Editos
Actualités
Éloge de la disparition

Éloge de la disparition

Publié le

Dans une société où s'impose la flexibilité, l'urgence, la vitesse, la concurrence, l'efficacité, il y a peut-être une forme de sagesse à refuser de s'ajuster aux circonstances. Dans Disparaître de soi. Une tentation contemporaine (Métaillié), D. Le Breton propose d'appeler blancheur "un état d'absence à soi plus ou moins prononcé, le fait de prendre congé de soi sous une forme ou sous une autre". L'essai arpente une anthropologie des limites dans la pluralité des mondes contemporains pour s'attacher à une exploration de l'intime, où conditions sociales et conditions affectives se trouvent toujours mêlées. Pierre Zaoui enseigne de son côté La discrétion ou l’art de disparaître (Autrement) comme une forme heureuse et nécessaire de résistance à toutes les formes de spectacle. Il convoque les grands penseurs de la discrétion, de Kafka à Blanchot et Deleuze, en passant par V. Woolf et W. Benjamin, pour cerner ce "plaisir baudelairien de flâner anonymement parmi la foule, joie silencieuse de regarder son amour dormir ou ses enfants jouer sans qu’ils remarquent notre présence, soulagement de voir s’éloigner enfin le désir de triompher — loin de la dissimulation, du calcul prudent, ou de la peur d’être vu, l’âme discrète offre une juste présence au monde." Il n'y a d'auteurs que disparus : L. Nunez poursuit dans Et si je m'écorchais vif trois figures de la disparition : la fuite de Rimbaud, l'exil d'Hugo, et l'éclipse continue de Laforgue, avant de céder la parole à trois philosophes de l’effacement, Barthes, Derrida et Blanchot, pour parler à sa place de chacun de ces auteurs. Tout doit disparaître : c'est aussi le titre retenu par Gallimard pour la réunion en un fort volume des meilleurs romans de J.-B. Pouy parus dans la Série noire.