Édition
Nouvelle parution
Colm Tóibín, Le magicien

Colm Tóibín, Le magicien

Publié le par Faculté des lettres Université de Lausanne

Traduit de l'anglais (Irlande) par Anna Gibson

Personne n’aurait pu prédire un avenir aussi extraordinaire à ce garçon né dans une famille provinciale, bourgeoise et aisée du nord de l’Allemagne. Mais le jeune homme s’appelle Thomas Mann, et il se forgera un destin hors du commun. Une œuvre littéraire couronnée par le prix Nobel, une vie familiale mouvementée et souvent dramatique, et la traversée de toutes les tragédies politiques de la première moitié du siècle – voilà comment on pourrait résumer la vie du grand écrivain. Colm Tóibín a choisi de nous la raconter de l’intérieur et dans toute sa dimension romanesque.

Cette existence est peuplée d’autres figures inoubliables. Au tout premier plan, son épouse, la fascinante Katia Pringsheim. Avec et grâce à elle, Thomas Mann construit patiemment une œuvre protéiforme en même temps qu’une apparence de vie confortable qui le protège de ses démons  : son attirance pour les hommes. Pour ses six enfants nés entre un voyage à Venise et un séjour au sanatorium – qui seront transposés dans La Mort à Venise et La Montagne magique – il restera à jamais ce chef distant d’une famille où l’on ne sait pas très bien comment s’aimer. Son frère Heinrich, ses enfants Klaus et Erika Mann, Christopher Isherwood, Bruno Walter, Alma Mahler et Franklin Delano Roosevelt – tous joueront un rôle dans la mue du grand bourgeois conservateur en intellectuel engagé face à la montée du nazisme, ou croiseront sa route dans l’épreuve de l’exil.

Mais Colm Tóibín évoque avec autant de puissance les élans intimes et douloureux d’un homme secret en quête d’un bonheur impossible. Tous ces fils littéraires, sentimentaux, historiques et politiques s’entretissent dans une fresque qui se confond avec l’émouvant roman d’une vie  : celle d’un génie littéraire et d’un homme seul qu’on appelait Le Magicien.

Lire un extrait…

On peut lire sur larepubliquedeslivres.com un billet de Pierre Assouline sur cet ouvrage :

"Thomas Mann écartelé entre l’intime et l’épopée"… (mis en ligne le 21 oct. 2022)

"Cela parait à peine croyable mais il n’existe pas de biographie en français de Thomas Mann (1875-1955), malgré le statut de l’écrivain et le rayonnement de son œuvre, alors qu’on ne compte plus celles consacrées à des seconds couteaux, des demi-soldes et des personnages du second rayon du XXème siècle littéraire. On trouve en traduction des essais sur son oeuvre ou des enquêtes sur l’ensemble de la famille Mann mais pas de biographie alors qu’elles ne manquent pas en allemand (en 1996, il en parut trois dans la même semaine). Serait-ce que les Français le considèrent comme trop daté ? Qu’ils tiennent ses romans pour trop sérieux, trop pesants ? A moins qu’ils ne le considèrent pas, tout simplement, son Nobel remontant tout de même à 1929. Gardons-nous d’en tirer des conclusions trop définitives. Il suffit de se souvenir qu’il y a une dizaine d’années d’encore, on trouvait difficilement des rééditions de Bernanos en librairie. Vaste et peuplé est notre purgatoire.

Avec le Magicien (The Magician, traduit de l’anglais (Irlande) par Anna Gibson, 608 pages, 26 euros, Grasset), livre hybride à mi-chemin entre le roman et la biographie, Colm Toibin (1955) lui rend justice. Du moins comble-t-il une lacune. Ce n’est pas la première fois qu’il se livre à genre d’exercice. Il y a une quinzaine d’années déjà, l’Irlandais, qui enseigne le Ulysses de Joyce à Columbia University (NY), avait essuyé les plâtres de ce genre hybride à mi-chemin entre roman et biographie en revisitant la vie et l’œuvre de Henry James à travers le prisme de six années considérées comme une période-clé […]." Lire la suite…