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Le concept d'œuvre de Jacques Derrida, un vaccin contre la loi du pire

Le concept d'œuvre de Jacques Derrida, un vaccin contre la loi du pire

Publié le par Université de Lausanne (Source : Pierre Delain)

Soutenance de thèse de Pierre Delain, Le concept d’œuvre de Jacques Derrida, un vaccin contre la loi du pire, sous la direction de Marc Crépon (ENS).

La soutenance aura lieu à l’Ecole Normale Supérieure, 45 rue d’Ulm, 75005 Paris, le samedi 7 janvier 2017, à 14h, Salle Cavaillès.

Le jury sera composé de :

- Vincent Delecroix, professeur à l’Ecole Pratique des Hautes Etudes (rapporteur)

- Jacob Rogozinski, professeur à l’Université de Strasbourg (rapporteur)

- Danielle Cohen-Levinas, professeur à l’Université Paris-Sorbonne (Paris IV)

- Perrine Simon-Nahum, directrice de recherche (CNRS – EHESS - ENS)

Position de thèse :

Jacques Derrida est signataire de ce qu’on appelle une "œuvre" : un vaste corpus de textes où d’autres "œuvres", en grand nombre, sont citées, étudiées, analysées ou déconstruites. Souvent, il utilise le mot "œuvre", et plus rarement mais de manière significative, il interroge ce mot ou ce qu'il appelle l'"énigme" du concept d'œuvre. Dans ce qu’il « dit » alors, un double « faire » est impliqué. D’une part, il se demande « Que fait cette œuvre ? », et nous pouvons analyser et commenter ce qu’il dit. Mais d’autre part, nous pouvons aussi nous demander : « Mais que fait Derrida quand il analyse ce que fait cette œuvre ? ». C’est cette deuxième question qui tend à prévaloir dans cette étude.

Dans les champs de l'histoire de l'art, de l'esthétique ou de la critique littéraire, il existe une immense littérature autour de la question de l'œuvre. La convoquer, dans le format limité de ce travail, aurait conduit à des simplifications, des approximations ou des omissions. On a donc fait un autre choix : chercher dans le texte derridien lui-même, dans son faire, son auto-hétéro-affection, les éléments qui pourraient conduire à l’élaboration d’un concept d'œuvre spécifique et singulier. Afin de tenir compte de la critique externe et aussi de la longue histoire de la philosophie autour de cette thématique, on a mis à profit la structure d'"invagination" du texte derridien. Dans ce texte même, en prenant appui sur la littérature secondaire, on peut repérer d'autres pensées de l'œuvre, par exemple celles de Lévinas ou d’Heidegger.

Cette méthode a conduit aux hypothèses suivantes :

1. Il y a dans l'œuvre derridienne, y compris à travers l’analyse des autres œuvres, la mise en jeu d’un "Il faut", d’une ou de plusieurs inconditionnalité(s), et ce dès les premiers textes.

2. La structure d'auto-immunité, décrite dans l'œuvre, opère dans l'œuvre. "Il faut" se protéger contre quelque chose. Quoi? Notre hypothèse, c'est qu'il s'agit du mal radical (la loi du pire).

3. Malgré les apories multiples dont la description occupe une large partie de l'œuvre, le désir de protection, en principe impossible à réaliser, réussit quand même. On peut tenter de démontrer cette réussite, mais on peut aussi, surtout, en témoigner par la lecture : Je dois reconnaître, je dois avouer qu'elle me vaccine.

4. Cette opération, que nous nommons aussi "œuvrance", est performative. Elle passe par cinq obligations inconditionnelles : laisser l’avenir ouvert, s’adresser à l’autre comme tel, s’aventurer pour plus que la vie, garder le secret, répondre des principes - en ce moment même.

5. Cela conduit à la définition d'un "principe de l'œuvre" spécifique de l’œuvre derridienne dont l'énoncé est le suivant : Ce qui a lieu dans une œuvre s’affirme inconditionnellement, en-dehors de tout calcul, de toute finalité et de toute transaction.

La soutenance sera suivie d’un pot auquel vous êtes cordialement invité(e)(s).