Qui aurait pu dire qu'il restait à découvrir un manuscrit de la main même d'Émile Durkheim ? Sous le titre Leçons de sociologie criminelle, les éditions Flammarion donnent à lire un cycle complet de leçons inédites du sociologue sur le crime et la peine. À la toute fin de ce XIXe siècle qui fut celui des hygiénistes inquiets du pouvoir contagieux des "déviants", Durkheim renverse la perspective positiviste de l'anthropologie criminelle propose à arrêter une typologie des criminels. Pour le sociologue, c’est l’influence de la société, plutôt que les caractéristiques intrinsèques des individus, qui permet d’expliquer les différentes formes de criminalité : es changements de modèle de société, soumis au processus d’individuation, les crises économiques et politiques, les bouleversements de la structure familiale, l’effacement des croyances religieuses sont constitués en variables clés. Durkheim fut ainsi le premier à envisager le crime sans considération morale, comme la simple transgression d’une norme. Fabula vous invite à feuilleter l'ouvrage...
—
Au cours de ce même XIXe siècle, tandis que les savoirs sur le crime prennent davantage de densité, que l’enquête de police, l’instruction judiciaire, la médecine et la psychiatrie légale se déploient, les contemporains ne s’intéressent guère ni à la réitération du crime ni à la "passion criminelle" de ceux que nous nommons les" tueurs en série". La plupart des victimes sont des femmes anonymes : prostituées, servantes, demoiselles de magasin, veuves. Il a donc existé des tueurs de femmes – de nos jours, leurs crimes seraient qualifiés de "féminicides systémiques" – qui sont des tueurs en série et passent presque inaperçus. Dans Les tueurs de femmes et l'improbable addiction. Une archéologie des tueurs en série (Le Manuscrit), Frédéric Chauvaud se penche sur ce qui reste une énigme : pourquoi des hommes s’en prennent-ils exclusivement à des femmes, quelle force mystérieuse les anime ? Pourquoi ne peuvent-ils s’empêcher de recommencer ? Ces tueurs en série, même ceux qui ont fait l’objet d’une expertise mentale, ne sont pas considérés comme fous, ils sont jugés, condamnés, la plupart à la peine de mort, et exécutés. La justice se contente de mobiles apparents. Ce qui importe, c’est que l’institution judiciaire puisse fonctionner. Or la plupart des mobiles évoqués ne permettent pas de comprendre le passage à l’acte et cette addiction au crime est restée introuvable…
—
De 1870 à 1940, la complainte criminelle connut un âge d'or : reproduite sur une feuille illustrée ou "canard sanglant", elle narrait un fait divers marquant sur un air populaire. Elle s’est ensuite effacée derrière la radio et la télévision. Écrite par des auteurs le plus souvent anonymes et interprétée à voix nue par ses colporteurs, elle exprimait l’horreur des crimes du temps pour mieux la mettre à distance. Dans Chanter le crime. Canards sanglants & Complaintes tragiques (Bleu autour), Jean-François “Maxou” Heintzen donne à lire, voir et entendre cette production populaire, foisonnante et méconnue. En même temps qu’il décrit son histoire, il éclaire d’un nouveau jour maintes affaires, oubliées ou non : Landru, Violette Nozière, Dreyfus, Stavisky… Et, à l’heure des réseaux sociaux, il donne à réfléchir sur la médiatisation du fait divers qui n’est plus chanté en plein vent. Deux films sonores, via une clé USB encartée dans le premier rabat de couverture, accompagnent et prolongent cet ouvrage.