Atelier

THEORIE LITTERAIRE ET/OU LITTERATURE ANTIQUE

En matière de poétique et de théorie littéraire, le “de” l'emporte souvent sur le “et”. S'il n'est guère étonnant de voir un critique s'intéresser, par exemple, à la poétique de Racine ou de Claudel, proposer une étude narratologique de Nabokov, une interprétation psychanalytique de Proust ou encore une lecture anthropologique du roman médiéval, il est plus rare, cependant, de rencontrer, distribués autour d'une conjonction de coordination, une théorie et un corpus, une méthode critique et un moment particulier de l'histoire littéraire. C'est pourtant cette rencontre inédite et pour le moins asymétrique qu'annoncent, problématisent ou prônent, un ensemble d'études, parues dans les quarante dernières années, dont le but avoué est de confronter d'une part la théorie littéraire contemporaine et d'autre part la littérature antique, gréco-latine. Ainsi à un article de C. Segal intitulé, dès 1968, "Ancient texts and Modern Literary Criticism" fait écho, en 1977, le titre d'un numéro spécial de la revue Arethusa , Classical Literature and Contemporary Literary Theory, ou celui de deux volumes récemment publiés : d'une part, en 1994, par I. de Jong et J. P. Sullivan, Modern Critical Theory and Classical Literature d'autre part, en 2002, par Thomas A. Schmitz, Moderne Literaturtheorie und antike Texte.A ces titres s'ajoutent, dans d'autres volumes, des remarques introductives qui justifient ou signalent l'utilisation de telle ou telle théorie ou méthode critique pour étudier le corpus ancien comme si le fait n'allait jamais de soit, ou encore des articles polémiques qui attaquent l'opportunité de cette rencontre. Ces différents discours frappent d'abord par l'écrasement de perspectives qu'ils supposent puisque la littérature antique et la théorie littéraire sont réduites à deux blocs homogènes : d'un côté la théorie littéraire, de la narratologie à l'herméneutique, en passant par les approches psychanalytiques ou marxistes, de l'autre, les études classiques et leur corpus, d'Homère à l'antiquité tardive. Surtout, ils interrogent moins la validité intrinsèque de la théorie contemporaine que sa compatibilité avec l'objet et la méthode des études classiques. Il est ainsi posé une hétérogénéité entre les deux termes dont la réunion même est objet de réflexion, dont la compatibilité, sans cesse démontrée, semble moins un donné qu'une conquête. La persistance même de ces discours sur le “et” étonne: que révèle l'affirmation durable de cette tension, quel est donc le conflit latent qu'on s'épuise à éteindre?

Nous proposons ici :

Pour une mise en perspective de la question:

  • Séminaire "Anachronies - textes anciens et théories modernes".


Sophie Rabau

Sommaire | Nouveautés | Index | Plan général | En chantier

Dernière mise à jour de cette page le 22 Mars 2012 à 13h19.