Comment s’explique l’inaction des hommes et des peuples ; de quoi est faite notre inertie ? Comment avons-nous pu nous mettre en retrait, adopter volontairement une attitude passive, face à la plus radicale des destructions jamais entreprises par le néolibéralisme, à savoir le démantèlement des corps politiques, la lucratisation de tous les services publics, la privatisation de l’espace public ? Et face à ce qui vient – le dérèglement climatique, l’extinction de masse du vivant – comment pouvons-nous détourner le regard, pratiquer obstinément le déni de réalité et laisser faire, alors que la situation menace directement nos vies ?
Cinquante ans d’ultralibéralisme ont profondément changé notre rapport au monde. Nous désirons aujourd’hui être reconnus comme des individus et non comme des citoyens. Nous avons appris à croire que la liberté est un droit que nous avons à la naissance et par nature, sans qu’elle ait à être construite politiquement. Nous croyons en une liberté apolitique.
Mais tandis que le nouveau régime libère les « forces vives » de la société civile, il clôt l’espace public, ferme toute agora et nous condamne à l’impuissance politique.