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Traduire-Réécrire les classiques grecs et latins au XXIe s. (Séminaire 2022-2023 du T.R.A.C.T., Sorbonne-Nouvelle)

Traduire-Réécrire les classiques grecs et latins au XXIe s. (Séminaire 2022-2023 du T.R.A.C.T., Sorbonne-Nouvelle)

Publié le par Marc Escola (Source : Sarah Montin)

Cycle de séminaires 2022-2023 du T.R.A.C.T. (Sorbonne-Nouvelle) :

Traduire-Réécrire les classiques grecs et latins au XXIe siècle

Depuis le début du XXIe siècle, on constate un regain d’intérêt pour la traduction des poètes et dramaturges grecs et latins. La traduction que l’universitaire Emily Wilson fait de l’Odyssée en 2017 est saluée par la critique ; en 2016 paraît de manière posthume un des plus beaux extraits de l’Énéide, traduit par Seamus Heaney ; en 2009, dans An Oresteia, la poétesse Anne Carson  fait jouer trois points de vue sur la tragédie des Atrides en retraçant les récits d’Eschyle, de Sophocle et d’Euripide. Des adaptation se succèdent: ainsi Simon Armitage qui, dans The Odyssey : A Dramatic Retelling of Homer’s Epic (2007), relate le périple d’Ulysse, ou bien encore Alice Oswald dans Memorial (2011),  où chaque protagoniste de la guerre de Troie est amené à prendre la parole et où scènes de guerre alternent avec évocations de quiétude agricole. 

Traductions, versions, imitations, hommages, adaptations et réécritures traductives, le monde classique n’a de cesse  d’inspirer les traducteurs spécialistes, mais surtout les poètes et dramaturges contemporains. Comment expliquer l’engouement pour la retraduction – voire la réécriture – des classiques grecs et latins ? La fin du XXe siècle voit déjà un intérêt pour ces récits : du travail de Ted Hughes en passant par la représentation magistrale de The Oresteia, pièce traduite par Tony Harrison et jouée au National Theater en 1983, ou bien encore Omeros de Derek Walcott en 1990, etc. Malgré toutes les traductions et appropriations traductives, versions et « recontextualisations », la source ne se tarit pas, bien au contraire. 

Pourquoi donc retraduire ces classiques alors que le cursus grec et latin s’essouffle? Certains traducteurs qui ne connaissent ni le grec, ni le latin s’attellent à la tâche d’amener ces grands textes jusqu’au public contemporain en travaillant à partir d’une traduction intermédiaire… mais quel est le statut de leur travail de recréation traductive ? L’obstacle que constitue la langue et la – probable – diminution du nombre de lecteurs capables de lire poèmes et prose dans la langue source ont-il pour effet de libérer l’entreprise traductive ? Peut-on repenser la nature du lien entre les traductions canoniques, utilisées dans les salles de classe, et les traductions plus créatives, ces « free standing translations » comme les appelle Barbara Folkart ? Certaines adaptations relèvent  de la réécriture : dans Brand New Ancients (2013), Kate Tempest tisse sa trame d’écrivaine-performeuse en allant puiser, dans le monde des anciens, des paradigmes mythiques ; très régulièrement paraissent des œuvres littéraires – « retellings » – qui retracent voire subvertissent la trame du texte source en la remodelant. Peut-on considérer que ce sont là des formes extrêmes de traduction? Comment la traduction peut-elle se décliner en une « version » (Simon Armitage, Still, 2016), adaptation ou transmutation ?  Ces écrivains-traducteurs ne bousculent-ils pas, à force, la notion même de traduction, n’en délient-ils pas le sens en posant la question du rapport entre traduction et littérature ?  Enfin ce travail de traducteur qui les immerge dans l’univers littéraire d’un autre n’agit-il pas sur leur propre élan créatif ? Dans Piecing Together the Fragments: Translating Classical Verse, Creating Contemporary Poetry (2013), Josephine Balmer explore les rapports qui lient la traduction et l’expression littéraire. Ses restitutions des poèmes de Catulle en anglais moderne s’accompagnent d’une réflexion théorique poussée sur sa propre démarche, mais il existe bien d’autres paratextes – essais, préfaces et postfaces, podcasts et documentaires, qui viennent éclairer les raisons qui poussent un auteur ou traducteur contemporain à traduire une œuvre si éloignée dans le temps : fascination langagière pour l’écriture de l’autre ?  Intérêt pour les enjeux profondément humains, culturels et sociaux qu’abordent ces œuvres ? Désir de réinvestir et de recontextualiser certaines de ces œuvres parce qu’elles ouvrent la voie à  la réflexion, parce que quelque chose en elles permet de faire bouger les lignes – on pense à des retraductions plus féministes ou postcoloniales. En définitive, traduire et retraduire, n’est-ce pas toujours un peu ébranler et augmenter le capital intellectuel et le capital humain ? 

Les séminaires auront lieu, comme d'habitude, le jeudi de 17 heures 30 à 19 heures (à la Maison de la Recherche et sur Zoom) aux dates suivantes (des changements de date sont toutefois possibles selon la disponibilité des intervenants et le calendrier universitaire 2022-2023): 

10/11/2022:  Josephine Balmer (poet, translator, academic) : “In the borderlands without a map: navigating a personal path between classical translation, versioning and poetry”

15/12/2022: Paschalis Nikolaou (Ionian University): “On Liminal Translation: Recent Cases of Refiguring the Classics” 

26/01/2023: Astrid Van Weyenberg (Leiden University): "African Adaptations of Greek Tragedy: Canonical Counter-Discourse”

 23/02/2023: Sarah Annes Brown (Anglia Ruskin University): “Ovid and the Anthropocene”

23/03/2023 : Salomé Paul (Trinity College, Dublin): "The City of (In)Justice: Troy on the Contemporary Stages"

20/04/ 2023: Peter Fallon (poet, translator, editor, publisher): “Aim and Inspiration: Honour the Original” 

08/06/2023: Robin Wakefield (translator): “Translating Ancient Greek Prose”

15/06/2023: Vanda D. Zajko (Bristol University):  “Translation of the Classics and Contemporary Mythmaking : Anne Carson and Simon Armitage”.