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Liberté d'expression des enseignants-chercheurs: l'affaire Maurel-Indart/Edelmann

Liberté d'expression des enseignants-chercheurs: l'affaire Maurel-Indart/Edelmann

Publié le par Marc Escola

Sur le site idee@jour (14/1/10)

Hélène Maurel-Indart a t-elle le droit de publier ses recherches ?


Enthéorie, l'enseignant-chercheur a une liberté de recherche etd'expression absolue, prévue par la loi de 1984. Mais la justice en adécidé autrement pour l'auteur d'un livre issu de son rapport derecherche. A la clé : 100 000 euros de dommage et intérêts, et unejurisprudence préjudiciable pour toute la recherche française.



Ideeajour.fr s'était fait l'écho, le premier, en 2008 du litige quioppose Hélène Maurel-Indart, professeur de littérature comparée,spécialisée dans le plagiat à l'université François-Rabelais de Tours,à Bernard Edelman, philosophe, essayiste et lui-même fin spécialiste dela propriété intellectuelle.

Au coeur du conflit, un livre d'H. Maurel-Indart, "Plagiats, LesCoulisses de l'écriture", un texte intégralement issu du rapport derecherche et que l'universitaire avait présenté lors de sonhabilitation à faire des recherches (HDR) à la Sorbonne en 2007. Parmiune centaine de cas étudiés, cinq pages de cette recherche travaillentl'hypothèse d'un plagiat - ou d'un emprunt cannibale- de B. Edelmanpour son propre livre, Le Sacre de l'auteur (Seuil, 2004). Les passagesdu livre de B. Edelman s'inspireraient fortement d'une thèse traitantdes origines des droits d'auteur, signée elle Laurent Pfister. Bref,quand un spécialiste du plagiat rencontre un autre expert du plagiat,ils n'organisent pas forcément des disputes ou des colloques sur desaspects de l'emprunt littéraire, ou de l'intertextualité, ils peuventse lancer dans des procès.



En 2008, la cour d'appel du Tribunal de Grande Instance (TGI) deVersailles avait déclaré nulle la requête de B. Edelman, et la justicetotalement incompétente sur le sujet. Les juges avaient même décidé quele plaignant, par ailleurs avocat au barreau de Paris, devait verser1000 euros de préjudices à l'auteur et à l'éditeur attaqués.

Mais le 16 septembre 2009, la cour d'appel, elle, a rendu un toutautre arrêt. Même si un enseignant-chercheur bénéficie de la protectionjuridique de son université, il pourra y avoir malgré tout un procès.La loi de 1984 sur l'enseignement supérieur, qui semblait pourtant enbéton, garantissant sans réserve dans l'exercice des métiers et despratiques de la recherche, la liberté de chercher et de s'exprimer,connaît quelques fissures.

L'éditeur, les Editions de la Différence, ne serait pasbibliométriquement correct, à en croire les arguments de la courd'appel. L'éditeur est privé. De plus, H. Maurel-Indart a publié sontexte deux ans après son habilitation, ce qui est long selon la courd'appel et peut être considéré comme une activité détachable del'exercice habituel d'un enseignant-chercheur.

"Je suis choquée par cet arrêt qui remet en cause la libertéd'expression des enseignants chercheurs", témoigne H. Maurel-Indart quivient de se pourvoir en cassation. Si procès il y avait, l'issuepourrait être une jurisprudence préjudiciable pour toute la recherchefrançaise.

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Pour plus de détails, voir le site d'H. Maurel-Indart, leplagiat.net.