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Appels à contributions
De l’écrit à la scène

De l’écrit à la scène

Publié le par Emilien Sermier (Source : Karel Vanhaesebrouck)

 


Appel à contributions

 

Textyles, revue des lettres belges de langue française (http://textyles.revues.org/)

 

Journée d’étude: De l’écrit à la scène

 

Coordonné par Catherine Bouko (ULB) et Karel Vanhaesebrouck (ULB)

 

 

Depuis la fin du siècle dernier (et même bien avant), on a pu observer une mise en crise systématique du texte théâtral, voire de l’idée du répertoire tout court. Le texte a non seulement perdu sa position centrale en tant que yin et yang de la pratique culturelle qu’on appelle en occident le « théâtre », mais, de plus en plus, les metteurs en scène et les auteurs semblent également ressentir la nécessité de (faire) ré-écrire les textes, qu’il s’agisse de romans, d’autres textes de théâtre ou, plus rarement, de poésie. Le théâtre postmoderne a introduit la mise en crise de l’idée même du récit tout en continuant à insister sur sa propre spécificité médiale. La pratique de la « ré-écriture » s’inscrit dans ce développement où l’adaptation ne se limite plus à la simple transposition d’une structure narrative d’un médium (le texte) à un autre (la scène), mais où elle se veut un véritable travail de « re-création ». Au-delà de la question de l’adaptation du texte à la scène, la journée se veut une analyse exploratoire de ce texte intermédiaire, au statut étrange et fondamentalement provisoire, sans finalité ou déterminisme établis.

 

La pratique de la ré-écriture s’inscrit dans un des débats-clés de ces dernières décennies : la spécificité médiale, qui semble hanter toutes les théories de l’adaptation et qui se heurte de manière perpétuelle à l’hybridation des pratiques culturelles postmodernes. En effet, elle est bien plus qu’une simple question de forme ou de support et gagnerait à être considérée comme une véritable pratique culturelle qui permet de repenser son propre fonctionnement. Longtemps, la relation entre le texte et la scène a été étudiée sous un angle explicitement narratif, l’idée étant que le récit du texte (et non, par exemple, sa matérialité performative) faciliterait le passage de l’écrit à la scène. Cette idée allait de pair avec une croyance presque absolue dans la nature autonome et donc isolable de cette dimension narrative (il suffirait d’isoler la trame narrative du texte-source pour la transposer). Cette hégémonie réductrice de la narration et du narrateur est aujourd’hui fortement contestée, tant au niveau théorique qu’au niveau pratique, entre autres par Hans-Thies Lehmann dont le livre Le Théâtre postdramatique alimente les débats autour du théâtre contemporain depuis une vingtaine d’années. Cependant, on pourrait également défendre le point de vue historiographique que cette mise en crise ne constitue pas un moment de rupture inaugurale, mais qu’elle est l’aboutissement d’un mouvement décrit, entre autres, par Bernard Dort, qui réfère à l’ « émancipation de la représentation » et qui faisait du fameux « faire théâtre du tout » d’Antoine Vitez l’aboutissement de ce mouvement. Plutôt qu’une disparition du texte (comme on interprète trop souvent – à tort – l’idée du postdramatique), l’idée de la ré-écriture nous permet ainsi de mieux cerner la transformation d’un théâtre du texte à un théâtre de texte (pour reprendre une distinction de M. Corvin), un théâtre où le texte est un matériau pour la scène plus qu’une œuvre en soi, à représenter.

Dès lors, les propositions de communication pourront s’articuler autour des questions suivantes :

  • Les enjeux de la réécriture : pourquoi réécrire ? Quels sont les nécessités et enjeux dramaturgiques qui poussent à la réécriture, au risque de subir des accusations de réduction ou de détournement ? Quelles sont les limites de la pratique de la réécriture ? En quoi ces pratiques nous permettent-elles de mieux saisir la dramaturgie contemporaine ? Quelles sont les idéologies de ces réécritures ?
  • La nature du texte réécrit : en quoi ce texte est-il provisoire ? S’agit-il d’une étape de l’œuvre ou au contraire d’un processus en constante mutation? Comprend-il un contenu spécifique ? Quelles sont les caractéristiques génériques et formelles de ces textes (y compris les carnets d’écriture, visuels ou non) ?
  • Le rapport entre le texte réécrit et le spectacle : comment les caractéristiques de ce texte  programment-elles sa mise en spectacle ? L’un des enjeux de ce texte interstitiel serait-il de stimuler l’intégration d’éléments imprévus ou, au contraire, de programmer la séance théâtrale dans ses moindres détails ? 
  • Le statut de l’auteur du texte réécrit : qui est l’auteur d’un tel texte ? Quelle position adopte-t-il envers les versions précédentes ?
  • Le statut du texte réécrit : quel est le statut d’un tel texte interstitiel, publié ou non ?

La journée d’études s’axera particulièrement sur la réécriture comme objet, plutôt que sur les questions d’adaptation, d’inspiration ou de réappropriation. Nous voudrions mieux comprendre la spécificité de ce texte intermédiaire (publié ou non), entre le texte-source et la mise en spectacle, entre écriture (narrative ou non) et démonstration théâtrale, et donc la ré-écriture comme concept opératoire pour réfléchir au statut de l’écriture théâtrale contemporaine. Les analyses devraient mener à une meilleure compréhension de la place de certains textes dans le champ belge et stimuler la réflexion autour du statut du « répertoire » théâtral en Belgique francophone et ailleurs. Cette journée d’étude souhaite donc explorer les ré-écritures de textes belges pour le théâtre, soit les ré-écritures effectuées par des auteurs, dramaturges ou metteurs en scène belges. Cependant, des éclairages théoriques sur la question à partir d’œuvres non belges sont également bienvenus. Les propositions de communication sont à adresser aux organisateurs avant le 15 juin 2014. La journée d’étude aura lieu le 14 novembre 2014 à la Maison des Arts de l’ULB. 

 

Contact :

Catherine.bouko@ulb.ac.be

Karel.Vanhaesebrouck@ulb.ac.be