Séminaire de doctorants de l’unité de recherche THALIM
Année 2022-2023
« Postures périphériques : se mettre à la marge dans les arts et la littérature modernes (XIXe-XXIe siècle) »
Organisé par Adrien Bodiot, Hector Jenni et Antoine Poisson
En littérature, la notion de « posture » permet de penser la manière dont un auteur négocie un positionnement artistique à partir d’une position dans un espace donné. Elle a été développée par Jérôme Meizoz (2007, 2011), double héritier des travaux de la sociologie du champ littéraire de Bourdieu (1992) et de l’analyse du discours de Maingueneau (2004) et Amossy (1999, 2010). L’étude des postures d’écrivains fait ainsi tenir ensemble les apports de la sociologie de la littérature et de la rhétorique littéraire. Dans ce cadre, la figure qu’un auteur présente de lui-même dans ses œuvres n’est pas la pure reproduction de sa position sociale dans un champ donné, mais résulte d’une prise de position active qui en reconfigure la portée et l’interprétation, notamment dans la production d’une persona et d’un ethos.
Mis en lumière par Pascale Casanova (1999) et Franco Moretti (2000) à la faveur des premiers travaux sur la littérature mondiale, le couple conceptuel centre/périphérie est devenu un paradigme usuel des études littéraires. Bien qu’éminemment pluriel, polyforme et relatif, il donne à penser les rapports et les connexions que peuvent entretenir les littératures et les acteurs entre eux. Sans nier les critiques adressées à ces notions – et notamment le risque d’essentialisation négative de certaines littératures – nous nous proposons d’observer comment des auteurs en position de périphérie – littéraire, sociale, spatiale, genrée ou raciale – construisent dans leurs textes comme dans leurs interventions publiques des postures qui (re)positionnent leur image dans l’espace culturel auquel ils appartiennent. Il s’agira de voir, à travers l’étude d’exemples divers tirés de corpus littéraires surréalistes, coloniaux et postcoloniaux, des littératures et médias de masse, ou encore de la chanson et du rap, comment la position périphérique d’un auteur, loin de le condamner à la servilité ou au silence, lui donne au contraire l’occasion de négocier une prise de position dans l’espace public, en produisant une image de soi propre à renverser, rétablir ou reconduire certains rapports de pouvoir.
Le séminaire s’appuiera sur des approches interdisciplinaires qui pourront emprunter à l’histoire littéraire, la sociologie de l’art, l’analyse du discours, la rhétorique et la stylistique, et s’appuiera sur certains objets et concepts déjà largement instruits par ces disciplines (champ, discours social, posture, persona, ethos). Ces séances de recherche donneront ainsi l’occasion aux doctorants du laboratoire THALIM de présenter et discuter leurs travaux en cours.
Programme
Séance 1 (13 février) :
Aux marges du champ littéraire : réinventer la posture d’auteur (XIXe-XXIe)
Catherine Ménager : « La parrêsia ducampienne : artifice ou athenticité ? »
Quentin Morvan : « Les ambiguïtés de l’auctorialité volodinienne : entre déconstruction du mythe de l’auteur et dépossession agentive »
Beatrice Latini : « La marginalisation des autrices sur TikTok »
Modératrice: Aline Marchand
17h-19h, Maison de la recherche, Salle Mezzanine
Séance 2 (20 mars)
Périphérie des lieux, périphérie des voix : approches écopoétiques en contexte africain
Marie Pernice : « La voix des profondeurs : raconter les mondes souterrains africains »
Margaux Vidotto : « Du vivant entre les lignes »
Modératrice : Céline Gahungu
17h-19h, Maison de la recherche (salle à définir)
Séance 3 (17 avril)
L’héritage surréaliste d’après-guerre : vers un surréalisme « à la marge » ?
Déborah Duvignaud : « Écrire à distance : Annie Le Brun »
Corentin Bouquet : « “Les ratés de l’aventure” : retour sur les années noires du surréalisme (1946-1959) »
Modératrice : Émilie Frémond
17h-19h Maison de la recherche (salle Mezzanine)