Questions de société

"Valérie Pécresse et les chiffres." (dossier Poolp 18/10/09)

Publié le par Bérenger Boulay

Dépêches en ligne:

L'Unef rappelle Valérie Pécresse à l'ordre, (Clicanoo.com - 17 octobre 2009)

Le budget 2010 des universités remis en question (actualitte.com - 17 octobre 2009)

Budget 2010 pour les universités : les interrogations de la CPU (Educpros 16-10-09)


Sur le site du collectif Poolp:

Valérie Pécresse et les chiffres...

Crédits/étudiant : "Valérie Pécresse gonfle ses résultats" (12/10/09). Article publié sur le site du Syndicat National des chercheurs scientifiques (SNCS) complétant un article de Valérie Soulé paru sur le site de Libération.

L'articlede Libération ci-dessous, paru dans la rubrique "Intox", est relatif àla faramineuse croissance des "crédits par étudiant" annoncée parValérie Pécresse. Il montre que celle-ci manipule les chiffres toujoursavec la même technique. Il y a, en effet, trois explications àl'augmentation spectaculaire, mais probablement surévaluée, pourparvenir à l'augmentation depuis 2007 que la ministre claironne.
Surtrois ans, la baisse du nombre d'étudiants est de l'ordre de 10 %, cequi mécaniquement (mais non malhonnêtement) accroît de 10 % lesdépenses par étudiant à budget constant.
Sur le budget le ministèredécompte une part (50 % ? On ne sait) de l'augmentation de la massesalariale, ce qui est normal, mais en comptant probablement aussi celledes retraites (50 à 150 millions par an suivant les années), alors quece n'est qu'un jeu d'écriture et certainement pas des opérationsnouvelles pour les étudiants. 
Enfin, comme toujours, le ministèredécompte sans doute les Partenariats public-privé (PPP), qui sont desemprunts qu'il faudra rembourser sur le budget et non des ressources.Par contre, il est peu probable qu'elle ait, du moins dans ce cas,compté les dotations en capital du plan campus.
Quant à "la Vieétudiante", dans le budget 2010 lui même, il y a 33 millions de plus[*] pour près de 1,3 millions d'étudiants, soit 2 € /mois /étudiant !Deux tickets de métro ou 7 cigarettes/mois (à cette dose, ce n'est pasmortel). Mais attention, suite à un sondage sur les régionales et le"mauvais" vote des étudiants, Sarkozy a répondu, en même temps quel'annonce du budget, à une vieille demande de l'UNEF sur un 10ème moisde bourse, encore non budgétisé, mais dans des conditions de mise enoeuvre qui sont discutables. Voir : http://www.unef.fr/delia-CMS/une/article_id-2829/topic_id-160/l-unef-obtient-la-mise-en-place-du-10eme-mois-de-bourse.html

Valérie Pécresse gonfle ses résultats par Véronique SOULÉ
« Quandje suis arrivée en 2007, l'Etat payait 7 200 euros par étudiant et paran. C'était unique, une honte française. Aujourd'hui, on est à 9 200euros par étudiant et par an. On a augmenté de 1 900 euros (sic) entrois rentrées. » Valérie Pécresse ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche le 23 septembre sur Public Sénat.
INTOXEn cette rentrée morose, la plupart des ministres se font plutôtdiscrets sur leur budget. Sauf Valérie Pécresse qui, enchaînant téléset radios, multiplie les déclarations spectaculaires sur les recordsatteints par son ministère, priorité des priorités, selon elle, depuisqu'elle a été nommée par Nicolas Sarkozy. Jamais ainsi les universitésn'auraient connu une telle hausse de leurs crédits. Le 23 septembre, laministre claironnait sur Public Sénat : « Quand jesuis arrivée en 2007, l'Etat payait 7 200 euros par étudiant et par an.C'était unique, une honte française. Aujourd'hui, on est à 9 200 eurospar étudiant et par an. On a augmenté de 1 900 euros en troisrentrées. » Une image qui frappe les esprits. Mais le PS lance aussitôt la polémique. « Faux, la ministre ment, réplique le secrétaire national à l'enseignement supérieur Bertrand Monthubert, sion prend les dépenses consacrées à la recherche et à l'enseignementsupérieur, il est impossible d'aboutir à une telle hausse. Ou alors sic'est vrai, que la ministre le prouve. » Qui faut-il croire alors ?
DESINTOXD'abord Pécresse s'emmêle dans ses propres chiffres. Pour l'année 2007,si l'on prend le dossier de presse présentant le budget 2010, ladépense par étudiant était de 7 801 euros, et non de 7 200 euros -Pécresse semble avoir pris ici le chiffre de 2006. Elle se trompe aussisur la dépense par étudiant en 2010 - de 9 511 euros et non de 9 200euros. On arrive ainsi à une hausse de 1 710 euros - ce qui est déjàbeaucoup - et non de 1 900 euros en quatre ans. Autre problème, leschiffres ministériels sont eux-mêmes fluctuants : dans le dossier depresse du budget 2009, la dépense par étudiant en 2007 est de 7 540euros. Et on la retrouve à 7 801 euros dans le dossier de 2010. Auministère, on explique qu'il y a eu entre-temps les crédits du plan derelance. Mais pas en 2007.

Plus grave, le ministère se contredit lui-même. Dans« L'état de l'enseignement supérieur et de la recherche », ouvragestatistique publié par ses soins en décembre 2008, la dépense parétudiant en 2007 est estimée à 10 150 euros, très loin des 7 801annoncés aujourd'hui. Renseignements pris, il ne faut pas prendre cechiffre qui est une moyenne de dépense des étudiants en facs, en IUT,en prépas, mais le chiffre concernant les étudiants d'université. Et iltombe à 8 970 euros, encore bien supérieur aux 7 801 euros. « La différence s'explique très simplement, répond-on au ministère, dansl'ouvrage, on prend en compte toutes les dépenses, y compris celles descollectivités locales, des entreprises, des chambres de commerce etd'industrie, et les droits d'inscription. Alors que dans notre dossier,nous ne prenons que les dépenses de l'Etat. » Mais pourquoichanger de mode de calcul sans prévenir, au risque de perdre tout lemonde et de nourrir les soupçons sur une manipulation des statistiques ?

Bertrand Monthubert a tenté de faire ses calculs, avecles données budgétaires. En vain. Dans son fameux tableau de rentrée,le ministère précise que la dépense par étudiant augmentera de 379euros entre 2009 et 2010. Si on multiplie cette somme par les effectifsétudiants en 2009 - 1 252 000 -, on arrive à 474 millions d'euros. Maisoù sont-ils ? Dans la dépense profitant aux étudiants, on compte lescrédits allant à la Vie étudiante (en hausse de 33 millions d'euros enraison d'efforts pour le logement, de la hausse des bourses, etc.), auPlan « Réussir en licence » (en hausse de 66,5 millions), ainsi que lessalaires des enseignants, les crédits de fonctionnement, etc. Mais làil est pratiquement impossible de s'y retrouver dans le dédale desintitulés, des sous-chapitres. D'après Monthubert, pour arriver à unetelle hausse, le ministère compterait, à tort, les « dotations en capital » qui vont servir à payer un loyer aux firmes privées qui vont construire des campus. Faux, réplique le ministère.
« Tout ça est un grand bazar, conclut Monthubert, orlorsqu'on avance de tels résultats, il faut dire comment on les aobtenus. Or personne n'a les moyens de le vérifier, car le gouvernementpublie de moins en moins d'études statistiques. Et cela pose problèmeen démocratie. » Il réclame une mission parlementaire pour étudierl'évolution de la dépense par étudiant et une analyse plus indépendantede ces statistiques.