Une idée tenace, qui remonte au moins à Stendhal, voudrait qu'en matière de littérature et de style, les conservateurs révolutionnent et les révolutionnaires conservent : les amis du peuple parlent le français de Richelieu, les amis de l’ordre jargonnent comme des Apaches. Houellebecq croit ainsi jouer sur du velours en faisant dire à l’un de ses personnages que tous les grands stylistes sont des réactionnaires. La droite ferait passer le style avant toute chose : à preuve, Céline, dont il serait dès lors possible d’ignorer les idées antisémites et exterminatrices, ou du moins de les dissocier radicalement du style constitutif de sa grandeur… Dans un essai qui paraît aux éditions Amsterdam sous le titre Le Style réactionnaire, de Maurras à Houellebecq, Vincent Berthelier vient opportunément montrer que ce discours remplit historiquement une fonction politique. Il se solidifie après-guerre, chez des Hussards soucieux de minimiser l’engagement vichyste ou hitlérien de la droite littéraire et de réhabiliter leurs aînés en les présentant comme des stylistes. En étudiant un large corpus d’auteurs de droite et d’extrême droite, l'essai voudrait repenser les rapports entre style, langue et politique. Il s’intéresse d’abord à la conception du style et de la langue défendue par certains écrivains, sous l'éclairage des enjeux idéologiques du moment : dans l’entre-deux-guerres (Maurras, les puristes, Bernanos, Jouhandeau), dans la période de l’essor du fascisme et de la Libération (Aymé, Morand, Chardonne), enfin des années 1970 jusqu'à nos jours, dans la période où s’élabore sous nos yeux une nouvelle pensée réactionnaire (Cioran, Millet, Renaud Camus, Houellebecq).
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Publié le par Marc Escola