"Et je suis ici, immobile, complice et lâche. J’ai honte, honte… Partir pour l’Aurès ! Écrire ? Mourir ? Tuer ? Aller au Caire ? Témoigner à Alger ? Agir à Paris ? Que l’Homme en moi se fasse pour ma Patrie algérienne ! […] Que faire ? Et comment donner aux Algériens arabes qui nous rejettent en bloc (dans 99 % des cas) la preuve que nous nous sentons Algériens, leurs égaux ? Seule la mort… – des sacrifices vrais peut-être… Écrire, mais quoi ? Je suis entre deux feux, deux vérités, l’une à dire, l’autre à taire. Et c’est bien la seule vérité qu’il faut." Sous le titre Un cri que le soleil dévore. 1942-1973. Carnets, notes et réflexions (Seuil), Guy Dugas, responsable des Archives Sénac, vient d'établir l’édition des carnets retrouvés de Jean Sénac, qui fourmillent de notations intimes et d’interrogations politiques, de poèmes et de réflexions sur la création artistique et sur la société, sur l’amour, l’homosexualité et l’amitié, donne du poète assassiné en 1973 une image bouleversante qui le rapproche de ses frères en poésie : Constantin Cavafis, Pier Paolo Pasolini, Federico García Lorca, René Char… Saluons aussi la publication de la Suite oranaise dans la collection des "Petits Inédits maghrébins", et rappelons la réédition en 2022 du seul essai écrit par Sénac en 1957 Le soleil sous les armes, et un recueil de poésie et d’hommages au poète algérien paru en 1981, Jean Sénac vivant, avec une préface de Nathalie Quintane (éd. Terrasses) ; la parution en 2019 du volume de ses Œuvres poétiques (Actes Sud), ainsi que le dossier que lui a consacré la revue Europe en 2020.
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Publié le par Faculté des lettres - Université de Lausanne