
Séminaire délèves
Polysémies Questions didentité à la Renaissance
Ecole Normale Supérieure, 45 rue dUlm, 75005 Paris
Le lundi par quinzaines, 17h-19h
Vacances
Paige, mon amy, emplis icy et couronne le vin, je te pry.
Natura abhorret vacuum.
Diriez-vous quune mousche y eust beu ?
(F. Rabelais, Gargantua, " Les propos des bien yvres ")
" Vaguer " et " vaquer " au XVIe siècle, vagabonder, divaguer, extravaguer même parfois, est-ce partir en quête dune difficile plénitude ou plutôt sinterroger sur la raison dêtre de réalités inassignables, dinconsistances subites, de pensées minoritaires dans un ordre du monde et du langage mal préparé à les accueillir ? Loin dêtre inscrite dans lordre régulier des choses comme elle peut lêtre de nos jours, la " vacance " possède alors un caractère impromptu dans une nature qui, on le sait, " abhorre le vague " ou le vide ; et son contraire nest peut-être pas tant la plénitude quune forme de légitimité qui se cherche à travers les divagations du langage.
Car la " vacance " revêt dans le langage de lépoque les contours imprécis dune notion toujours prompte à susciter en son sein les réseaux connexes de l" inanité " déployée sous toutes ses formes, du vide ou du " vague ", de la vacuité et du vagabondage, et même de la vague, dont l" onde vagabonde " invite tour à tour à lexploration apeurée des abîmes et aux errances amoureuses. Plus encore, cette notion na peut-être dunité que celle que les écrivains lui accordent en jouant de cette polysémie, eux qui à force de jeux de mots et dapproximations inventent un langage dont les résonances se rencontrent, se heurtent et se précisent mutuellement.
Dire et penser le " vague " au XVIe siècle, cest donc peut-être aussi faire de lui un langage et inventer, non pas les mots pour dire une expérience du vide éventuellement vécue, mais plutôt le statut de réalités indécises, menaçantes ou insignifiantes, qui en se déployant entre le " tout " et le " rien " conjuguent le vide à lextravagance. Se demander " si le vague reçoit les formes vagabondes ", cest déjà faire de lépicurisme un langage pour une imagination en quête delle-même, et hésiter à propos du vide entre le platonisme, laristotélisme ou lépicurisme, cest répondre à un appel du vide dautant plus pressant quil engage lavenir de toute création esthétique. Que les états du corps et de lâme hésitent entre le néant et la divagation, et cest déjà une littérature nouvelle qui saffirme et revendique ses propres voies. Que la vacance du pouvoir simpose sans remède immédiat, et cest tout un ordre du monde et du langage quil faut reformuler en repensant lordre politique. Et mettre en scène la chute dun objet " par le vide " ou une île flottante vagabondant sur les vagues, cest explorer les frontières mal affermies dun monde plus instable quil ny paraît. Le " vague ", le vide et le vain, indissolublement apparentés dans les textes sinon dans létymologie, à travers lidée dune " vacance " polysémique, ne seraient-ils pas les indices dune quête rigoureuse de légitimité qui seffectue dans, et par le " vague " des mots et des choses ?
Programme du deuxième semestre
11 mars - salle Beckett :
Marie Gaille (Université de Paris X-Nanterre)
Le pouvoir comme lieu vide : Machiavel
et la mise en scène de la vacance du pouvoir
25 mars - salle Beckett :
Myriam Marrache (Université de Poitiers)
Texte copieux et ventres creux :
le souper des Lanternes de Rabelais
8 avril - salle Beckett
John Nassichuk
Communication
sur Louis des Masures (titre à préciser)
29 avril - salle des Actes
Emmanuelle Hénin
(titre à préciser)
6 / 13 mai - salle Beckett
Anne-Laure Metzger (Paris)
Conjurer le vide : le cas de La Nef des Fous de Sebastian Brant à Pierre Rivière (1494-1497)
27 mai - salle Cavaillès
Tristan Dagron
(titre à préciser)
10 juin : salle Beckett
Bénédicte Beaumin (Paris)
Vague sémantique et vagabondage stylistique chez Pétrarque : étude comparée du De Vita solitaria et du De Otio religioso
Renseignements :
Anne-Hélène Klinger
01-47-34-23-70 / aklinger@ens.fr
Anne-Pascale Pouey-Mounou
01-46-59-27-36 / ap.poueymounou@freesurf.fr
Nicolas Weill-Parot
01-43-70-11-56 / nicolas.weill-parot@wanadoo.fr