnait alors lui-même les exemples des pasquinades au XVIe siècle, des canards parisiens du XVIIe, de la presse à scandale londonienne et des gazettes françaises manuscrites et clandestines au XVIIIe (2). On peut ajouter à cela la véritable jungle de l’imprimé qui se développe au XIXe, suite aux progrès techniques de l’imprimerie, avec l’explosion de la grande presse, le développement des journaux d’opinion aux orientations idéologiques marquées, et la naissance des premiers grands groupes d’édition. Et pour terminer, le XXe, riche en informations alternatives, à l’enseigne du « bourrage de crânes » dénoncé lors du premier conflit mondial, de la propagande élevée en science qui marque la deuxième guerre, et des contestations soixante-huitardes s’élevant contre les mensonges médiatiques au service du pouvoir.

Avant d’établir des comparaisons, de dresser des parallèles, de s’intéresser aux évolutions, aux permanences, aux discontinuités de ces traditions de nouvelles faulses, il convient d’étudier d’abord le passé lui-même, en lui-même, et c’est pour ce faire que la revue Dalhousie French Studies propose un numéro thématique consacré à « Infox, Fake News et “Nouvelles faulses” ». Les dates butoirs annoncées par notre titre, « XVe – XXe siècles », soulignent la profondeur historique recherchée, voire les effets de continuités, et correspondent à l’ère de l’imprimé, depuis Gutenberg et ses premières brochures (moins connues que ses bibles), jusqu’aux journaux du premier XXe siècle (ceux que déclasseront éventuellement la radio, la télévision, puis l’Internet, mais qui alors règnent en maîtres), en passant par les pamphlets, les Gazettes, les mazarinades, etc. Ces dates sont flexibles, du moins en amont : les propositions consacrées à l’époque médiévale seront également considérées.

Les contributions devront porter essentiellement sur les littératures ou les médias d’expression française.

Les réflexions et exemples bien documentés, qui pourront au besoin être accompagnés par l’édition de certains courts textes illustratifs des XVe – XXe siècles, seront préférés aux essais ou aux simples dénonciations des temps présents.

La date limite pour soumettre une proposition (de 200 à 500 mots) est le 15 janvier 2020.

Prière d’envoyer les propositions aux deux directeurs du numéro : Vincent Masse (vincent.masse@dal.ca) et Vittorio Frigerio (frigerio@dal.ca).

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Notes :

(1) T. Peach (éd.), « Bonaventure des Périers, La prognostication des prognostications (1537). Texte et notes », Bibliothèque d’Humanisme et Renaissance, vol. LII, no 1, 1990, p. 109-121.

(2) Robert Darnton, « On retrouve tout au long de l’histoire l’équivalent de l’épidémie actuelle de “fake news” », Le Monde 20/02/2017 ; voir également le dossier « La fausse information de la Gazette à Twitter » préparé par Marion Brétéché & Evelyne Cohen pour la revue Le Temps des médias, no 30, 2018.