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Le déclin dans le monde germanique. Mots, discours et représentations (de 1914 à nos jours)

Le déclin dans le monde germanique. Mots, discours et représentations (de 1914 à nos jours)

Publié le par Université de Lausanne (Source : Landry Charrier)

Dans le cadre du programme de recherche « Wende & Wandel. Dire et penser le changement dans le monde germanique », différentes modalités du changement sont envisagées. Une première série de travaux explore le concept de Stunde Null, utilisé pour désigner des césures majeures de l’histoire contemporaine de l’Allemagne et de l’Autriche[1]. Une seconde série étudie les processus d’innovation et de renouvellement qui traversent l’histoire littéraire et artistique des pays germaniques à partir des mots et des concepts que la nouveauté suscite (« Innovation », « Revolution », « Traditionsbruch », « Avant-Garde », …)[2]. La troisième propose d’interroger les mots, les discours et les représentations du déclin dans les pays de langue allemande, une notion dont la déclinaison permet, là encore, une large ouverture interdisciplinaire.

Depuis la fin du XVIIIème siècle, et de façon beaucoup plus marquée, la Première guerre mondiale, deux pôles structurent la pensée de l’évolution et du changement de nos sociétés occidentales : d’un côté, le modernisme, le progrès, la croissance ; de l’autre, le déclin, la décadence.[3] Objet privilégié des philosophies de l’histoire – de Johann Gottfried von Herder à Oswald Spengler, en passant par Jacob Burckhardt –, la notion de déclin a également constitué la matière d’une multitude d’œuvres littéraires, notamment chez ceux qui ont vécu la lente agonie de l’Empire austro-hongrois (Robert Musil, Joseph Roth, Franz Werfel, …). Mais, elle a connu de nombreuses autres applications : dans le champ intellectuel par exemple, ainsi qu’en atteste le discours de celles et ceux qui, de 1914 à nos jours, ont pensé l’avenir de l’Europe, son unification et sa possible désintégration ; en politique ensuite, comme l’illustrent les arguments souvent mis en avant par les partis extrémistes (AfD, FPÖ, UDC) pour décrire l’évolution des grands partis de gouvernement (social-démocratie et droite modérée) et ce faisant, légitimer leurs revendications. De façon parfois plus diffuse, elle a aussi servi de socle à la description et la représentation des mutations urbaines ou démographiques qui affectent les pays de langue allemande depuis quelques décennies. Sur le plan économique, enfin, le déclin a souvent été utilisé comme une arme pour stigmatiser l’immobilisme et appeler à des réformes économiques de fond : l’ouvrage que Gabor Steingart, ancien rédacteur en chef de la Handelsblatt, a publié en 2005 (Deutschland : der Abstieg eines Superstars) en est un exemple parmi d’autres.

Axées sur la période contemporaine et les pays de langue allemande, les propositions d’articles pourront s’inscrire dans les questionnements suivants :

 

  • Abstieg, Niedergang, Untergang, Verfall, Schrumpfung, Zerfall… Quels mots sont utilisés pour décrire et penser le déclin dans les pays de langue allemande ?

La palette de nuances entre les différents termes utilisés pour penser le déclin invite tout d’abord à un questionnement sémantique. A quel objet l’idée de déclin s’applique-t-elle de façon privilégiée ? Peut-on identifier des effets de filiations et de ruptures sémantiques et conceptuelles ? Ce volet se proposera également d’interroger les parallèles ou les différences entre périodes historiques, entre champs de production des discours et représentations du déclin.

 

  • Que révèlent les discours et les représentations du déclin sur le rapport des sociétés au changement ?

Dans quels contextes historiques, politiques et épistémologiques les mots, les discours et représentations du déclin ont-ils émergé et évolué ? Quels en sont les vecteurs ? les agents ? Les discours du déclin se réfèrent-ils à des processus concrets et mesurables (déficits naturels et migratoires, perte de vitesse économique, menaces extérieures…), à une supposée crise morale et spirituelle (sentiment du déclin) ? Que révèlent leur émergence, leur diffusion et leur réception sur les sociétés ou les groupes concernés ? Ne peut-on identifier des stéréotypes, des réemplois allégoriques ou thématiques ?

 

  • Que légitime le discours du déclin ?

A quoi sert la production de discours sur le déclin ? Comment l’idée de déclin est-elle utilisée, instrumentalisée pour légitimer des transformations, des réformes, des ruptures ? Dans quelle mesure constitue-t-elle un point de départ pour l’élaboration de solutions innovantes ? radicales ? Implique-t-il en contrepoint une régénération, une renaissance ? Si oui, selon quelles logiques ? Quelles temporalités ? 

 

Modalités de soumission

Les propositions de contributions (1000 signes, espaces compris), assorties d’une brève notice bio-bibliographique, sont à adresser conjointement à Hélène ROTH (Helene.Roth@univ-bpclermont.fr) et Landry CHARRIER (landry.charrier@univ-bpclermont.fr), jusqu’au 30 octobre 2016. Après notification d’acceptation, les articles (30 000 signes, espaces compris) devront être livrés au plus tard le 30 mars 2017.

Les langues de travail sont le français, l’anglais et l’allemand.

L’ouvrage sera publié aux Presses universitaires de Reims fin 2017-début 2018.

 

Hélène Roth est maître de conférences en géographie à l’université Blaise Pascal de Clermont-Ferrand. Elle est rattachée au Centre d’études et de recherches appliquées au Massif central, aux moyennes montagnes et aux espaces fragiles (CERAMAC, EA 997).

 

Landry Charrier est maître de conférences habilité en civilisation des pays germaniques à l’université Blaise Pascal de Clermont-Ferrand. Il est rattaché au Centre d’Histoire « Espaces et cultures » (CHEC, EA 1001).

 

 

 

 

[1] Journée d’études Stunde Null, heure zéro. Entre mythes et réalité, Maison des Sciences de l’Homme de Clermont-Ferrand, 2 octobre 2015.

[2] Journée d’études Innovation-Revolution : discours sur la nouveauté littéraire et artistique dans les pays germaniques, Maison des Sciences de l’Homme de Clermont-Ferrand, 16 juin 2016.

[3] Sur le sujet, nous nous permettrons de renvoyer à l’étude toujours très utile de Julien Freund : La décadence. Histoire sociologique et philosophique d’une catégorie de l’expérience humaine, Paris : Sirey, 1984.