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Nouvelle parution
Yukio Mishima, Keiichirō Hirano, Le Théâtre selon Mishima

Yukio Mishima, Keiichirō Hirano, Le Théâtre selon Mishima

Publié le par Faculté des lettres - Université de Lausanne

« L’éphémère des arts scéniques, leur pathétique, cette rigueur formelle que véhicule le cadre de l’avant-scène, l’effet précis de coupure dans le temps et de synthèse que suscitent le lever et le coucher du rideau, la force d’évocation des accessoires sur les planches… Tous ces éléments exercent sur moi une séduction effrayante. »

Le Théâtre selon Mishima est l’occasion de découvrir un pan important de l’œuvre de l’auteur de Confession d’un masque ou de La Mer de la fertilité à travers quatre pièces jusque-là inédites en français et un recueil de trente-cinq textes, également inédits, mêlant des chroniques parues dans la presse japonaise ainsi que des extraits d’ouvrages.

Mishima fut un remarquable dramaturge, dont les pièces sont encore fréquemment jouées au Japon. Le romancier Keiichirō Hirano, auteur d’un texte à découvrir en ligne sur le site dédié à cet ouvrage, n’hésite pas à parler au nom du public japonais pour suggérer que « si les romans de Mishima disparaissaient, ses pièces de théâtre subsisteraient sans doute. »

Les Écrits sur le théâtre font découvrir un érudit, fin connaisseur du théâtre japonais traditionnel, mais aussi, entre autres, de l’œuvre de Victor Hugo, Jean Genet, Sade ou Tennessee Williams. Échelonnées de 1949 à 1969, ces chroniques révèlent de plus un artiste très investi dans les débats intellectuels de son temps, et que la polémique stimulait.

Les quatre pièces sélectionnées offrent un aperçu du vaste talent d’un auteur pour qui l’exploration littéraire était indispensable à sa créativité : « J’ai commencé à écrire des pièces de théâtre comme entraîné par un courant au fond de l’eau. Je porte en moi leur configuration dans un lieu plus profondément enfoui que celui du roman. Un lieu qui paraît plus instinctif, plus proche des jeux d’enfants. »

Jeunesse, lève-toi et marche ! (1954) est une pièce nourrie par l’expérience personnelle de Mishima, puisqu’elle raconte la fin de la guerre et la défaite telles qu’il les a vécues.

Un nid de termites (1956), qui dissèque des états amoureux paradoxaux, se déroule dans une plantation de café au Brésil. La pièce a été inspirée à Mishima par le voyage autour du monde qu’il effectua entre 1951 et 1952, en tant que correspondant spécial pour le journal Asahi.

Le Koto du bonheur (1964), réflexion sur le pouvoir politique, tient une place particulière dans l’œuvre de Mishima, car elle fut au cœur de sa violente polémique, puis de sa rupture, avec une troupe proche de la fraction prochinoise du parti communiste japonais. Ce moment fut un tournant dans la vie de l’artiste, qui lui consacra l’essai majeur L’Art comporte des épines (à lire dans Écrits sur le théâtre) : « À cet instant un idéal artistique qui existait depuis la fondation de la troupe s’est effondré. »

La Terrasse du roi lépreux (1969) est l’ultime pièce de l’auteur, qui se suicida en 1970. À l’instar de La Mer de la fertilité, elle semble annoncer sa fin tragique : « Dépêchez-vous. Ah, la mort est proche. J’entends distinctement le bruit de ses sabots au galop. »

En tout cas, pour Keiichirō Hirano, la création en France de La Terrasse du roi lépreuxpourrait être l’occasion de faire découvrir et perdurer un Mishima dramaturge dans notre pays : « Cette pièce est une des œuvres théâtrales de Mishima que, grâce à la traduction française présentée ici, je serais particulièrement ravi de voir mise en scène par un artiste français. »

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