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Translations: séance d'introduction (ENS Paris)

Translations: séance d'introduction (ENS Paris)

Publié le par Frédérique Fleck

Séminaire « Translations » - équipe « Anachronies »

Séminaire transversal DSA - LILA (ENS), en collaboration avec l’Atelier de théorie littéraire de Fabula.

 

Séance introductive - Vendredi 16 octobre 2015, 14h-16h

ENS, 45 rue d’Ulm, 75005 Paris, salle Cavaillès

Intervenants : Florian Pennanech et Marie-Jeanne Zenetti

 

  Le terme de « translation » ne désigne pas une notion définie, mais une piste conceptuelle que le séminaire propose d’explorer au cours des séances de cette année. Il serait plus juste de parler de « translations », au pluriel, tant le mot lui-même renvoie à une multiplicité d’origines possibles : pluriel des langues, d’abord, puisqu’il fait entendre à la fois le latin (la translatio médiévale) et l’anglais, où le mot est l’équivalent de notre « traduction », et engage donc l’idée du passage d’une langue à une autre, et avec elle, d’un espace culturel de réception à un autre. Pluriel des disciplines, également, puisqu’en français, le terme renvoie d’abord à un certain type de transformation géométrique, qui consiste à faire simplement « glisser » un objet, sans le déformer, ni le retourner, sans lui faire subir de rotation ou de changement de taille. La translation au sens mathématique appelle à s’interroger sur ce que le glissement, ou la recontextualisation fait aux objets qu’elle affecte, alors même qu’elle ne semble pas, en apparence, leur faire subir de transformation. Appliquée aux études littéraires, elle concerne non plus les formes géométriques, mais les discours, et nous invite à formuler une hypothèse, que les séances du séminaire viendront peut-être infirmer, ou confirmer : cette hypothèse, c’est que la notion de « translation » permet de penser quelque chose des études littéraires, du rapport aux textes et aux discours que celles-ci tentent de construire. Elle prolonge, sur le mode spatial, et non plus seulement temporel, les réflexions menées par Yves Citton sur l’actualisation des textes littéraires, et celles sur l’anachronisme qui ont été élaborées et mises en pratique au sein du séminaire tout au long des années précédentes.

  La première séance du séminaire invitera d’abord à réfléchir à l’ensemble des acceptions possibles du terme « translation » dès lors qu’on le translate de son domaine originel, la géométrie, à un autre domaine, la littérature. Pour cela on tentera d’inventorier les différents procédés, opérations et autres catégories qui s’apparentent à la translation, notion qui convoque un imaginaire de la spatialité et de la mobilité dont on tentera de cerner les enjeux. Ce faisant, on proposera une véritable introduction à la fabrique des concepts en théorie littéraire, en insistant sur les modes de conceptualisation impliqués dans l’extrapolation d’un champ à un autre.

  Après s’être attaché aux concepts, on s’intéressera ensuite aux textes, ceux qu’on lit et ceux qu’on écrit, en posant une question simple : qu’est-ce que faire glisser un énoncé d’un contexte à un autre fait à cet énoncé ? Pensée comme une construction et une circulation de sens, la translation s’articule de façon essentielle à la notion de contexte, de cadre interprétatif. Elle invite à penser les objets de discours en tant qu’ils « glissent », à travers le temps et les espaces – que ceux-ci soient linguistiques, culturels, géographiques, politiques, artistiques. En quoi cette translation peut-elle être synonyme de déstabilisation, mais aussi d’approfondissement et d’enrichissement de ce discours ? Mais aussi : qu’est-ce que la pratique du glissement contextuel fait aux disciplines qui s’occupent de penser la circulation des discours ? Il s’agira de voir comment la notion peut permettre de penser certains gestes artistiques et critiques contemporains qui jouent du principe de recontextualisation pour produire des objets littéraires nouveaux et interroger aussi bien la notion de création que de lecture littéraire.

 

Bibliographie :

- Fish, Stanley, « Comment reconnaître un poème quand on en voit un », in Quand lire,  c’est faire, l’autorité des communautés interprétatives, trad. Etienne Dobenesque, Paris, Les Prairies ordinaires, 2007 (1980), p. 55-77.

- Borges, Jorge Luis, « Pierre Ménard, auteur du Quichotte », in Fictions, Paris, Gallimard « Folio », 1983 (1956), p. 41-52.

- Rabau, Sophie, « Pour une géographie arbitraire : modeste contribution à la géographie odysséenne », La Licorne 113, Voyages d’« Odyssée ». Déplacements d’un mot de la poétique aux sciences humaines, C. Barral et M. de Marcillac (dir.), Rennes, PUR, 2015, p. 97-118.

NB : La bibliographie est restreinte à dessein pour que les participants puissent prendre connaissance de l’ensemble de ces textes, qui serviront de base commune à la discussion.