Essai
Nouvelle parution
A. Fiant, L'Attrait du silence

A. Fiant, L'Attrait du silence

Publié le par Noelle Vonsiebenthal (Source : A.Fiant)

L’attrait du silence

Antony Fiant

Éditions Yellow Now

12,00 € — 96 p. — ISBN 9782873404673

 

Quand bien même on le réclame sur la plupart des plateaux avant chaque prise de vue, le silence au cinéma est difficilement tenable. Instinctivement associé au vide, au néant, à la contemplation, à la passivité, au temps suspendu, à la mort, ou encore à l’impossibilité de l’événement, le silence est craint. L’attrait du silence manifesté ou subi par les cinéastes et les personnages dans la quinzaine de films ici réunis (du Prince étudiant d’Ernst Lubitsch à Paterson de Jim Jarmusch en passant par Silence et Cri de Miklós Jancsó) doit donc être entendu comme aspiration jamais véritablement concrétisée ni satisfaite. Le silence au cinéma est toujours relatif, perturbé, rompu, brisé, irrégulier, provisoire, dénaturé.

Mais il ne provoque en rien une sclérose du sens, du récit ou encore de l’émotion, pour redonner temporairement
la main au visible, à défaut de son autonomie complète. Le motif du silence – décliné selon quatre approches entrecoupées de focalisations sur des moments silencieux – sera donc ici mis en exergue dans sa capacité à stimuler des récits fictionnels mais aussi documentaires. Dès lors il conviendra de se poser la question : par quoi est-il compensé ? C’est que le silence est très vite devenu un recours dramatique très efficace, non pas à le considérer isolément, mais grâce à sa confrontation ou sa juxtaposition avec les composantes de la bande-son que sont la parole, la musique et les bruits. Autrement dit, le silence a besoin d’elles pour résonner, à défaut de s’imposer comme quatrième composante.

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Antony Fiant est professeur en études cinématographiques à l’université Rennes 2. Il travaille sur l’esthétique et la dramaturgie du cinéma contemporain, qu’il soit de fiction ou documentaire, et plus particulièrement sur le cinéma soustractif et la représentation des peuples. Il collabore à plusieurs revues de cinéma (Trafic, Positif et Images documentaires) et est l’auteur de quatre essais dont : Pour un cinéma contemporain soustractif (2014, Presses universitaires de Vincennes) et Wang Bing. Un geste documentaire de notre temps (2019, éditions Warm). Il a aussi coordonné, aux éditions Yellow Now, avec Gilles Mouëllic et Caroline Zéau, Johan van der Keuken. Documenter une présence au monde (2020, « Côté Cinéma »).

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Sommaire:

Minute de silence (Bande à part de Jean-Luc Godard) /// Chapitre
1. Pour en finir avec le cinéma muet. Une histoire d’émancipation
(Le Prince étudiant d’Ernst Lubitsch) – Le cinéma muet au secours
de la parole (Le silence est d’or de René Clair) – Une fable néomuette
(Juha d’Aki Kaurismäki) /// Le silence d’abraham Bomba
(Shoah de Claude Lanzmann) /// Chapitre 2. Le silence comme
acte de résistance (Le Silence de la mer de Jean-Pierre Melville,
Silence et Cri de Miklós Jancsó, Libera me d’Alain Cavalier) – Des
silences compensés – Expériences dramaturgiques /// minutes de
silence (Dix Minutes de silence pour John Lennon de Raymond
Depardon) /// Chapitre 3. Les évadés, la voleuse et le fugitif. (Un
condamné à mort s’est échappé
de Robert Bresson, Pas de printemps
pour Marnie
d’Alfred Hitchcock, Essential Killing de Jerzy
Skolimowski) – Menaces sonores – Sons protecteurs /// Le silence
de Gao ertai (Beauty Lives in Freedom de Wang Bing) /// Chapitre
4. silence de l’art, art du silence (Blow up de Michelangelo Antonioni,
Le Songe de la lumière de Victor Erice, Paterson de Jim
Jarmusch) – D’abord interroger du regard – Passage à l’acte – Sortir
du silence /// minute de silence (Afriques, comment ça va avec la
douleur ?
de Raymond Depardon).