L’essai de Valérie Gérard fait suite au précédent livre que les éditions MF ont publié d’elle, Par affinités. Amitié politique et coexistence. Il en reprend les enjeux à partir d’une perspective tout autre, celle des romans et des essais de Virginia Woolf. Le problème s’y trouve déplacé. Il y est moins question des affinités que des formes possibles de la coexistence dans un monde pris entre les deux chaos que produisent la division (qui mène à la guerre) et l’ordre impérial (qui assujettit et dévitalise).
Comment faire vivre ensemble des personnes appartenant à des groupes que tout oppose, qui sont précisément sans affinités? Comment harmoniser des perspectives plurielles et presque inconciliables ? Ces questions éminemment politiques sont aussi des questions littéraires, celles que Virginia pose au roman. Son art politique est d’abord un art de l’écriture, qui consiste à composer ensemble des formes de vie hétérogènes ou les différents états ou personnalités d’une même conscience. Valérie Gérard montre très bien l’entremêlement de ces deux niveaux ou problématiques : à la suite de Virginia Woolf, elle restitue au roman, à sa forme comme au jeu de ses personnages, sa puissance politique.
Art de la composition des perspectives, il est aussi l’exploration, qu’il faut à chaque fois reprendre, des formes possibles, toujours fragiles et provisoires, de leur coexistence harmonieuse.
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