LA FACULTÉ DE THÉOLOGIE, LETTRES, HISTOIRE ET ARTS
LE CENTRE DE RECHERCHE SUR L’IMAGINAIRE IMAGINES
LE CENTRE DE RÉUSSITE UNIVERSITAIRE
UNIVERSITÉ DE PITEŞTI
en collaboration avec
AGENCE UNIVERSITAIRE DE LA FRANCOPHONIE (AUF)
et
ALBANIAN SOCIETY FOR THE STUDY OF ENGLISH (ASSE)
organisent les 22-23 octobre 2021
la Conférence internationale
"LANGUE ET LITTÉRATURE – REPÈRES IDENTITAIRES EN CONTEXTE EUROPÉEN"
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Le sujet proposé pour cette année :
Perceptions kaléidoscopiques du monde
Le long du temps, les conceptions sur le monde ont changé, de nouvelles visions ont été proposées, ce qui a prêté à des controverses plus d’une fois. Si l’on fait un bref recours aux idées qui ont fleuri sur la constitution du monde – vu comme réel auquel nous appartenons – on décèle, essentiellement, trois conceptions : une conception idéaliste, selon laquelle le monde est apparu de la volonté divine et d’une idée préexistante ; une conception matérialiste, qui affirme que le monde est issu d’un chaos dominé par un jeu aveugle et désorganisé d’atomes ; enfin, une conception organisationnelle, selon laquelle le monde présente d’emblée une organisation spontanée.
Si la première conception est redevable à la pensée chrétienne et la deuxième à la pense archaïque/mythique, la troisième a été théorisée assez tard, dans les premières décennies du XXe siècle. En effet, Ludwig von Bertalanffy[1] parle pour la première fois de la systémologie générale en 1937, ensuite une équipe de chercheurs de l’Université de Chicago entreprend un projet de recherche qui reposait sur l’idée qu’il existe des principes, des modèles et des lois systémiques applicables à tous les domaines scientifiques.
Toutefois, quelle qu’ait été la conception théorisée du monde, les hommes l’ont depuis toujours perçu comme un tout organisé et hiérarchisé et non pas comme un monolithe immuable et figé. Issu du Chaos primordial, le monde est la somme articulée de toutes les parties qui le composent et qui s’organisent selon une logique bien évidente. De plus, le monde évolue et, dans son évolution, les hiérarchies changent, tout comme changent la place et les interactions entre les petites unités qui le composent.
Même si les théories sur le monde-système ont tardé d’apparaître sous une forme structurée, la conscience en a existé toujours. Le déiste Voltaire l’exprimait d’une manière métaphorique lorsqu’il affirmait « Je ne puis songer que cette horloge existe et qu’il n’y ait pas d’horloger »[2]. Plus tard, Pierre Teilhard de Chardin, homme de l’église, se montre défenseur de l’idée d’une cosmogénèse et d’une approche systémique du réel. Pour lui, le monde est donc un kaléidoscope en mouvement : « Jadis, tout paraissait fixe et solide ; maintenant, tout se met à glisser sous nos pieds dans l’univers : les montagnes, les continents, la Vie et jusqu’à la matière même. Non plus, si on le regarde assez haut, le Monde qui tourne en rond ; mais un nouveau monde qui change peu à peu de couleur, de forme et même de conscience. Non plus le Cosmos, mais la cosmogénèse »[3]. Que dire ensuite des structuralistes, pour lesquels tout objet d’étude – langue, texte, œuvre d’art, mythologie, société – est pris comme un système à l’intérieur duquel les unités élémentaires sont unies par des relations.
Le monde n’est donc pas un monolithe, mais un système organisé, à l’intérieur duquel se constituent des hiérarchies et où les relations mettent en connexion les unités élémentaires ; encore, il est un système en mouvement, un mécanisme où les unités se déplacent pour créer un nouveau tout, un nouveau monde.
Le monde est un kaléidoscope et il revient au sujet percevant d’en observer, analyser et synthétiser la forme / les formes et la structure. Il en est de même pour les productions humaines : la langue-monde, le texte-monde, l’œuvre d’art-monde.
L’(inter)action est le lien langue-monde. De par leurs fonctions cognitive, communicative et expressive, les langues sont à la fois le lieu d’un processus intellectuel et un produit de situations historiques[4], sociopolitiques etc. En effet, les données du monde – potentialités linguistiques latentes ‒ se prêtent et surtout invitent à la verbalisation. C’est l’essence de « L’homme de paroles »[5]. R. Martin notait en ce sens : «Il faut un langage pour donner corps à la pensée, pour l’appréhender, pour la moduler, pour la fonder.»[6] Au centre de la verbalisation se trouve l’opération de perception qui est : (a) une vision (au sens psychologique subjectif); (b) une représentation c'est-à-dire une conceptualisation, un reflet, conformément à un système normatif qui donne une forme abstraite, un signe (ou un complexe de signes) à un élément concret; (c) une recréation parce qu’on ne représente jamais le monde tel qu’il est.
Par sa fonction épiphanique, l’acte de nomination inscrit le signe dans la langue, lequel par les relations d’opposition et de contrariété qu’il contracte fonde l’acte de prédication[7] et, par delà, il acquiert dans le discours des significations adjacentes. Quoi qu’il en soit, l’être s’inscrit dans le monde par le langage, à travers la langue mise en discours.
Le rapport langue-monde a fait naître, durant les siècles, une vision kaléidoscopique sur ce phénomène : rien qu’à penser à la Grammaire de Port Royal, au structuralisme et au neostructuralisme, à la sémantique pour arriver au foisonnement des recherches en pragmatique linguistique et littéraire.
Encré sur des réalités empiriques et subjectives, l’analyse de la langue dans ses manifestations phrastiques/discursives pourrait offrir aux participants une vision « intégrative » aux études visant la production-manifestation d’un certain fait langagier, d’un certain type de texte mis en rapport avec les enjeux extralinguistiques dont il relève.
Pour ce qui est du texte-monde, Umberto Eco notait, dans son Lector in fabula, que le texte « est une machine paresseuse qui exige du lecteur un travail coopératif acharné pour remplir les espaces du non-dit ou du déjà-dit restés en blanc »[8], faisant ainsi claire l’idée du texte-mécanisme, formé d’unités minimales, entretenant des relations et affirmant le rôle incontournable du récepteur dans la perception du message textuel. Le texte – fictionnel, non-fictionnel, historique etc. – pourrait donc être analysé comme un monde qui se laisse découvrir, un point de rencontre entre les intentions de l’auteur et les perceptions du lecteur, dans sa complétude ou bien dans son laconisme.
Si l’on pense à l’œuvre d’art-monde – texte littéraire, œuvre théâtrale ou musicale etc. – le récepteur agit toujours comme le manipulateur d’un kaléidoscope[9], et il est censé trouver les maintes significations du produit artistique, dans le travail de décodage. Encore, élargissant l’image du « miroir de sorcière » des textes fantastiques[10] à tout texte fictionnel voire à tout produit artistique qui porte en soi et avec soi un reflet, à la fois perception et représentation du monde, nous invitons à une réflexion sur la manière dont « le réel » est reflété au centre convexe de ce miroir, mais également sur la manière dont les rayons diffusent la lumière dans leur mouvement centripète (vers « le réel ») ou centrifuge (vers « les réalités »).
Dans les approches de l’œuvre d’art, dont le sens n’est pas unique, les perspectives peuvent être multiples, en partant de la prémisse qu’elle est aussi formée d’unités minimales de sens (artistique) que le consommateur perçoit, arrange, interprète. De plus, du point de vue sémiologique, le rapport destinataire-œuvre artistique se traduit dans la possibilité de l’œuvre d’accumuler des informations, c’est-à-dire des vies sémiques, par les différentes lectures/réceptions.
Sans avoir la prétention d’exhaustivité, la thématique proposée pour la rencontre de cette année invite à une réflexion plurielle sur les divers aspects revêtus par les perceptions kaléidoscopiques du monde, dans la langue, dans la littérature, dans les arts, dans les études culturelles et dans l’histoire.
Les débats sont organisés par sections. Nous vous prions de contacter le responsable de la section pour envoyer votre résumé, votre article ou pour tout autre renseignement :
1. Langue roumaine; Littérature roumaine; Littérature comparée; Didactique du roumain; Communication et études culturelles – Lavinia GEAMBEI (geambeilavinia@yahoo.com).
2. Langue française; Littérature française; Littératures francophones; Études culturelles françaises; Études culturelles canadiennes; Didactique du français; Traductologie-langue française – Adriana APOSTOL (silvadius@yahoo.com; adriana.apostol@upit.ro).
3. Langue espagnole; Littérature espagnole et hispano-américaine; Études culturelles espagnoles et hispano-américaines ; Didactique de l’espagnol; Traductologie - langue espagnole – Diana LEFTER (diana_lefter@hotmail.com).
4. Langue anglaise ; Littérature anglaise ; Littératures anglophones; Études culturelles britanniques et américaines; Didactique de l’anglais; Traductologie - langue anglaise – Cristina MIRON (cristinamironn@gmail.com).
5. Langue allemande; Littérature allemande; Études culturelles germaniques ; Didactique de l’allemand Traductologie - langue allemande – Cristina MIRON (cristinamironn@gmail.com).
6. Histoire, civilisation, société, culture – Liliana SOARE (lilianasoare2006@yahoo.com).
7. Langages de spécialité (français, anglais, allemand) – Marina TOMESCU (ana_marina_tomescu@hotmail.com).
8. Arts du spectacle, musique – Diana LEFTER (diana_lefter@hotmail.com).
CALENDRIER DE LA CONFÉRENCE
- 1 septembre 2021 – envoi du formulaire de participation ;
- 15 septembre 2021 – notification de l’acceptation de la communication ;
- 10 octobre 2021 – règlement des frais de participation ;
- 22-23 octobre 2021 – les travaux de la conférence ;
- 15 janvier 2022 – envoi des textes in extenso des communications
Note 1 : Les textes seront rédigés en anglais, français, espagnol, allemand, italien ou portugais. Une sélection des communications, proposée par le comité de lecture sera publiée dans la revue Limba și literatura - repere identitare în context european (enregistrée dans des bases des données internationales : ErihPlus, EBSCO, CEEOL, IndexCopernicus, DOAJ etc.). Les autres communications seront publiées dans un volume collectif de la conférence, avec ISBN, chez une maison d’édition reconnue. Le temps alloué à la présentation des communications ne devrait pas dépasser 15 minutes.
Après la notification d’acceptation, les auteurs seront informés sur les possibilités de logement et sur les coordonnées bancaires pour le règlement de la taxe (50 euros pour les participants de l’étranger et 200 RON pour les participants roumains).
Note 2 : En tenant compte de la pandémie actuelle de COVID-19 et afin de se conformer aux exigences des autorités, le comité d’organisation n’exclut pas des variantes telles que la participation en ligne ou même renoncer à l’organisation physique de l’événement (avec la possibilité de publier les œuvres transmises jusqu’à la date limite indiquée dans l’appel, accompagnée d’une réduction de la taxe). Les collègues qui exprimeront leur intention de participer en envoyant la fiche d’inscription recevront des informations à cet égard dans les meilleurs délais
Pour toute information supplémentaire, veuillez nous contacter :
reperesidentitaires@yahoo.com; valentina.stinga@upit.ro.
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[1] von Bertalanffy, Ludwig, Théorie générale des systèmes, Paris, Dunod, 1973. La première édition a été publiée en anglais, General System Theory, 1968.
[2] « Il est vrai, j’ai raillé Saint-Médard et la bulle / Mais j’ai sur la nature encor quelque scrupule / L’univers m’embarrasse et je ne puis songer / Que cette horloge existe et qu’il n’ait d’horloger ». Voltaire, Les Cabales.
[3] Teilhard de Chardin, Pierre, La vision du passé, Paris, Seuil, 1957, p. 337.
[4] Au sens saussurien du terme.
[5] Syntagme emprunté au titre de l’ouvrage de Claude Hagège.
[6] Martin Robert. Sur les universaux du langage. In: Comptes rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, 158e année, N. 2, 2014. pp. 843-874. DOI : https://doi.org/10.3406/crai.2014.95026
www.persee.fr/doc/crai_0065-0536_2014_num_158_2_95026
[7] Dans le sens d’opération de prédication en logique. Mettant en œuvre des opérations de raisonnement logique, le langage exprime des représentations cognitives.
[8] Eco, Umberto, Lector in fabula, Paris, Grasset, 1985, p. 27. La première edition a été publiée en italien, chez Bompiani, Milan, 1979
[9] Cf. Maria Corti, pour laquelle la littérature – et par extension nous disons toute production artistique – est un système.
Corti, Maria, Princìpi de la comunicazione letteraria, Milano, Bompiani, 1976.
[10] Fabre, Jean, Le miroir de sorcière. Essai sur la littérature fantastique, Paris, José Corti, 1992.