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La ballade des héros du temps jadis

La ballade des héros du temps jadis

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Inventée au Moyen Âge, la légende du roi Arthur a longtemps été l'apanage des nobles et des souverains qui s'en servaient comme modèle ou comme justification de leurs conquêtes. En grande partie ignorée aux XVIIe et XVIIIe s., elle fait un retour fracassant sur le devant de la scène en Angleterre au début de la révolution industrielle. Mais c'est surtout grâce à la culture populaire américaine que se diffuse le mythe de la Table ronde : cinéma, romans illustrés, musiques rock et folk, bande dessinée, et plus récemment jeux de rôles et jeux vidéo. Ces médias donnent un sens nouveau à la geste arthurienne : Arthur anticolonialistes, Lancelot en lutte contre le communisme, Merlin écologistes, Morgane féministes… W. Blanc décrypte la légende de Camelot dans Le roi Arthur, un mythe contemporain, sous titré "De Chrétien de Troyes à Kaamelott en passant par les Monty Python" (Libertalia).
Alors que s'annonce le colloque annuel de "Modernités médiévales" (à Lille III, 26-27 janvier : "Combattre (comme) au Moyen Âge"), J.-C. Mühlethaler retrace de son côté la geste paradoxale d'Énée le mal aimé (Les Belles Lettres) : traître en amour et traître à sa patrie qu’il a livrée aux Grecs, trop sérieux pour susciter l’empathie qui permettrait à des publics successifs de s’y reconnaître, Énée a longtemps été condamné. Quelles conditions historiques doivent donc être remplies pour qu’une revalorisation d’Énée devienne possible, que ses aventures reprennent sens ? Au prix de quelles distorsions l’acculturation de l’épopée antique se réalise-t- elle d’une génération de lecteurs à l’autre, en Europe et ailleurs ? Du roman médiéval à la bande dessinée en passant par le théâtre, l’opéra et la parodie désacralisante, chaque époque a choisi son Énée, qu’elle y trouve un modèle ou le voue aux gémonies. De Fulgence, commentateur de l’Énéide, à Christa Wolf, sa trajectoire n’a cessé de soulever des interrogations fondamentales.