« Les violacés sombres à côté des verts baryte, les noirs d’arbres derrière lesdernières broussailles et feuilles ocre jaune » (carnet, 29 octobre 1939), « les bois touffus mauve pâle » (23 décembre), « l’ombre violette comme celle qui tombe des vitraux d’une crypte » (12 octobre). Mobilisé en août 1939, Claude Simon rencontre la guerre en Flandre, où son régiment de cavalerie est bientôt décimé. Cavalier erratique sur la meurtrière route des Flandres, c'est en peintre et en photographe qu’il s’attache à noter dans ses "carnets de guerre" la fulgurance des impressions qui le traversent. Le tragique vécu en Flandre qui a fait voler en éclats les certitudes irradie désormais l’œuvre entier. Tout en poursuivant peintures, dessins, collages, assemblages, où la plasticité des couleurs et des formes émancipe le geste de la représentation, Claude Simon cherchera pendant vingt ans la forme narrative capable de raconter le désastre – la fin d’un monde. La Route des Flandres, son premier chef-d’œuvre, paraîtra en 1960 seulement. Jusqu'au 7 Janvier 2024, on peut voir au Musée La Piscine (Roubaix) l'exposition Claude Simon, sur la route des Flandres : peintre et écrivain. L'exposition ira ensuite à la Villa Marguerite Yourcenar (Saint Jans-Cappel) puis au Château Coquelle (Dunkerque).
Rappelons l'essai publié en 2021 par Mireille Calle-Gruber, qui constitua les prolégomènes de cette exposition : Claude Simon : être peintre (Hermann), dont on peut lire le compte rendu dans Acta Fabula : Claude Simon peintre, ou les épiphanies de « Raison émue » par Marion Coste.
(Illustr. : Autoportrait de Claude Simon)