Depuis qu’elles sont disponibles « à la demande », sur tous les écrans, les séries ont colonisé nos vies. Accessibles tout le temps et partout, elles remplissent les moindres temps morts et nous permettent de « déconnecter » après une journée de travail, tout en s’invitant dans nos conversations et en construisant nos imaginaires.
Ce phénomène, qui touche toutes les classes sociales, tous les âges, tous les niveaux culturels et toutes les sensibilités politiques, est indissociable d’une infrastructure numérique qui dégrade nos manières de vivre et de penser : diminution de l’attention et du temps de sommeil, surcharge informationnelle, surexcitation, consumérisme, etc. Si les séries sont à ce titre l’objet et la forme de notre époque, elles sont pourtant restées sous le radar de la critique – les « intellectuels » préférant réhabiliter ce genre supposé mineur, le parant de toutes les vertus, et non des moindres : instrument d’émancipation politique, refuge de la création esthétique et même outil thérapeutique.
Cet essai prend l’exact contrepoint de ces discours et développe une critique radicale des séries. En croisant réflexions sur le temps libre, la fiction, l’imaginaire, l’histoire et l’économie de l’attention, il rend compte des effets délétères de ce « passe-temps » sur nos existences, trop pleines, ou plus exactement vides à craquer.
Bertrand Cochard est agrégé et docteur en philosophie. Il enseigne la philosophie esthétique à l’école municipale d’arts plastiques de Nice (Villa Thiole). Il a récemment publié Guy Debord et la philosophie (Hermann, 2021), préfacé par Étienne Balibar.
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