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La Science en langue commune

La Science en langue commune

Publié le par Florian Pennanech (Source : Paule PETITIER)

La Science en langue commune

 

Séminaire doctoral 2013-2014

 

 

Ce séminaire s’inscrit dans le cadre du programme de recherche La Science en langue commune, rattaché à la fois au Centre de ressources Seebacher (CERILAC) et à l’Institut des Humanités de Paris – Université Paris Diderot.

Ce séminaire interdisciplinaire implique plusieurs équipes de recherche de l’Université Paris Diderot et de l’Université Paris 3 : CERILAC, LARCA, HTL, ICT, SPHERE, LCSP, CRPMS, CRP 19, PRISMES.

 

Depuis le début de l’époque contemporaine, la recherche scientifique s’est peu à peu détachée de l’expression commune en se fondant sur le langage mathématique, sur un lexique spécifique et sur un type de communication réservé aux spécialistes. Il en résulte un clivage entre la pensée scientifique et l’espace de réflexion commun. Les conséquences de ce divorce se font sentir aujourd’hui de façon pressante comme le montrent la volonté de donner une place déterminante à l’éthique au sein des pratiques médicales et scientifiques, mais aussi la difficulté d’articuler dans les organismes décisionnels le point de vue de la société civile et celui des experts scientifiques. La science ne parle plus, depuis longtemps, la langue de tous et nous parvenons à un moment où les effets de cette forclusion ne peuvent plus être niés.

La Science en langue commune, programme de recherche résolument interdisciplinaire, interroge le rapport de la science, de l’espace public et de la langue commune, aux périodes moderne et contemporaine. Au sein de cette longue durée, le xixe siècle apparaît comme un tournant capital dans l’histoire des relations entre littérature et sciences. Elles se dissocient alors progressivement ; les disciplines scientifiques s’institutionnalisent et se coupent, de ce fait, de la communication directe avec le public. Ce qu’on appelle désormais « littérature » n’a plus vocation à transmettre les connaissances scientifiques mais résiste en prétendant devenir le lieu de production d’un savoir spécifique : les écrivains se nourrissent des sciences humaines émergentes et contribuent également au progrès et à la définition de ces dernières.

 

Les six séances de séminaire qui inaugurent ce programme  pluriannuel auront une vocation exploratoire, autour de problématiques variées impliquant différents domaines scientifiques et différents rapports à la langue et à l’expression. Elles auront lieu dans la Bibliothèque Seebacher (Université Paris Diderot, Bât. des Grands Moulins, aile A, 2e étage).

 

Ce chantier reste ouvert et entend susciter de nouvelles propositions pour les années suivantes, notamment de la part de doctorants ou de post-doctorants.

 

Contact : Paule Petitier (paule.petitier@univ-paris-diderot.fr)

 

 

  • Jeudi 7 novembre (17h-19h) 

Darwin et la langue (Michel Prum, Thomas Constantinesco, Michel Imbert)

Comment exprimer des idées nouvelles dans une langue ancienne ? Comment forger une théorie de l’évolution dans une langue façonnée par des millénaires de pensée créationniste ? Darwin, en rédigeant On the Origins of Species en 1859, se heurte à ce que Bachelard appellera « l’obstacle verbal ». L’étude des six éditions de L’Origine (1859 – 1860 – 1861 – 1866 – 1869 – 1872) ‒ rassemblées en 2006 dans un seul volume variorum par l’Américain Morse Peckham ‒ montre comment Darwin se bat avec la langue anglaise pour éliminer l’idée de création et pour exprimer des actions qui n’ont pas d’agent (emploi du passif par exemple). La tâche est encore plus rude pour le traducteur qui doit imposer au français la voix passive, beaucoup plus rare qu’en anglais.

 

  • Samedi 7 décembre (10h-12h) 

Le circulus des concepts : Misère, peuple, plèbe (Jean Delabroy)

Au moment de l’émergence des sciences humaines, au xixe siècle, la réflexion sur la « question sociale » se construit à partir de termes comme « peuple » ou « misère ». Ces notions sont ensuite jugées inopérantes et écartées par la sociologie, l’économie, voire l’histoire, pendant plus d’un siècle. Cependant, à la fin du xxe siècle, des auteurs comme Bourdieu ou Rancière ont éprouvé le besoin de se ressaisir de ces notions pour aborder à nouveaux frais la situation sociale et/ou politique contemporaine. Il s’agira donc de réfléchir, à partir de ces exemples, à ce « recyclage » ou « ressourcement » des concepts, qui semble récurrent dans l’histoire des sciences.

 

  • Jeudi 6 février (17h-19h) 

Écrire la science pour les femmes (Gabrielle Houbre, Michel Pierssens)

Médecins et hygiénistes de la fin du xixe siècle souhaitent transmettre aux femmes une partie des découvertes modernes sur la physiologie humaine. Mais comment parler de ces réalités crues sans choquer la sensibilité de leurs lectrices ?

 

  • Samedi 8 mars (10h-12h) 

Interlangue et langues universelles (Fabien Simon)

À l’heure où l’Université française s’interroge sur la nécessité de dispenser ses enseignements en anglais, la question d’une langue commune qui favoriserait l’échange et la circulation des savoirs mérite d’être éclairée par la confrontation de plusieurs situations historiques. Il fut un temps où le latin était la langue des clercs (le grec dans le monde byzantin) et favorisait de fait la diffusion internationale de la science. Les recherches sur les langues universelles de la première modernité (xvie-xviie siècles) s'inscrivent pour leur part dans des réseaux qui en font aussi des langues de la science et de la vérité, destinées aux membres d'une province de la République des Lettres dans laquelle les projets circulent. Cependant, l'identité des acteurs sociaux qui les élaborent et la structuration des espaces sociaux qui les voient naître les transforment, par ailleurs, en langues « exclusives », et donc bien peu « communes », puisque liées à la cryptographie qui les inspire. 

Le xixe siècle prolonge ces recherches, a priori dans la perspective de faire au contraire de ces langues des instruments de communication ouverts, avec par exemple l’espéranto conçu par Zamenhof en 1887, ou l’ido créé en 1907.

Les trois tendances qui caractérisent les tentatives de créer une langue universelle (langue secrète, langue parfaite, espace commun d’intercompréhension) seront au centre du questionnement.

 

  • Jeudi 10 avril (17h-19h) 

Hygiénisme et écosanté (Serge Gottot, Muriel Louâpre, Paule Petitier)

L’émergence actuelle dans le domaine de la santé publique d’un nouveau courant baptisé « écosanté » pourrait être rapprochée de l’apparition de l’hygiénisme au xixe siècle. Dans les deux cas, il s’agit d’une approche médicale qui, au départ, n’est pas fondée sur des certitudes scientifiques mais dont la mise en application produit des effets salutaires. Dans le cas de l’hygiénisme, le recul historique permet également de voir quelles dérives s’autorise un discours peu conscient des limites entre ses fondements scientifiques et son versant idéologique (la sacralisation de l’hygiène alimentant la pensée raciste). L’hygiénisme du xixe siècle pourrait ainsi conduire à relire avec une distance critique les discours actuels sur l’écosanté.

 

  • Samedi 14 juin (10h-12h) 

Rencontre et discussion avec des responsables d’autres programmes de recherches

- Anne-Gaëlle Weber (Université d’Artois), programme « Histoires croisées au xixe siècle : histoire des sciences du point de vue de la littérature, histoire de la littérature du point de vue des sciences ».

- Nathalie Richard (Université du Mans), programme « La science “par en bas” ».

 

 

Pour venir :

Métro ligne 14, arrêt Bibliothèque ou RER C arrêt « Bibliothèque François Mitterrand ».

Entrez par le 16 rue Marguerite Duras. Ne changez pas de bâtiment et montez au 6e étage.

Plan disponible sur le site de l’Université Denis Diderot-Paris 7 : http://www.univ-paris-diderot.fr/sc/site.php?bc=implantations&np=SitePRG&g=m