Sous le titre Les situationnistes. Une avant-garde totale (1950-1972) (CNRS éd.), É. Brun offre une analyse sociologique du mouvement situationniste, en éclairant les parcours croisés des acteurs d'une avant-garde qui n'ambitionnait rien moins que d'établir une nouvelle civilisation. La viedesidees.fr en donne déjà un compte rendu. Th. Paquot nous invite de son côté à descendre en ville avec les "situs" (Les situationnistes en ville, Infolio éd.): loin de se cantonner à évaluer la pertience des notions promues par l'Internationale Situationniste («psychogéographie», «dérive», «urbanisme unitaire»…), cet ouvrage collectif a l'ambition de poursuivre l'œuvre de dénonciation des pièges consommatoires, en invitant à expérimenter là où la globalisation favorise la répétition du même. On pourra lire encore les Lettres à Marcel Mariën (La Nerthe), qui éclairent la participation de G. Debord à la revue Les Lèvres nues, où il publia ses premiers textes d’importance : « Introduction à une critique de la géographie urbaine », « Mode d’emploi du détournement » et « Théorie de la dérive ».
Autant d'occasions de réapprendre l'art des "rendez-vous possibles" :
"Le sujet est prié de se rendre seul à une heure qui est précisée dans un endroit qu’on lui fixe. Il est affranchi des pénibles obligations du rendez-vous ordinaire, puisqu’il n’a personne à attendre. Cependant ce "rendez-vous possible" l’ayant mené à l’improviste en un lieu qu’il peut connaître ou ignorer, il en observe les alentours. On a pu en même temps donner au même endroit un "autre rendez-vous possible" à quelqu’un dont il ne peut prévoir l’identité. Il peut même ne l’avoir jamais vu, ce qui incite à lier conversation avec divers passants. Il peut ne rencontrer personne, ou même rencontrer par hasard celui qui a fixé le "rendez-vous possible". De toute façon, et surtout si le lieu et l’heure ont été bien choisis, l’emploi du temps du sujet y prendra une tournure imprévue. Il peut même demander par téléphone un autre "rendez-vous possible" à quelqu’un qui ignore où le premier l’a conduit. On voit les ressources presque infinies de ce passe-temps."