Essai
Nouvelle parution
Philippe De Vita, French Cancan

Philippe De Vita, French Cancan

Publié le par Faculté des lettres - Université de Lausanne (Source : De Vita)

Le retour de Jean Renoir en France au milieu des années cinquante se veut une renaissance. Après l’exil américain et quinze ans d'absence des plateaux français depuis La Règle du jeu, le cinéaste tourne French Cancan et renoue ainsi, à l'aube de ses soixante-ans, avec le monde de son enfance : le Montmartre de la Belle Époque. Il dresse « un pont agréable entre [lui]-même et le public français » en célébrant des jalons de la culture nationale populaire : le cancan, le café-concert, la « joie de vivre ». Le film permet aussi les retrouvailles de Renoir et Gabin pour tenter de retrouver le succès de La Grande Illusion

French Cancan n’est pas pour autant seulement nostalgique. Certes, Renoir est en quête de beauté et de plaisir, notamment en filmant la danse et la chanson et en jouant sur les couleurs et les décors qui reconstituent le Paris 1900. Cependant, il souligne l’arrière-plan du spectacle : un personnage de commanditaire finance le Moulin Rouge pour vendre l’illusion de « la grande vie à la portée des petites bourses ». On remarque aussi, sous l’harmonie apparente, la persistance des différences sociales : Nini, la blanchisseuse promue reine du cancan, n’est-elle pas condamnée à finir comme la vieille Prunelle, ancienne danseuse réduite à mendier ? Renoir cherche donc aussi à donner une image teintée de noirceur de la société de la fin du XIXe siècle, dans laquelle la culture s’industrialise progressivement. 

L’ouvrage propose d’étudier en particulier la mise en scène du film. Si la caméra reste souvent statique, c’est pour mieux saisir la profusion de mouvements des acteurs et offrir des cadrages influencés par la peinture.