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Représentation des violences sexuelles, de la presse à la littérature du second XIXe siècle (Paris 3)

Représentation des violences sexuelles, de la presse à la littérature du second XIXe siècle (Paris 3)

Publié le par Marc Escola (Source : Paris 3)

Séminaire des doctorants du CRP19-Séance 3

Mercredi 15 janvier 2020 (17h30-19h30-Salle Claude Simon)

Du fait du nombre de places limitées, la réservation est obligatoire auprès de camillestidler@yahoo.fr ou blandine.lefevre@sorbonne-nouvelle.fr

"Représentation des violences sexuelles, de la presse à la littérature du second XIXe siècle"

Dans le cadre du thème choisi cette année par les doctorants du CRP 19 pour présenter leurs travaux, « Envers littéraires : motifs et structures », cette séance cherchera à mettre en lumière les différentes facettes d’un même sujet, les violences sexuelles, lorsqu’elles sont abordées dans le journal, sous forme de texte ou d’illustration, et dans le roman. Quels points de passage stylistiques et thématiques mettent en évidence cette contiguïté entre « presse et plume », et que révèlent ces proximités au sujet du regard que porte le second XIXe siècle sur le viol et les violences sexuelles ? 

À l’issue des trois communications, nous aurons le plaisir de recevoir Anne-Claude Ambroise Rendu, professeure d’Histoire contemporaine à l’Université de Versailles Saint-Quentin en Yvelines, spécialiste des crimes et délits au XIXe siècle et de leur traitement dans le journal ; ainsi que Marion Glaumaud-Carbonnier, autrice d’une thèse sur la question du divorce au XIXe siècle. Elles échangeront autour du sujet : "Complicité et empathie dans le traitement des violences sexuelles, entre presse et littérature au cours du second XIXe siècle".

Programme : 

  • Lucie Nizard (Doctorante à l’université Paris 3-Sorbonne Nouvelle)

Représentations des violences sexuelles dans le roman du second XIXe siècle : réfuter le sensationnalisme de la presse et s’en emparer. 

Les romanciers naturalistes thématisent le traitement des violences sexuelles par la presse, notamment à travers le genre nouveau et en pleine expansion du fait divers, dont ils consignent l’apparition et les effets tout en le désignant comme un repoussoir, au nom de la moralité et du style. Pourtant, le roman naturaliste est obsédé par le viol, et le traite souvent avec les mêmes armes que la presse, entre pathos, scandale et érotisation latente. Mais la polyphonie romanesque permet de mettre à distance le discours médiatique et ses facilités, et les changements de focalisation romanesque permettent une approche plus complexe des violences sexuelles que celle du journal. Seul le viol pédophile, qui suscite à la fin du siècle une condamnation unanime, semble traité avec une même rhétorique de l'indignation dans la presse et dans la littérature. 

 

  • Blandine Lefèvre (Doctorante à l’université Paris 3-Sorbonne Nouvelle)

Rire du viol ? Les représentations des violences sexuelles dans les nouvelles à la main des journaux fin-de-siècle, envers et continuité du fait divers.

La nouvelle à la main, micro-genre qui se présente sous la forme d’un petit dialogue fictif assorti d’une pointe comique, est très présente dans les quotidiens de la fin du XIXe siècle. Contrairement à sa voisine sur la page du journal, la rubrique des faits divers, elle a peu attiré l’attention des critiques, à l'exception de Marie-Ève Thérenty, qui la désigne comme "le double parodique et caricatural des mutations générales des écritures de presse" (La Civilisation du journal). Il s’agira donc d’étudier la mécanique du comique dans les nouvelles à la main qui parlent du viol et de comprendre leur paradoxale proximité avec les rubriques sérieuses du journal. En caricaturant les topoï stylistiques et les figures de victimes qui peuplent les faits divers et comptes rendus de procès, la nouvelle à la main témoigne en effet d’un système de représentation global : le goût pour l’anecdote piquante et misogyne y surpasse la représentation pathétique de la femme violée, jusqu'à remettre en cause son statut de victime. 

  • Mathilde Leïchlé (Doctorante à l’École Pratique des Hautes Études)

Canards sanglants et gauloiseries : mises en scène du viol dans la presse illustrée du second XIXesiècle

Si l’illustration de l’actualité se développe dans la presse dès la fin du XVIIIe siècle, ces images connaissent un essor sans précédent du milieu du XIXe siècle à la Première Guerre Mondiale. Alors que la photographie commence à se diffuser, l’illustration par le dessin et la gravure est encore souvent privilégiée. Cette médiation permet d’interpréter et d’orienter les images présentées, de les rendre plus spectaculaires. Nous verrons quelles formes prennent les mises en scène des violences sexuelles dans le cas des grandes affaires telles que celle concernant Joseph Vacher, « le Jack l’Eventreur du Sud-Est », transformant le criminel en célébrité. Il sera ensuite question des faits divers quotidiens, notamment ceux présentés et illustrés dans L’œil de la police, à destination d’un public en quête d’une délectation dans l’horreur. Enfin, nous nous demanderons comment cette actualité est reprise dans la presse humoristique et grivoise et comment les violences sexuelles deviennent ainsi un ressort comique.