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Le doux aux XVIe et XVIIe siècles

Le doux aux XVIe et XVIIe siècles

Publié le par Jean-Louis Jeannelle (Source : Pierre Servet)

LE DOUX AUX XVIe ET XVIIe SIECLES
ECRITURE, ESTHETIQUE, POLITIQUE, SPIRITUALITE


Université Jean Moulin-Lyon 3 / Ecole doctorale Lettres / Groupe GADGES
28-29 mars 2003 Amphithéâtre Huvelin


Organisé par le G.A.D.G.E.S., Groupe dAnalyse de la Dynamique des Genres et des Styles (1520-1720), dirigé par le professeur Jean-Pierre Landry. Responsables scientifiques : Marie-Hélène Prat et Pierre Servet. Contact : prat@univ-lyon3.fr / servet@univ-lyon3.fr



ARGUMENTAIRE

La lecture des textes théoriques (préfaces, épîtres, arts poétiques) de la seconde moitié du XVIe siècle et du début du XVIIe siècle laisse apparaître lémergence dune nouvelle caractérisation de lécriture littéraire : à travers les termes de doux, douceur, doucement, et en dialogue avec des synonymes ou des antonymes, cest une catégorie esthétique originale qui semble se mettre en place dans une période de renouvellement des classifications littéraires et artistiques.

Cette catégorie du « doux » sinscrit à la fois en opposition et en relation avec les grands types décriture définis dans les rhétoriques dinspiration antique. Impliquée par la suavitas, elle semble donner lieu, dans la période considérée, à une réflexion plus spécifiquement rhétorique et stylistique dont attestent les grands textes théoriques, en particulier les arts poétiques (de Ronsard à Pierre de Dimier). On assiste donc à lavènement dune notion issue de la tripartition des styles selon la roue de Virgile (stylus humilis, mediocris, sublimis) et pourtant en décalage avec celle-ci. La question se pose alors de la relation avec dautres modes décriture dont le XVIIe siècle va faire la théorie, notamment le sublime du pseudo-Longin dont linfluence est grandissante au cours de la période considérée. Les textes eux-mêmes apportent une importante contribution sous forme de réflexion métapoétique : ainsi Ronsard fait du doux un élément essentiel dans lopposition entre ses premiers Amours et la veine de la Continuation, tant au plan de la thématique quau plan de lécriture. Parallèlement, lémergence de notions apparentées dans dautres domaines de la pensée et de la création artistique amène à sinterroger sur les connexions qui existent entre les différents domaines. Cette nouvelle catégorie esthétique pourrait bien aussi être une catégorie morale, philosophique, voire spirituelle : cest la sprezzatura en peinture ; ce sont les théories sociales (mais sont-elles seulement « sociales » ?) du Cortegiano de Castiglione, du De amore dEquicola traduit à la fin du siècle par Gabriel Chappuys, et, bien sûr, celles de « lhonnête homme », en germe chez Montaigne ; cest aussi la dimension spirituelle que prend une douceur déjà revendiquée par les évangélistes, et dont il faudrait examiner lexploitation dans le cadre des conflits religieux de la fin du XVIe siècle, puis de la Contre-Réforme ; lavènement de la douceur salésienne traduit en revanche une réorientation dune notion dont les implications et les présupposés idéologiques restent à définir.
Si la douceur paraît prendre une extension remarquable dans toutes les créations de lesprit, cest sans doute en poésie quil faut chercher ses premières manifestations. Mais là encore, le XVIIe siècle voit sétendre son influence dans des domaines et des genres où on lattendait moins : la grande tragédie, le genre plus familier de la fable peut-être en relation avec le développement des théories de la conversation , la rhétorique de la persuasion, y compris dans le domaine en apparence plus austère du discours religieux, etc. Dans ce cadre, elle donne lieu aux XVIe et XVIIe siècles à des réflexions et à des variations qui mettent en cause, au delà des « genres décrire », toute une esthétique et une représentation du monde.




PROBLEMATIQUES

De nombreuses pistes soffrent à lexploration des communicants :
- origines de la notion dans les rhétoriques antiques (la suavitas, le doux et lutile chez Horace) ; transmission et résurgences au XVIe siècle ;
- polysémie des termes doux et de douceur dans le discours et le métadiscours rhétorique aux XVIe et XVIIe siècles ; analyse des relations avec déventuels synonymes ; rapports avec la théorie des styles ;
- la douceur dans lécriture, ses valeurs, ses contraires ; opposants et thuriféraires ; pour quels enjeux ?
- y a-t-il des genres de la douceur (poésie amoureuse, élégie, pastorale) ? douceur et description, douceur et dialogue, douceur et persuasion, didactique de la douceur ? Y a-t-il au contraire des genres qui récusent la douceur (théâtre, essai ?), au nom de quel style, de quelle écriture ?
- rapports de lécriture du doux avec les grands courants esthétiques, philosophiques, spirituels (néoplatonisme, évangélisme) ?
- le doux dans la peinture, la musique ; quels autres arts, selon quelles prédilections ?
- lévolution de la notion dans sa relation avec les genres ; pertinence de la périodisation ; sens des mutations.
Connexion éventuelle entre les thèmes moraux de la douceur et le style doux ?



PROGRAMME

Vendredi 28 mars 2003 (9 h.30-12 h.30)

Mireille HUCHON (Paris IV-Sorbonne), « Le doux dans les rhétoriques et les poétiques du XVIe siècle ».
Jean LECOINTE (Poitiers), « Douceur et harmonie cosmique dans la spéculation néo-platonicienne au début du XVIe siècle ».
Christine DE BUZON (E.N.S. Lyon), "La douceur dans la fiction française autour de 1550".
André GENDRE (Neuchâtel) « L'essence qualitative du "doux" chez Ronsard, Du Bellay et Baïf ».
Marie-Hélène PRAT (Lyon 3), « Violences de la douceur chez dAubigné : sensualité et spiritualité de lécriture ».

Vendredi 28 mars 2003 (16 h.-18 h.30)

Luigia ZILLI (Padoue), « Les vers emmielez de Mellin de Saint-Gelais ».
Pierre SERVET (Lyon 3), « Douceurs de Montaigne ».
Jean-Pierre LANDRY (Lyon 3), « Pascal et le doux : une rêverie herméneutique sur les Pensées ».
Pierre GIULIANI (Université catholique de Lyon), « Esther et la douceur ».

Samedi 29 mars 2003 (9 h.15-12 h.15)

Marine RICORD (Amiens), « "O douce volupté..." : les douceurs de la sagesse dans Les Amours de Psyché et de Cupidon de La Fontaine ».
Sabine GRUFFAT (Lyon 3), « La parole fabuleuse de La Fontaine : un art de l'euphémisation? ».
Eric MECHOULAN (Montréal), « La douceur du politique ».
Olivier LEPLATRE (Lyon 3), « Pouvoirs de la douceur dans Les Aventures de Télémaque de Fénelon ».
Delphine DENIS (Paris IV-Sorbonne), « Le « doux » : une catégorie critique au XVIIe siècle ».