Professeure d’anthropologie à l’Université Johns-Hopkins à Baltimore, Veena Das compte parmi les anthropologues les plus éminents d’aujourd’hui, et l’autrice d’une oeuvre importante consacrée à la question de la violence, de la souffrance sociale et de la vie ordinaire. Les éditions du Cerf donnent à lire La vie et les mots, préfacé par Stanley Cavell, qui analyse l’irruption de la violence extrême dans la vie ordinaire, notamment celle des femmes, en s’appuyant sur l’exemple de la partition de l’Inde et du Pakistan en 1947 ou des massacres de sikhs ayant suivi l’assassinat de la Première ministre Indira Gandhi en 1984. Veena Das dévoile ainsi les différents mécanismes à l’œuvre, qui combinent violence collective, influence de la rumeur, nouveaux liens familiaux et rôle des autorités. Articulant réflexions ethnographiques et philosophiques, elle esquisse dans cet essai magistral une nouvelle façon de décrire et d’interpréter la violence dans les sociétés et cultures du monde entier.
Rappelons le premier livre de Veena Das traduit en français en 2021 aux éditions lausannoises BSN Press par M. Motta et Y. Erard, avec une préface S. Laugier : Voix de l'ordinaire, qui venait témoigner des violences faites aux femmes depuis la Partition des Indes en 1947. L’image qu’elle en donne n’a pourtant rien de spectaculaire. Elle s’intéresse au contraire au travail de rafistolage des relations qui apparaît en creux, dans les silences, dans les petits gestes quotidiens, et dans des formes particulières d’attention. Elle rend ainsi sensibles les forces à la fois annihilatrices et créatrices qui traversent et transforment les vies. Le soin que Veena Das porte aux détails et aux inflexions les plus infimes de l’ordinaire donne à percevoir la manière dont les relations endommagées se tissent à nouveau, fil après fil.