Revue
Nouvelle parution
RSH, n° 347, juillet-septembre : Refaire monde

RSH, n° 347, juillet-septembre : Refaire monde

Publié le par Alexandre Gefen (Source : Alexandre Gefen)

Refaire monde : Revue des Sciences HumainesN° 347/juillet-septembre 2022

Sous la direction d'Alexandre Gefen et Pamela Krause

Accueillante et commune, riche de résonnances poétiques et d’un sémantisme heureux, l’idée de monde emporte pourtant avec elle bien des débats philosophiques contemporains virulents : faut-il abandonner définitivement le monde comme geste de totalisation de passé comme le font les « nouveaux réalistes » en proclamant avec Markus Gabriel que « le monde n’existe pas » ? Faut-il voir dans le mot monde un geste d’arraisonnement dangereux par l’humain des ressources naturelles et des autres vivants ? Ce que le concept de monde suppose comme organisation et comme lisibilité peut-il résister aux sciences modernes attentives aux systèmes complexes et à l’imprévisibilité du monde microscopique ? Le chant du poétique de l’harmonie relève-t-il d’un lyrisme suranné ? Doit-on s’inquiéter de l’origine occidentale du concept et de l’emprise qu’il exercerait sur d’autres manières de faire monde ? Bref, le concept peut-il survivre aux critiques écologiques et postcoloniales comme aux réfutations des ontologies pluralistes ? Telles sont quelques-unes des questions que voudra traverser ce volume, où la puissance d’attraction du mot sera mise en regard avec ses périls, où une réflexion sur l’épaisseur historique du mot permettra de comprendre les débats terminologiques contemporains.

Il est vrai que, dès l’Antiquité, le mot monde engage quelque chose d’un rapt : celui d’une totalité ontique que l’opération de « mondation » vient instaurer. L’élaboration millénaire de cosmogonies et de cosmogénèses satisfait le fantasme d’une saisie absolue du monde, allant jusqu’à saisir le miracle même de son apparition. Dès les âges anciens, les cosmographies décrivent (graphein) le monde, le dissèquent en structures, en régions, mesurent les rapports entre ses éléments constitutifs. La géographie étale le monde sous le regard, en fixe les distances, les frontières. Les discours cosmologiques (pour reprendre les analyses qu’en fait Rémi Brague) portent le monde à une expression réflexive, interrogeant son « être » propre par nombre de philosophes. Cet ensemble de savoirs est traversé par un désir double : il vise à rendre compte de la richesse d’une diversité harmonieusement tournée vers l’unité. La musicalité propre au récit (mythologique, romanesque, philosophique), au vers poétique, au concept s’acharne à faire résonner une multiplicité refusée au chaos. L’idée de monde implique en effet, dès sa naissance en contexte grec, un principe d’intelligibilité subsumant chaque partie du tout …

Sommaire :

  • Refaire monde.... Alexandre Gefen, Pamela Krause

Pratiques

  • Le monde comme horizon des horizons dans la phénoménologie et la poésie moderne. ............ Michel Collot
  • De la destruction à la création : le monde dans le poème en versets.................... Stéphanie Hage
  • Notes sur le bleu du ciel par temps de confinement ... Christian Doumet
  • Le monde du romantisme allemand à la lumière d'Empédocle et de Chrysippe........... Guillaume Dreidemie
  • Temps universel et idée du monde dans trois romans-monde français .............. Laude Ngadi Maïssa
  • Obligé du monde, obligé de Gaïa.......... Jean-Claude Pinson
  • La Nostalgie du Monde ou l'anthropologie théâtrale de Jerzy Grotowski en quête de l'Origine..................Samuel Lhuillery

Questionnements

  • Les généalogies du « Monde ».......... Jason Hong
  • Le Tout-monde d'Édouard Glissant : une chaosthétique romanesque ............. Aliocha Wald Lasowski
  • Entre « littérature-monde en français » et « tout-monde » ... Jean-Marc Moura