Écrire la nature, imaginer l'écologie. Pour Pierre Gascar
Pierre Schoentjes
Droz, 2021
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25,60 CHF
216 p.
ISBN-13: 978-9-070-18932-7
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En juin 1972 Le Monde consacre un dossier spécial à « Littérature et pollution ». L’occasion est fournie par la Conférence de Stockholm, qui établit les bases de la gouvernance mondiale de l’environnement. Quelques mois plus tard paraît en France le premier numéro de La Gueule ouverte. Mensuel écologique, à travers lequel Pierre Fournier, dessinateur libertaire et antinucléaire venu d’Hara Kiri, tente de sensibiliser ses amis gauchistes à l’écologie. C’est au même moment que Pierre Gascar publie Le Présage, un recueil de récits intégralement consacré aux lichens. Gascar, qui dans la décennie qui entoure 1972 fait paraître ses livres majeurs, choisit de voir dans la disparition de ces organismes extrêmement sensibles à la pollution le signe de la détérioration de l’environnement. Avec ce livre, il place l’écologie naissante au cœur de la littérature la plus exigeante.
Ironiquement, c’est au moment où Gascar fait résonner ce que nous considérons aujourd’hui comme un enjeu de société majeur, qu’il va progressivement tomber dans l’oubli. L’estime de Kenzaburo Ôé, des dizaines de livres publiés chez Gallimard, un Prix Goncourt remporté en 1953 et le Grand Prix de l’Académie obtenu en 1969 n’y changeront rien, pas plus qu’un engagement social généreux qui date du Front Populaire. Gascar s’est effacé de nos mémoires, balayé par l’esthétique des Nouveaux Romanciers avec lesquels il entretenait pourtant un dialogue fertile. Ignoré par un monde littéraire longtemps indifférent à l’écologie.
Cinquante ans après l’année qui constitue le moment pivot marquant la prise de conscience environnementale, il est temps de lire enfin Gascar. Son imaginaire, qui doit autant à une sensibilité pour la nature remontant à une enfance campagnarde qu’à une révolte face à la manière dont l’homme maltraite l’environnement, résonne aujourd’hui avec d’autant plus de force qu’elle est portée par une écriture des sens particulièrement apte à faire voir le monde dans sa matérialité.
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SOMMAIRE
INTRODUCTION. NOUS N’AVONS QU’UNE TERRE
Littérature et pollution
Un Prix Goncourt parmi d’autres ?
CHAPITRE 1. « EN NOMMANT LE MONDE, ON NE COURT GUÈRE LE RISQUE DE MAL ÉCRIRE. » LE « RÉALISME »
Un réalisme en évolution
Transfigurer le réel
La pratique de la description
Le dialogue avec le Nouveau roman
Abandonner le symbole pour dépasser l’humanisme
CHAPITRE 2. L’ESPOIR SOCIAL DANS UN MONDE D’OÙ LE PAYSAGE SE RETIRE. LA HAINE ET LA PEINE
La pauvreté de la haute époque
Nature, monde concret et écriture
La haine et la peine des hommes
Espoir social et conscience écologique
CHAPITRE 3. UNE IMMENSE COMMUNION. PRATIQUES ET INFLEXIONS DE L’UNANIMISME
Un état de symbiose
L’unanime : l’homme dans la nature
De l’unanimisme à la conscience écologique
CHAPITRE 4. NOUS SOMMES À LA LISIÈRE. L’HOMME ET L’ANIMAL
On tuait beaucoup d’animaux
La chasse et la mort d’un animal
Le croc et la dent
Des espaces réservés ou un monde hanté
CHAPITRE 5. L’ACTION ÉCOLOGIQUE. UN SURPLUS DE CONSCIENCE
Présence réelle de la nature
Un observateur de la nature campagnarde
Changer la couleur de l’horizon
L’éc-eau-logie et le politique
Un gros chêne habité
CONCLUSION. LA DÉFENSE DES BIENS NATURELS ALTÉRÉS
Les mauvaises raisons d’un oubli
Un « vert » difficile à racoler
APPENDICE. PIERRE GASCAR : VIE ET OEUVRE
ABRÉVIATIONS DES OEUVRES DE PIERRE GASCAR CITÉES
BIBLIOGRAPHIE
REMERCIEMENTS DE L’AUTEUR
INDEX