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Appels à contributions
Courage/lâcheté (Revue Alkemie, n° 38)

Courage/lâcheté (Revue Alkemie, n° 38)

Publié le par Faculté des lettres - Université de Lausanne (Source : Aurelien Demars)

COURAGE/LÂCHETÉ

Appel à contribution pour le numéro 38 d’Alkemie

Revue semestrielle de littérature et philosophie

Le courage, la modération, la justice et la piété étaient les principales vertus de la philosophie antique. Peut-on encore aujourd’hui parler, comme le faisaient les Grecs anciens, de ces qualités humaines autrement qu’à travers le prisme de l’excellence individuelle ? En d’autres termes, peut-on encore concevoir quelque chose comme l’abnégation, à une époque qui semble être dominée par un secret telos nihiliste, où la vérité est confondue avec le pouvoir, la beauté avec la sentimentalité, et le bien avec la satisfaction personnelle ?

Dans le petit monde, mais universel, de la philosophie antique, le courage pouvait être mis en majuscule, car la nature humaine y était narrée de manière historique, et non autobiographique. Aujourd’hui, dans ce grand monde globalisé, il semble quelque peu indécent de parler non seulement de courage, mais aussi des vertus dans leur ensemble, ce qui explique, probablement, pourquoi Alasdair MacIntyre a intitulé son livre de théorie morale After Virtue (1981). Aristote et Épicure avaient des conceptions légèrement différentes du courage : le premier le plaçait entre la lâcheté et l’imprudence, tandis que le second le considérait comme une qualité nécessaire pour atteindre le bonheur. Entre-temps, il se peut que nous ayons perdu la capacité de voir le tableau du monde en termes généraux, même s’il reste parmi nous assez de modérés aristotéliciens et d’hédonistes épicuriens qui s’ignorent.

Cependant, l’idée de courage ne peut disparaître, car elle fait partie des thèmes fondamentaux de l’humanité. Bien sûr, elle peut actuellement ne se manifester que dans le registre mineur du biographique. Quoi qu’il en soit, le courage implique une lutte, même si, contrairement au spectacle de l’adversité antique où les hommes affrontaient des forces transcendantales gigantesques, ils savent maintenant qu’ils doivent produire eux-mêmes un spectacle où ils font face à des obstacles et des épreuves qui semblent surgir de nulle part. Une conséquence malheureuse, mais que l’on pourrait qualifier d’inévitable, est qu’aujourd’hui nous n’attendons plus de la communauté qu’elle valide notre courage. Les choses peuvent aller encore plus loin, jusqu’à la sensation que les gens devraient faire preuve de courage même contre leur propre communauté.

Ces changements semblent marquer la transition d’une approche philosophique générale à une approche psychologique particulière. Ainsi, le courage tend à être perçu comme une entité mesurable, correspondant à la peur ressentie par une personne entreprenant une action risquée. Il n’est toutefois pas certain que le problème puisse être mieux clarifié en partant du particulier plutôt que du général, car le courage se rapporte à la part universelle de chacun, donc aux possibilités des gens ordinaires, et non à des traits inhérents aux personnes exceptionnelles. Après tout, un comportement est courageux s'il est déclaré comme tel par d’autres, et il est absurde de penser qu'il puisse s’acquérir comme n’importe quelle autre compétence.

Les approches philosophiques ne manquent pourtant pas. Chez l’antique Platon, le thumos, la seconde partie de l’âme, après la rationnelle et avant l'appétitive, était la source du courage, du sens de l’honneur et de la colère. De même, dans le récent ouvrage de Fukuyama, Identity: The Demand for Dignity and the Politics of Resentment (2018), qui ajoute le concept hégélien de reconnaissance à cette problématique, c’est toujours le thumos qui explique les phénomènes actuels tels que le nationalisme et le conflit. Il reste à décider si les principes fondamentaux de l’éthique, tels que le courage, la justice, etc., sont périssables ou s’ils ont une durée de vie illimitée. Enfin, si à l’avenir quelqu’un se proposait encore d’écrire quelque chose ayant comme titre Traité de morale, comprendrait-il le premier terme comme un nom ou comme un adjectif ? – Răzvan Enache

Les articles, inédits et en langue française, sont à envoyer jusqu’au 1er juin 2026. Les textes doivent être transmis au comité de rédaction, aux adresses info@revue-alkemie.com et mihaela_g_enache@yahoo.com (en format Word, 30 000 à 50 000 signes maximum, espaces comprises). Les normes de rédaction et autres indications aux auteurs sont précisées sur le site de la revue (http://www.revue-alkemie.com/_03-alkemie-publier.html).

 Outre votre contribution, nous vous prions d’ajouter, d’une part, une courte présentation bio-bibliographique (400 signes environ) en français, et, d’autre part, votre titre, un résumé (300 signes environ) et cinq mots-clefs en anglais et en français.

Date limite : 1er juin 2026.

Site de la revue Alkemie : http://www.revue-alkemie.com

Directrice : Mihaela-Genţiana STĂNIŞOR (mihaela_g_enache@yahoo.com)