
ll s'agit de prendre le récit de l'art à rebours. Les œuvres, considérons-nous, sont faites pour être montrées de la façon la plus large possible, mais, durant des millénaires, il n'en a pas été ainsi. C'est une histoire de la dissimulation voulue des œuvres, et de la force qu'elles acquéraient en étant tenues éloignées d'une admiration constante, qui est tentée dans cet ouvrage.
L'enquête part du texte de Bataille, Lascaux ou la Naissance de l'art (1955). Elle se poursuit en Égypte, puis à Byzance et en Occident au Moyen Âge. La Renaissance y tient une place majeure avec Van Eyck, Lotto, Giorgione, Titien, Raphaël (La Fornarina) et Léonard - derrière La Joconde aurait dû se trouver une version avec le modèle nu. L'essai examine les collections du XVIIᵉ siècle, où les tableaux étaient protégés par des rideaux, les « boudoirs » du XVIIIᵉ, où l'on conservait les œuvres aux sujets indiscrets de Watteau, de Boucher, de Fragonard. Il chemine par les musées, où l'on prit des précautions pour que le grand pubtic ne voie point d'œuvres qui puissent choquer, et se conclut par L'Origine du monde, de Courbet, tableau qui fut accroché, avant son arrivée au musée d'Orsay, soit dans des pièces intimes de demeures privées, soit derrière un rideau ou diverses peintures - jusqu'au « cache » d'André Masson, beau-frère du psychanalyste Lacan qui fut le dernier propriétaire de l'œuvre.