Salah Ameziane, Romans algériens au tournant des XX et XXI siècles. Une littérature au-delà de l’imminence
Que peut la littérature face aux situations extrêmes ? Que peut-elle face à l’accélération de l’Histoire ?
Ces questions conduisent ce livre qui analyse l’expérience historico- littéraire algérienne post-1989. Mesurée à une condition impérieuse, la forme romanesque propose des réponses narratives pour inscrire et surtout extraire cette épreuve de toute clôture. L’écriture s’éprouve à absorber l’événement, à aliéner sa violence, réévaluant ainsi la vertu de la trace et l’apport du filtrage littéraire. Cette riposte livresque offre une texture au présent, façonne sa mémoire immédiate. Elle est éminemment contemporaine dans la mesure où elle se confronte à l’obscurité de son époque.
Adoptant de nombreuses strates narratives, les oeuvres étudiées convoquent l’Histoire passée, tissent la trame d’un épilogue tragique : la terreur intégriste. Dans un jeu de miroirs constant qui séquence et littérarise la trajectoire du pays, replacée dans sa longue durée, les écrivains comblent les béances de la mémoire collective pour contrarier l’écueil du repli, le péril de l’amnésie. Ainsi, dans la démarche créative se prolonge un besoin réflexif.
Dans cette rétrospection romanesque, le parcours historique épouse le réexamen narré du cheminement culturel du pays. Plus qu’une connaissance subjective du passé, la mémoire cultivée par les auteurs s’avère source de résistance-résilience, convertissant les discontinuités vécues en chance d’adaptation, dans un effort de recouvrement ouvert à l’altérité comme enjeu essentiel. La “greffe francophone” se découvre nourrie et assainie, car, au-delà de sa précieuse contribution, le roman sollicite et reconsidère son antériorité et ses filiations, revendiquées et légitimées.
Table des matières
Préface, par Christiane Chaulet Achour
Introduction générale
PREMIÈRE PARTIE
Comment les romans écrivent-ils la tragédie des années 1990 ?
CHAPITRE I
Clés d’entrée dans un contexte urgent et inédit
1. Un événement qui structure le présent algérien
2. Une couverture médiatique déficitaire
3. Des fictions face à l’effraction du réel
4. La quête d’une modernité de l’écriture
5. Vers une perspective chroniqueuse
CHAPITRE II
Le roman face à l’immédiateté : inscrire la violence
1. De la flânerie à la mise en récit du vécu
2. Des faits attestés à la fiction
3. La part de la chronique
4. Le reportage au service du roman.
CHAPITRE III
Des romans qui captent les collisions de la société
1. Des romans dans l’espace urbain
2. La mise en scène de l’écriture
Conclusion
DEUXIÈME PARTIE
Le recours à l’histoire passée : transmission et mise en miroir
Introduction
CHAPITRE I
Quête d’antériorité et besoin de profondeur
1. Des récits anciens pour une mise en perspective
2. La période coloniale : des faits et des mémoires
CHAPITRE II
Convoquer et actualiser lem moments fondateurs
1. Mai 1945, du massacre au tournant politique
2. La Guerre de Libération Nationale (1954-1962)
3. 1962, une indépendance névralgique ?
CHAPITRE III
Recouvrement littéraire de la post-indépendance
1. Une relecture générationnelle de la période médiane
2. 1962-1992 : entre silence et renoncement
Conclusion
TROISIÈME PARTIE
Revisitation littéraire de l’algérianité culturelle
Introduction
CHAPITRE I
Désir d’ancrage : rétablir le lien généalogique
1. Éclairer et assainir l’appartenance arabo-berbère
2. Réparer les généalogies brimées
3. L’oralité, entre généalogie et littérature
CHAPITRE II
Des fictions biographiques pour rééxaminer la fracture coloniale
1. Reconsidérer la “greffe française” en Algérie
2. Rétablir les pères vaincus
CHAPITRE III
Dynamiser les filiations littéraires
1. L’écrivain et ses parentés
2. Féconder les écritures algériennes
Conclusion
CONCLUSION GÉNÉRALE
Bibliographie.