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Aventures radiophoniques du Nouveau Roman

Aventures radiophoniques du Nouveau Roman

Publié le par Emilien Sermier (Source : Pierre-Marie Héron)

Aventures radiophoniques du Nouveau Roman

Colloque international de Montpellier, 19-20 novembre 2015

 

Si contestable qu’elle semble déjà l’époque et plus encore aujourd’hui que ses grands représentants (Claude Simon, Nathalie Sarraute, Michel Butor…) apparaissent dans leur irréductible originalité, l’appellation « Nouveau Roman » reste commode pour désigner un certain nombre d’aventures littéraires des années 1950 et suivantes, apparentées par un commun besoin de rupture avec une certain mode d’emploi du genre romanesque… et par l’habileté médiatique de Robbe-Grillet. Elle reste commode, à condition de ne pas donner au groupe qu’elle identifie des contours trop précis et d’y inclure aussi, comme cela se faisait parfois à l’époque, un Samuel Beckett, une Marguerite Duras (les plus rétifs certes à l’idée de groupe), voire même un Raymond Queneau (Robbe-Grillet le fait volontiers) ou un Georges Perec (l’auteur des Choses) ; sans oublier des auteurs de moindre envergure comme Jean Thibaudeau, Claude Mauriac, Monique Wittig à ses débuts (l’auteur de L'Opoponax)… À condition aussi de ne pas limiter ces auteurs à leurs romans ni même à leurs livres, puisque tous ou presque ont investi d’autres territoires artistiques : théâtre, cinéma, radio notamment.  

Ces aventures radiophoniques des auteurs estampillés « Nouveau Roman » restent globalement mal connues sauf exception (Beckett), et dans tous les cas beaucoup moins que leur travail pour le théâtre et surtout le cinéma, dont l'influence sur le mode d'écriture romanesque semble aujourd'hui reconnu. Michel Butor écrit pour la radio Réseau aérien (1962) et 6810000 litres d’eau par seconde (1965). Claude Ollier est l’auteur d’une douzaine de « jeux acoustiques » entre 1966 et 1996, conçus comme des compositions sonores. De La Manivelle / The Old Tune (trad. de Beckett) en 1960 à Mortin pas mort (1984), Robert Pinget produit une petite dizaine de « pièces radiophoniques » privilégiant les formes de l’interview, de l’enquête et du dialogue. Pour Nathalie Sarraute, de Silence (1964) à Isma (1972) et Elle est là (1977), la radio est la voie d’un renouvellement après Les Fruits d’or (1963). De l'adaptation d’Un barrage contre le Pacifique en 1955 à L’après-midi de Monsieur Andesmas (1965, adaptation de l’auteur) et India Song en 1969, dont la bande-son sera reprise pour son film culte de 1975, Marguerite Duras nourrit un travail sur le pouvoir fétichiste de la voix dont sa production cinématographique ultérieure conserve l’empreinte. Etc. La plupart de ces œuvres « pour l’oreille » résultent de commandes de la radio française, ou de la SDR de Stuttgart ; certaines de la BBC.

Si donc presque tous les auteurs du Nouveau Roman ont écrit des œuvres pour la radio, en partie originales, en partie dérivées de textes antérieurs, le lien entre ce qui a été un temps désigné  comme  « École du regard » (à quoi Pinget cependant préférait « l'écoute de l'oreille ») et le médium radiophonique ne va pas de soi. Même si la création d'images internes lors de l'audition joue un rôle central, son processus demeure difficile à cerner. La question de la temporalité romanesque ‒ au centre des expérimentations des nouveaux romanciers, dont les récits, souvent au présent et nourris de mises en abyme, se confondent volontiers avec « l'aventure de l'écriture » (Jean Ricardou) ‒  appelle pour sa part un usage inédit de la voix et du son dans les pièces radiophoniques.

Au fond, la rencontre du « Nouveau Roman » avec le médium radiophonique suscite un certain nombre de questions, que le colloque invite à explorer. Notamment :

En quoi l'écriture pour la radio prolonge-t-elle la quête des écrivains du Nouveau Roman ? Comment les choix esthétiques variés des nouveaux romanciers trouvent-ils un équivalent, une traduction dans un système sémiotique différent ? En quoi la pratique d'un médium différent peut-elle les entraîner à des usages inédits de l'écrit et des codes romanesques ? Y a-t-il eu ‒ à l'instar des effets de l'expérience cinématographique ‒ une influence des codes spécifiques de l'écriture radiophonique sur certains romans de ces auteurs ?

Sachant qu’un aussi vaste corpus rend difficile un regard d'ensemble, il est également possible de s'interroger sur la place des réalisations radiophoniques dans les parcours individuels d’écrivain. Quelle conception des spécificités du médium radiophonique chacun se forme-t-il ? Comment chacun l'utilise-t-il ? Quels liens avec leurs romans, leurs pièces de théâtre, quels transferts, quelles réécritures peut-on observer ? 

Auteurs concernés:

Samuel Beckett, Michel Butor, Marguerite Duras, Claude Mauriac, Claude Ollier, Robert Pinget, Jean Ricardou, Alain Robbe-Grillet, Nathalie Sarraute, Claude Simon, Jean Thibaudeau, Monique Wittig…

 

Les propositions sont à adresser à Pierre-Marie Héron (spm.heron@gmail.com) ou Annie Pibarot (anniepibarot@orange.fr)