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Images et usages de la wilderness au Canada et aux Etats-Unis (Montpellier)

Images et usages de la wilderness au Canada et aux Etats-Unis (Montpellier)

Publié le par Marc Escola (Source : Anne-Sophie Letessier, Hervé Mayer)

Images et usages de la wilderness au Canada et aux Etats-Unis

Journée d'étude organisée par EMMA (Études Montpelliéraines du Monde Anglophone)

Université Paul-Valéry Montpellier III – Site Saint Charles

12 octobre 2018

 

Inscrite dans les travaux au sein du laboratoire EMMA portant sur l'exploration de l’articulation entre relations de pouvoir et rapports à l’espace, cette journée d'étude propose de développer une approche comparative et multimédiale des constructions culturelles de la wilderness au Canada et aux États-Unis.

Le succès populaire du film Into the Wild (2007), la réédition d’un essai de Henry David Thoreau dans la collection «  Penguin Great Ideas  », ou bien les expositions consacrées à Thomas Cole à la National Gallery de Londres et à Emily Carr à la Dulwich Picture Gallery tendent à donner raison au constat que dresse Peter White dans son introduction à Beyond Wilderness. À « l’ère du soupçon écologique » (Nathalie Blanc, Denis Chartier, Thomas Pughe), les mythes de la wilderness continuent à exercer leur pouvoir de séduction, avec tous les enjeux politiques qui y sont associés. Mobilisée au Canada et aux États-Unis en opposition à la pastorale européenne, la wilderness participe au «  codage national et politique du regard paysager  » (Jean-Marc Besse). Les identités nationales, tel qu’elles sont mises en mots et images dans les anciennes colonies britanniques après leur indépendance, sont à bien des égards «  wilder-centriques  », pour reprendre le néologisme de John O’Brian. Les paysages du Nord canadien et de l’Ouest américain fonctionnent comme des signifiants politiques relevant d’une nationalisation de la nature. Si la formation et les expressions de ces imaginaires répondent à des logiques nationales spécifiques, il reste à s'interroger sur les points de convergence naissant d'une histoire commune de colonisation du continent nord-américain dont ces imaginaires ont émergé.

Dans le champ des études sur l’écocritique postcoloniale, «  étudier les tenants coloniaux/impériaux des pratiques environnementales des pays ‘colonisateurs’ et des pays ‘colonisés’  » (Graham Huggan et Helen Tiffin) amène à s’interroger sur le dualisme, les oxymores et les contradictions qui sous-tendent les mythes de la wilderness. À commencer par l’altérité ontologique de la nature, cette frontière entre écoumène et érème que la wilderness, comme construction culturelle et historique, tend à naturaliser. Héritant des ambivalences du désert biblique, à la fois espace de perdition et de révélation, les mythes de la wilderness ont longtemps été bornés par les pôles du territoire des bêtes sauvages et de la terre vierge à conquérir, deux modalités de rapport à l'environnement qui ont servi la colonisation. Les tentatives de briser ce cadre colonial se multiplient depuis les années soixante dans une production artistique qui s'efforce de sonder, de déplacer et de détourner l’esthétique de la nature sauvage. Il reste donc à s’interroger sur la manière dont ces contre-images et ces contre-récits participent à un «  travail écologique  » de la représentation articulant éthique et esthétique (Nathalie Blanc, Denis Chartier, Thomas Pughe).

Partant de l'idée que les mythes de la wilderness trouvent leur origine dans une matrice intermédiale où arts visuels, littérature et essais se répondent, cette journée d'étude invite à adopter une approche comparative et multimédiale des constructions culturelles de la wilderness au Canada et aux États-Unis. Il s’agira de s’interroger sur les relations entre histoire sociale et politique et l’espace physique naturel dans les contextes étatsunien et canadien. Seront particulièrement appréciées  les  contributions :

  • qui explorent le rôle politique des mythes de la wilderness dans les phénomènes de colonisation et de construction nationale,
  • qui adoptent une approche diachronique sur les transformations ou réécritures de ces mythes depuis les années 1960,
  • qui cherchent à confronter ou rapprocher les imaginaires étatsunien et canadien de la wilderness,
  • qui s’intéressent à la notion de « post-wilderness », soit la fin de la nature tel qu’elle est pensée dans les mythes de la wilderness, dans les dystopies écologiques comme la trilogie MaddAddam de Margaret Atwood par exemple.

Les propositions de communication en français ou en anglais (300 mots) sont à envoyer à Anne-Sophie Letessier (asletessier@gmail.com) et Hervé Mayer (hervmayer@gmail.com) avant le 15 juin 2018.

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Bibliographie indicative:

BENNETT Jane, Thoreau’s Nature: Ethics, Politics, and the Wild, Lanham, États-Unis, Rowman & Littlefield, 2002 [1994]

BLANC, Nathalie, et al. « Littérature et Écologie: vers une écopoétique », Ecologie & Politique, no. 38, 2008, pp. 15–28

BRERETON Pat, Hollywood Utopia: Ecology in Contemporary American Cinema, Bristol, Royaume-Uni, Intellect Books, 2005

BUELL, Lawrence, The Environmental Imagination: Thoreau, Nature Writing, and the Formation of American Culture, Cambridge, Belknap Press of Harvard UP, 1996

CARMICHAEL Deborah A. (dir.), The Landscape of Hollywood Westerns: Ecocriticism  in an American Film Genre, Salt Lake City, États-Unis, University of Utah Press, 2006

CLARK J.F.M., « From the Other Side of the Ocean: Environment and Empire», Canadian Historical Review, vol. 95, no 4, 1 décembre 2014, pp. 574‑84

HUGGAN, Graham, and Helen Tiffin, Postcolonial Ecocriticism: Literature, Animals, Environment, Londres, Routledge, 2010

KAMBOURELI Smaro,  and  Christl  VERDUYN  (eds), Critical  Collaborations: Indigeneity, Diaspora, and Ecology in Canadian Literary Studies, Waterloo, Canada : Wilfrid Laurier University Press, 2014.

NADASDY Paul, « Transcending the Debate over the Ecologically Noble Indian: Indigenous Peoples and Environmentalism », Ethnohistory, vol. 52, no 2, 20 mars 2005, pp. 291-331

O’BRIAN, John, and Peter WHITE (dir.), Beyond Wilderness: The Group of Seven, Canadian Identity and Contemporary Art, Montreal, McGill-Queen’s UP, 2007

PORTER Joy, Native American Environmentalism: Land, Spirit, and the Idea of Wilderness, Lincoln, États-Unis, University of Nebraska Press, 2014

SOPER, Ella, and Nicholas BRADLEY (eds), Greening the Maple :  Canadian Ecocriticism in Context, Calgary, Canada, University of Calgary Press, 2013.

VERMA Manish K. (dir.), Globalization and Environment: Discourse, Policies and Practices, Jaipur, India, Rawat Publications, 2015