Édition
Nouvelle parution
C. Mihailovic,  Mémoires d’un janissaire

C. Mihailovic, Mémoires d’un janissaire

Publié le par Marc Escola


Constantin Mihailovic

Mémoires d’un janissaire

À paraître 24/01/2012

Éditeur : Anacharsis

ISBN : 978-2-914777-834

224 pages 17 €

 

Capturé par les Turcs à l’âge de vingt ans en 1455, le Serbe Constantin Mihailovic servit pendant près de dix ans dans le régiment des janissaires. Il récapitule dans ses Mémoires les instants les plus dramatiques du siècle de fer et de feu qui vient de s’écouler, lorsque l’Empire ottoman conduisait à son terme la conquête du monde balkanique.

Constantin Mihailovic, Serbe d’Ostrovica, village situé non loin de Nish, fut capturé par les Turcs à l’âge de vingt ans en 1455. Incorporé de force dans le corps de Janissaires du sultan ottoman, il fut à nouveau fait prisonnier par les Hongrois en 1463.

Ayant recouvré sa liberté, il s’en fut en Bohême, puis en Pologne. C’est là qu’il écrivit son ouvrage, une Chronique turque.

Mais ce livre présente nombre de parts d’ombres. On ne sait, en réalité, en quelle langue au juste il fut écrit. Il en existe des versions en tchèque et des versions en polonais, mais, quant à la version originale qui aurait du être en serbe, on ignore tout. Ces considérations philologiques ne sont guère tout à fait dénuées d’intérêt : la Chronique turque de Constantin est un tableau du monde ottoman en plein essor, rapporté par un homme qui passa près de dix ans parmi les soldats d’élites que constituait le corps des janissaires. Ce qu’il rapporte, ce sont des récits tout à fait inédits sur les origines de l’Empire, sur les moeurs des « Turcs » de cet âge, qu’il a sans doute puisés du fin fond de son casernement. Et il s’adresse aux rois de Pologne et de Hongrie afin qu’ils partent en guerre contre le Sultan : autrement dit, ces Mémoires d’un janissaire constituent un récit qui, des marches de Hongrie aux confins septentrionaux de la Pologne, a donné à connaître le monde turc à l’ensemble de l’Europe centrale. Ses multiples versions en différentes langues témoignent de l’importance qu’il a revêtu à cet égard.

On connaît les « visions du turc » en Occident à la fin du XVe siècle ; il est nettement plus rare que l’on rencontre une figuration des « ennemis intimes » des populations de l’Europe dite « médiane ».

Les Mémoires d’un janissaire déploient ainsi une représentation encore inédite des peuples variés qui composaient les « Turcs », selon le principe de récits qui s’apparentent souvent à des légendes colportées sans doute au sein des contingents d’origine chrétienne du Sultan, ou bien issus de l’expérience de l’auteur.

Au total, le récit de Constantin, qui balance entre l’exposé historique et le récit de vie, expose toute la matière, parfaitement méconnue en France, qui va donner lieu aux romans nationaux des mondes balkaniques contemporains. Après Des Turcs, du Saxon de Transylvanie Georges de Hongrie, et Captif des Tatars du Bavarois Johannes Schiltberger, Anacharsis poursuit ses enquêtes sur le monde turc naissant tel que rapporté par d’anciens captifs. Ici, le Serbe Konstantin propose une autre entrée dans ce monde, un autre regard ; mais, toujours, il reste en bascule entre peur et fascination.

Charles Zaremba est professeur de langues slaves à l’Université de Provence. Il est aussi le traducteur – entre autres – du Prix Nobel de littérature, Imre Kersetsz (Actes Sud).

Michel Balivet est historien, spécialiste de l’histoire turque et byzantine des XIVe-XVe siècles.