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Retour à Œdipe et le Sphinx : Sophocle au XIXe siècle, Ingres et Gustave Moreau. Conf. de P. Absalon et L. Marzouk (Séminaire TIGRE, ENS Paris & en ligne)

Retour à Œdipe et le Sphinx : Sophocle au XIXe siècle, Ingres et Gustave Moreau. Conf. de P. Absalon et L. Marzouk (Séminaire TIGRE, ENS Paris & en ligne)

Publié le par Marc Escola (Source : Evanghelia Stead)

Patrick Absalon, Ingres, inventeur de l’Œdipe moderne

    Les images d’Œdipe de la période néoclassique donnent à voir, principalement, la version d’une figure de théâtre, qui emprunte ses motifs aux tragiques grecs et à Sénèque, ou à leurs traducteurs mo--dernes. La proposition ingresque de montrer un épisode du mythe qu’on ne voit jamais sur la scène bouleverse la réception de la légende. Inspiré de l’Antiquité dans les formes, l’Œdipe du peintre montalbanais n’est cependant pas uniquement le résultat d’une transposition formaliste du passé. Il semble s’inscrire également dans une certaine idée de la modernité.
    En effet, le tableau d’Ingres, aujourd’hui au Louvre, Œdipe explique l’énigme du Sphinx, l’un de ses envois de Rome pour l’année 1808, intervient comme une grande nouveauté dans l’intelligence du mythe. Le peintre renouvelle l’image du héros en l’opposant au grotesque et instille le paradoxe d’une « profanée anatomie », comme l’écrit le peintre et théoricien André Lhote en 1921, en donnant au corps du héros la forme signifiante du mythe-même.
    La popularité de cette image est immense et fait l’objet de très nombreuses interprétations durant toute la période contemporaine. Si le tableau d’Ingres ne dit pas grand chose, évidemment, de ce que sera l’invention du complexe d’Œdipe, c’est pourtant sa reproduction, sous la forme d’une photo-graphie, que Freud accroche au-dessus de son divan dans son cabinet viennois.

Lise Marzouk, Un sphinx peut en cacher un autre : Les sphinx de Gustave Moreau à l’épreuve de l’interprétation
  
Du célèbre tableau Œdipe et le Sphinx qui résonna comme un coup de tonnerre au Salon de 1864, écrivains, peintres et critiques d’art, dont Gustave Moreau lui-même, ont dit bien des choses : représentation du dualisme entre l’esprit et la matière, allégorie de la lutte des sexes, figure de l’homme ou de l’artiste face à son destin, la liste n’est pas exhaustive. Toutes ces interprétations ont en commun d’avoir cherché à expliquer le symbolisme du sphinx, érigeant, par identification spéculaire, le spectateur en Œdipe déchiffreur. En nous appuyant sur les multiples représentations du sphinx dans l’œuvre de Moreau, nous nous interrogerons sur les limites de cette approche. Ce tableau, dans sa richesse formelle et herméneutique, ne nous inviterait-il pas précisément à changer notre regard ? À peinture énigmatique, ne pourrait-on imaginer critique sphinxiale ?