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Nouvelle parution
Le Roman d’Yder : l’étude d’un récit de la Matière de Bretagne au prisme de la juslittérature

Le Roman d’Yder : l’étude d’un récit de la Matière de Bretagne au prisme de la juslittérature

Publié le par Marc Escola (Source : Jérôme Devard)

L'équipe de Juslittera a le plaisir de vous informer de la dernière livraison de la revue électronique de son site (www.juslittera.com). 

« Le Roman d’Yder : l’étude d’un récit de la Matière de Bretagne au prisme de la juslittérature »

Le Roman d’Yder ou (du roi Yder) occupe une place originale parmi les récits de la Matière de Bretagne. Le héros est une figure littéraire connue dès la première moitié du XIIe siècle : on le retrouve sous la plume de William de Malmesbury dans son Antiquitate Glastoniensis Ecclesiae, dans le Roman de Brutde Wace, dans Erec et Enide mais aussi dans Les Merveilles de Rigomer, L’Âtre périlleux, Hunbaut, La Vengeance Raguidel et même dans le Lancelot en Prose. Dès lors, il était assez logique qu’il devienne lui-même le personnage central d’un récit. 

Le Roman d’Yder est un roman en vers anonyme, écrit en ancien français et datant du premier quart du XIIIe siècle. Ce texte nous est parvenu dans un seul manuscrit acéphale conservé à l’université de Cambridge : le début de l’histoire est manquant (environ 1000 vers). Le reste du récit compte 6796 vers en octosyllabes. Suivant les règles de la Courtoisie, le jeune aristocrate, qui ignore l’identité de son père, se rend à la cour du roi Arthur afin d’être fait chevalier. La reine Guenièvre n’étant pas insensible à son charme, Yder provoque la jalousie d’Arthur qui refuse de le faire chevalier avant qu’il ait prouvé sa valeur. Ce n’est que le début d’une série d’aventures initiatiques qui aboutit à l’adoubement d’Yder et à son mariage avec la reine Guenloïe, la femme dont il voulait conquérir la main. 

L’originalité du Roman d’Yder tient en la figure du roi Arthur, celle d’un roi victime d’une jalousie mortifère à l’égard du jeune héros qui le conduit jusqu’à porter atteinte à son intégrité physique à l’aide de moyens guère loyaux (comme le poison). Dans ce roman, le roi Arthur n’est plus le roi-modèle garant d’équité entre les chevaliers de la Table Ronde et de justice pour son royaume. De nombreux arguments ont été avancés pour expliquer les raisons de ce portrait qui dénote avec la majorité des textes de la Matière de Bretagne. Certains y voient la résurgence d’un modèle mythique indo-européen (J. Grisward) ; d’autres, comme Beate Schmolke-Hasselmann (article reproduit dans ce numéro), analysent la figure d’Arthur comme un exemplum malum  traduisant la réaction d’hostilité de l’Église et de la haute-aristocratie contre la conduite peu exemplaire du roi d’Angleterre Jean sans Terre ; d’autres encore, comme Dietmar Rieger (article également réédité dans ce volume), pour lequels ce roman est destiné à l’édification de la classe aristocratique en mettant en garde contre la faillite de la vision intellectuelle et morale inhérente à la société courtoise. 

Quelques puissent être les raisons avancées pour expliquer ce portrait au vitriol, il est le fondement même de la célébrité de ce texte et la raison principale pour laquelle l’équipe de Juslittera a décidé de proposer un numéro thématique autour de ce récit. En effet, la déviance même d’Arthur, qui l’éloigne des règles de la courtoisie, est propice à l’étude de la norme. En effet, la fiction nous permet de nous interroger sur la construction et la cohérence du système normatif proposé en tant que représentation du système juridico-juridique contemporain auquel il renvoie nécessairement. Mais le système normatif fictionnel est également un objet d’études à part entière puisqu’il obéit lui-même à ses règles, ses valeurs et ses syllogismes propres, en somme ses rouages spécifiques. Toutes ces règles fictionnelles normatives spécifiques animent et structurent un système cohérent et logique à l’image de la société courtoise comme le rappelle très justement Lise Morin dans son article : « Le motif du Convenant dans le roman d’Yder ». 

Nous espérons que cette nouvelle livraison des Miscellanea Juslittera encourage de nouvelles vocations et contribue à mieux faire connaître ce roman dont l'originalité mériterait qu’on lui octroyasse un plus grand intérêt. 

Sommaire

Le motif de la jalousie dans le roman arthurien. L'exemple du roman d'Yder de Dietmar Rieger 

King Arthur as villain in the thirteenth-century romance 'Yder' de Beate Schmolke-Hasseslmann   

 Le motif du covenant dans le Roman d'Yder de Lise Morin

 Arthur's Character and Reputation in Yder de Norris J. Lacy

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Le prochain numéro qui devrait paraître au mois de décembre réunira des communications sur les œuvres de Marie de France.

Toutes les personnes intéressées par le sujet peuvent nous transmettre leur proposition à l'adresse suivante : jerome.devard@juslittera.com avant le 1er octobre 2022.