Essai
Nouvelle parution
Michel Arouimi, Rimbaud sous les traits de Fu Site

Michel Arouimi, Rimbaud sous les traits de Fu Site

Publié le par Eloïse Bidegorry (Source : Michel Arouimi)

Les tableaux du peintre contemporain Fu Site, exposés en 2022 à la galerie Beijin (Paris), présentent une analogie intrigante avec les poèmes de Rimbaud, que ce peintre (peu familier de notre langue) n'a pas tous lus, et qui n'ont joué aucun rôle inspirateur dans ces tableaux semi-figuratifs. La grammaire des formes, dans ces derniers, perpétue les lois du "Nombre et de l'Harmonie" (Rimbaud). Ces formes peintes évoquant les thèmes émergeants de quelques oeuvres de Rimbaud. 

Les premiers chapitres de cet ouvrage sont réservés à l'intérêt explicite de Rimbaud pour la Chine, et pour la peinture. Curieusement, le thème chinois, dans certains de ses poèmes, exprime leurs ambitions "alchimiques", en même temps qu'il participe, par sa position dans l'espace graphique, à l'harmonie formelle du poème. Or, la dimension autocritique des poèmes de Rimbaud ne va pas sans une remise en cause paradoxale des principes mêmes de l'Harmonie. Ce phénomène se renouvelle sous le pinceau de Fu Site, trempé dans le souvenir de sa propre tradition. Fu Site pourrait se compter parmi les "horribles travailleurs" que le poète "voyant" appelait de ses voeux, pour poursuivre son expérience.

Après deux chapitres introductifs ("La Chine de Rimbaud", et "La peinture chez Rimbaud"), treize chapitres mettent en rapport différents tableaux avec un poème de Rimbaud (poème en vers, ou Illumination). L'ordre suivi dans cette démonstration suggère une exploration progressive de l'énigme qui reste celle des poèmes de Rimbaud.

Le degré extrême de ce rapprochement est atteint avec un ou deux petits formats du peintre, qui semblent illustrer les lettres les plus terribles du dernier Rimbaud ; lettres que Fu Site n'a pourtant jamais lues.

Ces rapprochements sont-ils si subjectifs? Tout se passe comme si le questionnement des causes premières, chez le poète et chez le peintre, se faisait par des formes (parfois "informes") qui suggèrent le lien spirituel des deux traditions...

Outre les nombreuses planches en couleurs, cet ouvrage doit son attrait à la reproduction des poèmes de Rimbaud, en caractères blancs dans des fenêtres noires. Une idée de l'éditeur, inspirée par le rapport du Yin et du Yang?