"Portrait de Sartre en Descartes". Conf. Camille Riquier (séminaire "L'écriture de la pensée" org. par F. Noudelmann & B. Clément, en Sorbonne & en ligne)
La prochaine séance du séminaire se tiendra
vendredi 10 mars de 15:00 à 17:00
Exceptionnellement, cette séance se déroulera uniquement en visio. Vous pourrez - si toutefois les circonstances le permettent - nous rejoindre physiquement à la Sorbonne (Escalier I - i majuscule - 2e étage, salle de la bibliothèque du 19e siècle, entrée par la rue de la Sorbonne, la rue Saint-Jacques ou la rue Cujas); il suffira pour nous rejoindre d'activer ce lien ce lien:
https://nyu.zoom.us/j/95528295531
Nous aurons ce jour-là le plaisir de recevoir Camille Riquier qui dressera le
« Portrait de Sartre en Descartes »
« J’ai toujours conçu mes écrits non comme des productions isolées mais comme s’organisant en une œuvre » confie Sartre dans ses Carnets de la drôle de guerre. Il le redira. Comprenons qu’un désir d’œuvre, le désir d’écrire une œuvre l’a animé tout au long de sa carrière d’écrivain et semble avoir exercé, dans son esprit, le rôle d’une cause finale. Plusieurs raisons portent à croire qu’il n’y soit pas parvenu. Sartre multiplie les registres d’écriture et publie des essais de philosophie (L’Être et le Néant, Critique de la Raison dialectique, etc.), des romans (La Nausée, Les chemins de la liberté, etc.), des pièces de théâtre (Huis clos, Morts sans sépulture, Le Diable et le Bon Dieu, etc.), ainsi qu’un nombre considérable d’articles de circonstance (Situations). Quel est le lien ? Davantage : Sartre laisse derrière lui d’innombrables pages de copie inaboutie. Des projets longtemps muris sont abandonnés sans état d’âme, arrêtés par la fatigue ou à cause de l’impasse où il a le sentiment d’être conduit. L’ambition initiale qu’il avait de créer une nouvelle morale accumule ainsi les échecs et multiplie les détours. Et pourtant, si l’acte d’écrire apparaît naturellement devoir aboutir à faire (une) œuvre, c’est ce mouvement que nous avons cherché à accompagner jusqu’à son terme. Brosser le portrait de Descartes en Sartre ou de Sartre en Descartes, c’était reprendre la trame des Méditations métaphysiques de Descartes et agencer, grâce à elle, les textes disparates de Sartre dans l’espoir de leur donner l’unité et la cohérence d’un « tout noétique ». Le choix de Descartes comme modèle de recomposition des textes n’a d’ailleurs rien d’une hypothèse gratuite, tant celui-ci semble avoir été le miroir admirable dans lequel Sartre avait projeté, à 20 ans déjà, le récit de sa gloire future d’écrivain à qui l’immortalité était promise.
Camille Riquier est professeur à l’Institut catholique de Paris et doyen de la Faculté de philosophie. Lauréat de l'Académie française pour son ouvrage Archéologie de Bergson (PUF, 2009, « Quadrige », 2021), il est spécialiste de phénoménologie et de philosophie française. Travaillant à restaurer la continuité d’une certaine tradition réflexive cartésienne, il est l'auteur de Philosophie de Péguy ou les mémoires d'un imbécile (PUF, 2017) et, récemment, de Métamorphoses de Descartes. Le secret de Sartre (Gallimard, 2022). Il est membre du comité de la revue Alter et Philosophie ainsi que de la revue Esprit. Il a également publié un essai intitulé Nous ne savons plus croire (DDB, 2020).