Colloques en ligne

Jean-François Courouau

Ruptures baroques et fondation : Pierre Godolin et la littérature de langue occitane

1Du point de vue de l’histoire littéraire, le  baroque représente une rupture avec la période précédente, la Renaissance (Dubois 1969, I, 154-155). À un autre niveau, l’œuvre baroque elle-même repose sur une succession de ruptures internes, selon les observations de Jean Rousset, au point de provoquer un sentiment « d’inapaisement, de continuelle remise en question des résulatts obtenus, de poursuite haletante d’un point d’équilibre toujours différé, qui nous oblige à trouver notre plaisir non point dans le repos des forces enfin recueillies, mais dans cette poursuite même, dans le mouvement mêlé de ruptures qui la compose » (Rousset 1953, 233). La rupture se situe aussi entre les auteurs eux-mêmes qui participent de cette esthétique. Ce sont ces ruptures en gigogne qu’on se propose d’explorer ici.

2Appliquée à la littérature de langue occitane de la période baroque, la notion de rupture pourrait concerner plusieurs auteurs majeurs. Si on s’en tient au xvie siècle, il est clair que les forgeries de Jean de Nostredame (1575) représentent, du point de vue de la visibilité de la littérature médiévale occitane en France, une charnière. Entre xvie et xviie siècle, on pourrait s’intéresser aussi aux œuvres lyriques de Louis Bellaud de La Bellaudière ou de Bertrand Larade, premiers auteurs de langue occitane, respectivement de dialecte provençal et gascon, à arrimer la poésie occitane au train européen de la poésie d’inspiration néo-pétrarquiste. L’œuvre du poète Pierre Godolin (1580-1649) mérite qu’on l’examine selon un angle qui permet non seulement de dégager ce en quoi elle est porteuse d’innovations mais aussi de déterminer en quoi ces nouveautés s’inscrivent dans un ensemble de continuités sans l’examen desquelles il n’est guère possible de déterminer l’apport en termes de « rupture » réalisé par le poète toulousain. L’analyse, déjà entamée selon une perspective quelque peu différente par Robert Lafont (1970), ne peut cependant être menée sans poser certains prolégomènes méthodologiques destinés à en garantir l’efficacité.

3L’œuvre de Godolin est, on le sait (Pic 1983), la plus imprimée, la plus rééditée, la plus diffusée, en un mot la plus lue de toute la littérature de langue occitane antérieure à la fondation du félibrige par Mistral. Du vivant de l’auteur, cette œuvre a été publiée dans plusieurs recueils successifs, réunis sous le titre englobant de Ramelet moundi. Ces différentes éditions, régulièrement augmentées à partir de la première (1617), constituent les jalons (1621, 1637, 1638, 1647-1648) entre lesquels des publications éparses viennent prendre place. Les deux éditions de Jean-Baptiste Noulet (1887) et de Philippe Gardy (1984), à défaut d’offrir une traduction d’un texte particulièrement difficile à rendre en français en raison d’un recours particulièrement fréquent à la polysémie1, permettent de prendre la mesure d’une production qui se signale au premier chef par son abondance et sa diversité. La carrière poétique elle-même de Godolin est longue. En théorie, elle s’étend des débuts – en français – au concours annuel des Jeux floraux de 1604 (textes perdus) à la dernière édition réalisée sous le contrôle de l’auteur (1647-1648). Concrètement, les textes qui nous sont accessibles sont ceux placés entre la première apparition de Godolin dans un imprimé (1607, dans un recueil de Larade) et cette dernière édition de 1647-1648, soit une bonne quarantaine d’années. En toute rigueur, appréhender l’éventuelle rupture que représente l’œuvre de Godolin ne peut se faire qu’en prenant appui sur son entrée publique en littérature réalisée à travers l’édition de 1617. L’importance accordée à ce premier imprimé connu ne devrait toutefois pas être exclusive, dans un second temps, d’une prise en compte des recueils ultérieurs.

4Dans ce premier recueil comme dans le reste de son œuvre, Godolin ne se reconnaît aucun prédécesseur en poésie occitane. Jamais, à aucun moment, il ne fait référence à un poète dans cette langue alors qu’il en cite lui-même plusieurs dans d’autres langues (Ronsard, L’Arioste, Virgile…). En un sens, on peut d’ores-et-déjà dire que Godolin se présente aux yeux de son public comme un créateur dépourvu de modèles endogènes, un fondateur. Rupture et fondation semblent aller de pair. Ce remarquable silence sur une quelconque filiation pose un nombre considérable de problèmes, à commencer par celui du point de vue à adopter dans cette étude. L’option traditionnelle de l’histoire littéraire consiterait à prendre en considération l’ensemble de la production littéraire de langue occitane et de lui rapporter l’œuvre de Godolin de sorte à faire apparaître les lignes de convergence/divergence. Cette approche – étique, selon les catégories de Kenneth Pike – présente l’inconvénient majeur de ne pas se placer du point de vue ni de l’auteur, ni surtout de ses contemporains. Or comment apprécier la rupture, si rupture il y a, en mêlant dans l’analyse des œuvres que ni le poète ni ses contemporains ne pouvaient connaître ? Il convient ainsi d’exclure l’ensemble des manuscrits d’auteurs, principalement provençaux, auxquels Godolin ne pouvait avoir accès (Michel Tronc, Robert Ruffi2). De la même façon, il n’y a pas de raison de retenir des auteurs qui se sont illustrés dans des genres que Godolin n’a absolument pas pratiqués : le théâtre (Claude Bonnet, Claude Brueys, Gaspard Zerbin, ces deux derniers publiés, du reste, tardivement), l’épopée (Guillaume Ader, 1610), le poème dialogué bucolique (Jean de Garros, 1611), l’écrit parémiologique (Voltoire, Larade, 1607), le quatrain moraliste (Ader, 1607). Demeurent ainsi quelques auteurs, peu nombreux, dont il importe peu, à ce stade, que Godolin les ait lus ou connus. Le point de vue adopté est finalement celui – émique et virtuel – d’un lecteur contemporain de Godolin qu’il faut imaginer au fait de toutes les publications poétiques de langue occitane en regard desquelles il peut placer l’œuvre du Toulousain de sorte à en percevoir la nouveauté3.

Une rupture générique

5La création de Godolin ne naît pas dans un désert. Elle est précédée à Toulouse même, dans le cours du xvie siècle et au début du xviie siècle, d’une production poétique dont le foyer principal est constitué par le Collège de Rhétorique qui organise chaque année le concours des Jeux floraux. C’est des rangs de cette institution qu’émanent plusieurs textes élaborés dans la première moitié du xvie siècle (Requeste faicte et baillée par les dames de la Ville de Tolose, Odenansas del libre blanc, Nompareilhas Receptas)dont un au moins, la Requeste, est encore connu au début du xviie siècle, cité par l’historien Guillaume de Catel. Plusieurs décennies plus tard, quand écrit Godolin, les thèmes et les formes ont changé. S’il retient quelque chose de la production poétique toulousaine en occitan du siècle précédent, c’est moins des modèles d’écriture, inapplicables comme tels, que, à l’instar d’autres poètes passés par l’institution (Bernard Du Poey, Pey de Garros, Saluste Du Bartas), la légitimité indirectement accordée par le Collège de Rhétorique à une écriture poétique en occitan (Courouau 2006a). En ce sens, l’œuvre de Godolin, lorsqu’elle apparaît, s’inscrit dans une continuité déjà ancienne, particulièrement ravivée dans la première décennie du xviie siècle (Larade, Voltoire, Ader, Jean de Garros).

6L’espace formel dans lequel se déploie, dès ses origines modernes, la poésie de langue occitane est celui fourni par la poésie de langue française. Les auteurs du premier xvie siècle composent des balades, des rondeaux, des triolets que rien ne distingue formellement, si ce n’est quelques principes prosodiques résultant de l’adaptation au système phonologique de l’occitan, de leurs équivalents français. Si on situe, comme ici, l’analyse dans les limites de la littérature produite en occitan, il semble de bonne méthode de conférer les formes employées par Godolin dans son premier recueil et celles pratiquées par ses prédécesseurs accessibles par la voie de l’imprimé, de part et d’autre du Rhône.


Gaillard 15794

Gaillard 15835

Bellaud 15956

Paul 15957

Larade 16048

Larade 16079

paratexte en prose occitane

X

X

X

Stances

X

X

X

Sonnet

X

X

X

X

X

chant royal

X

Epigramme

X

Epitaphe

(fr.)

(fr.)

(fr.)

X

Chanson

X

X

X

X

X

Ode

X

X

X


7Ce tableau fait apparaître plusieurs éléments. En premier lieu, pour aucun des genres relevés, Godolin n’innove pas. Il a à chaque fois été précédé par un ou plusieurs poètes de langue occitane. Une fois ce constat général établi, une observation du détail oblige à pondérer le jugement. Procédons par ordre :

8— le « Prologuo d’Augié à Mousur de Seré » que Gaillard place au début de son Banquet (1583, n° 67) ne contient pas la dédicace proprement dite de l’œuvre à son protecteur, réalisée sous forme d’épître, en occitan (n° 62) et en français (n° 63), mais la justification du titre du recueil. La dédicace par Larade de sa Margalide gascoue à Pierre Hurault de L’Hospital et celle de La Muse Piranese à Paul de Bégole ouvrent chacune de façon succincte le recueil poétique, mais elles se signalent par le plus strict respect des conventions. Sans les enfreindre, la dédicace de Godolin à Monluc, enfermée dans des proportions à mi-chemin entre le bavard Gaillard et le sec Larade, joue avec les conventions du genre.

9— les stances de Pierre Paul et celles de Larade sont de dimensions réduites et traitent d’une thématique exclusivement amoureuse. Celles de Godolin, vraisemblablement composées en 1610 ou 161110, célèbrent en cent alexandrins la mémoire du roi Henri IV.

10— le sonnet est le genre-roi de la poésie française et occitane (Gardy 2001). Les recueils de Bellaud et de Larade (1604) en sont majoritairement composés. L’anomalie se situe ici plutôt du côté de Gaillard 1579.

11— le chant royal est le seul genre que le Collège de Rhétorique distingue aux Jeux floraux. Les seuls en occitan antérieurs à celui de Godolin sont ceux publiés par Larade, au nombre de huit (Courouau 2004).

12— si on s’en tient à l’intitulé des poèmes, on ne voit que Larade 1607 qui ait pratiqué le genre de l’épigramme (un seul cas).

13— l’épitaphe, imitation d’une pratique lapidaire réalisée en français, apparaît dans cette langue chez Gaillard et Bellaud, en occitan chez Paul, mais pour un cas unique. Godolin en compose six, dont une sous forme de sonnets, dans le recueil de 1617.

14— tous les poètes composent des chansons en occitan sur des timbres qui ne sont pas toujours indiqués. À la différence de ses prédécesseurs, mais en accord avec Larade, Godolin fait le choix de l’air de cour (Escarpit 2012). Seul parmi tous, il n’exclut pas la parodie.

15— l’ode ne figure pas parmi les genres présents en 1617, Godolin n’en composera que dans les années 163011. Il se distingue ainsi de Bellaud et surtout de Larade qui y ont souvent recours, surtout le second.

16Si on interprète à présent ces résultats en termes de tendances, on constate que c’est de Larade que Godolin est le plus proche. Sauf l’épitaphe, tous les genres répertoriés sont présents chez Larade, mais selon des proportions inversées : Godolin écrit moins – infiniment moins – de sonnets que Larade ; il ne publie qu’un seul chant royal en occitan alors que celui-ci les exhibe avec ostentation ; il développe le genre de l’épigramme et « historicise » celui des stances ; il manie un occitan flamboyant dans une dédicace menée aux confins du genre. Pour un peu, on dirait que ce sont les mêmes choix que Larade, mais que Godolin lui tourne le dos : il délaisse les genres que son ami avait pratiqués (sonnet, ode, chant royal) et il cultive ceux qu’il n’avait fait qu’effleurer. Si rupture il y a, elle se situe entre ces deux auteurs dont on sait qu’ils furent un temps amis. Elle est également nette avec Gaillard puisque Godolin ignore splendidement le genre de l’épître dont les œuvres du poète rabastinois sont abondamment remplies. Le choix des poètes provençaux qui font, comme Larade, la part belle au sonnet ne correspond pas à l’orientation que Godolin entend donner à sa création d’un point de vue générique.

17Lorsqu’il se situe dans un genre répertorié, Godolin ne se livre pas à un exercice d’imitation. Chacun des genres énumérés pourrait fournir un exemple, contentons-nous d’un seul. En reprenant un genre comme l’épitaphe, Godolin ne suit pas ses devanciers. Chez ceux-ci, il s’agit généralement d’imaginer l’inscription placée sur la tombe de la personne aimée ou sur celle du poète mort d’amour. Les épitaphes conçues par le poète toulousain concernent des personnages autres, connus de ses contemporains immédiats, fictifs ou à mi-chemin entre réalité et fiction, peu importe. Le caporal mis en scène dans l’une d’elle, notoirement amateur de vin, offre le prétexte à une évocation très concrète de la mort (l’occitan cos designe à la fois le corps, le cadavre et le fait d’être mort) et à une pointe où percent comme des accents libertins12 :

Cos es le courpoural Baldèau,
Brabe souldat à la pichèrro.
Le cos es aro dins la tèrro
Et l’armo dins le cèl… benlèau13.

18Très concentré, le petit poème confine à l’épigramme dont il précède d’ailleurs une série dans le recueil de 1617. La créativité de Godolin ne se borne pas cependant à réutiliser des genres consacrés par la tradition et/ou les arts poétiques de son temps. En s’emparant du genre du noël, Godolin s’écarte délibérément des usages établis. Le noël en langue de France ou en occitan dipose d’une longue tradition lorsque Godolin s’en saisit, mais, à cheval entre chanson profane et chant religieux, entre poésie et musique, il ne s’agit pas, loin s’en faut, d’un genre d’élite. Si on compose des noëls en occitan durant le xvie siècle, on n’en trouve que fort peu qui aient été imprimés au début du xviie siècle, un ou ou deux, à peine, en Provence ou en Limousin, guère plus (Courouau 2008, 76). Les quatre noëls que Godolin insère à la fin du Ramelet de 1617 fondent une double tradition : une personnelle, d’abord, puisque chacun des recueils parus du vivant de l’auteur comportera désormais une section dévolue à ce genre ; une tradition qui, dès la première moitié du siècle et jusqu’aux portes du xxe siècle, s’avèrera particulièrement vive en domaine occitan. Là encore, le noël godelinien ne ressemble pas à quoi que ce soit de courant dans le genre. Remarquablement au fait, comme l’a démontré Georges Passerat (1998), des subtilités théologiques, Godolin, dans ses noëls, ignore le trivial tout en convoquant le familier :

Jousèp li fa mantun poutet
Dessus un piloutet de paillo,
Oun, per la paret que badaillo,
Las gibros torron l’Efantet14.

19Avant Godolin, en poésie occitane, l’épitaphe existe, le noël existe. Il faut en revanche porter au crédit du poète toulousain la création de deux genres qui portent pour ainsi dire sa marque de fabrique. Le premier apparaît très tôt, dès le Ramelet de 1617 sous la forme de poèmes disposant tous des mêmes caractéristiques formelles et des mêmes orientations thématiques : un nombre important de vers situable en moyenne aux alentours de 100-150 vers, un mètre très majoritairement octosyllabique et des rimes suivies offrent le cadre formel dans lequel sont abordés des sujets liés à l’amour ou des anecdotes personnelles à visée comique. Si on s’en tient à l’édition de 1617, sur les sept poèmes relevant de ce genre, cinq relèvent de la thématique amoureuse, deux illustrent de menus faits de la vie sociale, amicale, du poète. Ce type de composition spirituelle relativement vaste, demeurera toujours au cœur des recueils de Godolin. On ne voit pas qu’avant lui il ait été pratiqué sous cette forme en occitan mais on considère généralement que le poète toulousain s’inspire d’un type de composition en faveur au moment du Carnaval et dont le poète provençal Claude Brueys offre un prototype (mais son œuvre n’est pas imprimée avant 1628). Le monologue octosyllabique à rimes plates de thématique comique correspond aussi au genre pratiqué par prédilection par le bateleur parisien Tabarin (1584-1633) dont les productions ne sont imprimées qu’à la toute fin des années 1610. Quoi qu’il en puisse être des modèles éventuels, endogènes ou exogènes, la fortune extraordinaire dont jouit ce type de poème de nature spirituelle ou comique au xviiie siècle – et sans doute avant15 – doit très certainement quelque chose aux compositions de Godolin dans la première moitié du XVIIe siècle.

20Suffisamment d’indices textuels et biographiques  nous permettent de penser que Godolin – comme un peu avant lui, dans un autre contexte, Gaillard – présente lui-même oralement certains de ces poèmes devant un public (a priori choisi). Cette pratique de l’auto-diction trouve comme un débouché naturel dans un genre, enfin, que Godolin crée en occitan : le monologue festif en prose. Le premier en date est celui récité par le poète en guise de prologue au Ballet des Inconstants donné dans le cadre des fêtes de Carnaval par le duc de Montmorency à l’occasion du mariage de Madame, Christine de France, avec le duc Victor-Amédée Ier de Savoie les 3, 10 et 11 février 1619. Godolin apparaît seul sur la scène sous les traits d’un magicien. Il renouvellera par la suite plusieurs fois l’expérience. À l’époque moderne, Godolin est véritablement le fondateur de la prose (profane) de langue occitane. Avec lui, la prose devient possible dans cette langue16. Sur ce point, la rupture avec une répartition des usages qui privilégiait exclusivement les formes versifiées, en poésie comme au théâtre, est totale.

 Une rupture esthétique

21La rupture que représente l’œuvre de Godolin d’un point de vue esthétique a fait l’objet de nombreux commentaires depuis une cinquantaine d’années. Robert Lafont, dès 1958, a déterminé quelques-unes des caractéristiques majeures de ce qui fait la puissance et l’originalité de Godolin. Dans le sillage de sa thèse, publiée en 1970, d’autres analyses sont venues compléter l’approche, sur les stances à Henri iv (Viguier 1976, 1977, 1992), sur le rôle de la mythologie (Desiles 1998), sur les textes programmatiques et le ballet du Cléosandre (Gardy 1999), sur les pièces amoureuses (Courouau 2012). Il n’est pas ici question de reprendre dans le détail chacune de ces analyses, ni d’en offrir une synthèse pour l’heure difficilement réalisable. On peut peut-être se contenter plutôt de rappeler quelques résultats auxquels la recherche est parvenue sur un sujet très vaste et somme toute, malgré tout, assez peu exploré.

22L’une des clefs de l’écriture godelinienne, l’une des raisons de son extraordinaire efficacité, réside dans sa concentration. Godolin a parfaitement assimilé ce qui fait le fond de la culture poétique de son temps. Sa connaissance de la convention poétique contemporaine est profonde et solide. Aussi ne le prendra-t-on que rarement en opposition par rapport à des traditions d’écriture qu’il a parfaitement assimilées au point que celles-ci demeurent implicites dans le texte, nécessitant de la part du lecteur un effort de décodage. Pour autant, la poésie de Godolin est d’un accès immédiat ; tout lecteur, même ignorant des conventions d’écriture qui la sous-tendent, peut comprendre le texte sans connaissances préalables, grâce à la puissance des images créées et aux ressources linguistiques mises en œuvre. Quelques exemples, en forme de rappels, suffiront17. La description du front de la femme aimée ne se contente pas d’associer à cette partie du visage les qualités habituellement mobilisées par les poètes ; elle permet au poète de développer une image hardie, fondée sur une réécriture de la tradition sans que celle-ci soit modifiée en elle-même :

Le Froun que ne prendra l’oumbratge
Ne tirara tal abantatge
Que le gran puntiè Cupidou
Le cauzira per paredou Oun tout le jour el prendra l’ayre18.

23Le texte associe à la fois les références livresques (Cupidon) et la réalité extra-littéraire : le paredou désigne à Toulouse un petit banc de pierre placé contre la maison, sur lequel on s’assoit pour discuter et regarder passer les gens dans la rue. Sur la base des topoi néo-pétrarquistes, Godolin développe une esthétique qui consiste à laisser libre cours à l’imagination. Quelques vers plus loin dans ce même poème, on voit « cent Cupidounets », cent petits Cupidons, installés sur le nez de la femme aimée, jouer à un jeu pratiqué par les enfants de Toulouse. L’image n’a rien de trivial ni de burlesque. Le poète s’amuse à créer à partir du fond poétique commun et grâce à un langage poétique renouvelé et concentré de nouvelles images. Il appartient au lecteur d’effectuer un travail d’élucidation, plus ou moins immédiate. Ainsi, dans telle évocation de la nuit tombée :

Mes aco sio prou dit per aro Que le cèl soun mantou preparo
Countropuntat tant ple que bèyt
De las estelos de la nèyt19.

24Le plein (ple) et le vide (bèyt) désignent le fond de la nuit, illuminé par les étoiles qui forment avec lui une ligne mélodique en forme de contrepoint (countropuntat). De telles hardiesses poétiques sont insérées dans des narrations qui, prenant appui sur les éléments légués par la tradition poétique (personnages, situations, attributs), paraissent autant de créations propres au poète. Les poèmes longs, de thématique amoureuse ou « biographique », présentent ainsi une trame narrative originale dans laquelle il n’est pas rare que le poète, par un jeu d’énonciations complexe, cherche sinon à perdre son lecteur(-auditeur), du moins à le surprendre en déjouant ses attentes. Ainsi, au début du poème « Mout de letro20 », le poète-narrateur apparaît avec deux de ses amis, après un bon repas. Les trois convives composent un poème, poème dans le poème, qui est donné à lire. Dans ce texte emboîté, les trois amis débattent des avantages du temps de Carême selon qu’il est passé à Toulouse ou à Paris. Ils déclarent leur intention d’en référer à un ami commun installé dans la capitale en lui écrivant une lettre. La parole est alternativement donnée à chacun des trois comparses et le texte prend donc l’apparence d’un dialogue (cinq tirades), à la limite de l’écriture théâtrale. Le lecteur a l’impression que la lettre reste à écrire lorsque le narrateur reprend la parole pour annoncer que la lettre est partie. On comprend alors que le poème enchâssé n’a pas contenu cette lettre, à moins, bien sûr – ce que semble suggérer le texte – que son contenu ne s’identifie à la tentative d’écriture dont a rendu compte l’échange entre les trois protagonistes. De la même façon, dans le poème « Presen21 », la parole est donnée in medias res à un narrateur qui cherche son arbalète pour abattre un levraut. Les 50 premiers vers d’un poème qui en compte 86 sont ainsi consacrés au devenir de ce levraut une fois qu’il aura été tué. Le valet prépare les lardons, on sait qui on va inviter, jusqu’au moment où le narrateur se ravise et confesse qu’il n’a encore rien attrapé. La narration passe au présent, le chasseur est face à sa proie, il la manque. Il ne reste au chasseur qu’à adresser ses excuses aux convives qui n’en seront pas en faisant état de sa bonne volonté (boulountat). Organisé autour d’un non-événement dont le lecteur, autant que les convives, a été la dupe, le poème doit sa vivacité au rythme rapide sur lequel il est composé et à l’insertion de discours directs. Ces paroles prononcées reflètent une langue parfaitement calquée sur l’oralité en même temps qu’elles relèvent d’une forme de monologue intérieur. Lorsqu’il crie face au terrier du lièvre « Ès-y, hoou ! drolle ? – ô que noun pas22 », ce n’est pas à son laquais que s’adresse le chasseur, mais à lui-même. C’est dans sa langue de tous les jours qu’il le fait.

25La poésie, sans cesser un instant d’être poésie, accueille le langage prosaïque de la quotidienneté. Et, en retour, la prose de Godolin accueille la poésie. Les exemples, là encore, ne manquent pas. Chaque ligne de sa prose porte la marque d’une écriture fondée sur une revisitation des lieux communs et un renouvellement des outils poétiques. La naissance de l’aube, dans tel cartel (1637)

A l’houro que le Lugra de l’Albo freto les èls al Soulel de salibo dejuno, el descubris un bousquet de plazes, oun qui toumbo d’un albre se trobo lajouts dan les pès demèst les Myrtes, et le cap dins les Rouziès. Uno foun y lèbo beziadomen le bul per baigna soupos à las Pastourèlos, et gito sur sas ribos tant de pailletos d’or et d’argen que les Satyris s’y ban gouluda quand se bolen  habilha de broucatèl23.

26associe un personnel convenu (bergères et satyres) dans un décor qui l’est tout autant (bosquet, fleurs, source). Le reste est de Godolin : la perspective adoptée pour décrire le sol en partant de la chute du haut d’un arbre, l’étoile du matin frottant les yeux du soleil avec une salive qui a, dit-on, la faculté d’aiguiser la vue, l’eau de la fontaine mouillant les bergères (baigna soupos à rapprocher de l’expression française être trempé comme des soupes, « être mouillé »), des éléments concrets (bul), parfois à la limite de la trivialité (se gouluda « se vautrer ») jusqu’à l’image finale dont l’étincellement ne naît que par le pouvoir du langage poétique avec des satyres se baignant dans une fontaine dont les reflets d’or et d’argent leur sont autant d’habits brochés.

27Par rapport à ses devanciers, dans le champ littéraire de langue occitane mais sans doute aussi dans celui de la littérature telle qu’on la pratique en France, Godolin dipose d’un style, d’une manière qui lui est propre. Pour dénommer celle-ci, en se fondant sur les déclarations du poète, Philippe Gardy, dans une contribution qui est assurément la plus aboutie sur l’art de Godolin (Gardy 1999, 195-216), a proposé de recourir au concept de beziaduro dont le poète a décliné la racine à plusieurs reprises (beziadoment dans le dernier exemple cité, beziat...). Cette beziaduro renvoie à la « mignardise » des poètes de langue française, mais pas seulement. Pour Ph. Gardy, « il y a au centre de la beziaduro à la fois la trouvaile (les inbencius) et le charme, l’enchantement, la première étant à l’origine des seconds. Faire surgir le beziat dans l’écriture, c’est découvrir ce qui permet d’enchanter les mots et les phrases » (Gardy 1999, 211). Un tel travail sur la matière poétique et linguistique permet à Godolin, selon le même chercheur, de « créer une langue littéraire » (id., 193). Cette langue littéraire, constituée d’images, d’éléments lexicaux, d’un ton – jovial et spirituel –, tout ce qui fait la manière du poète toulousain, se démarque totalement de ce qui avait pu précéder son apparition. La rupture esthétique qu’instaure Godolin vaut pour lui-même, pour ses épigones contemporains et pour ses successeurs. Une partie non négligeable de la poésie de langue occitane, jusqu’au xviiie siècle à coup sûr et vraisemblablement au-delà, empruntera à cette manière sinon son génie, du moins quelques-unes de ses figures, quelque chose de son lexique et de son ton.

Une rupture sociolinguistique

28Si, parmi les prédécesseurs majeurs de Godolin, on entreprend de chercher des déclarations justifiant du choix d’écrire dans une langue qui n’est pas la langue conventionnelle de la littérature en France, que trouve-t-on ? Auteur de quelques centaines de poèmes en provençal – et aussi en français –, Louis Bellaud de La Bellaudière ne s’explique jamais vraiment sur le sujet. Pierre Paul non plus. Poète encore plus prolixe que Bellaud, Auger Gaillard ne laisse guère qu’entrevoir ses motivations. On peut, certes, les reconstituer : le poète-charron occupe un « créneau », dirait-on de nos jours, autour du personnage qu’il a créé et qu’il met en scène dans ses poèmes, une sorte de clown maniant des formes hautes et des registres bas, pour le dire vite. Le plus explicite est encore Bertrand Larade. En faisant le choix du recueil d’Amours à la Ronsard et de genres reconnus, le poète gascon se lance dans une voie qu’on pourrait qualifier de haute. Ses déclarations d’attachement au gascon ne sont pas pour autant mises spécialement en avant ; on les trouve plus ou moins éparses dans des sonnets ou des chants royaux24. La démarche de Godolin, à nouveau, rompt de façon spectaculaire avec ces absences de justifications ou ces déclarations plus ou moins discrètes. Dans le Ramelet de 1617, deux textes sont chargés, chacun à leur façon, directe pour l’un, indirecte pour l’autre, de rendre compte des motivations profondes du poète. Ces textes ayant été relativement très commentés25, on se contentera ici de relever en quoi ils manifestent une rupture qu’on qualifiera, puisqu’il s’agit de la place de la langue occitane (moundino, « toulousaine » pour Godolin) dans la société, de sociolinguistique.

29Le Ramelet moundi de 1617 se clôt non pas par un poème, comme on pourrait s’y attendre, mais par un commentaire assez volumineux intitulé « Countro tu, libret, et per tu26 ». Le genre est totalement nouveau dans la poésie de langue occitane. Il n’est pas rare dans la poésie de langue française : on connaît le commentaire de Ronsard par Marc-Antoine de Muret, celui de Du Bartas par Simon Goulard. Il n’est pas courant, en revanche, pour le moins, qu’un auteur donne le commentaire de sa propre œuvre. C’est pourtant ce que fait Godolin, livrant ainsi une sorte de dictionnaire composé de dix-sept entrées tirées d’un vers de l’œuvre. Chaque entrée renvoie à un ou plusieurs auteurs dont s’est inspiré Godolin, citations à l’appui. Ainsi, pour albo « aube » :

ALBO
Et boli que sas coulouretos
Semblen las rosos bermeilletos
Que l’Albo as pels ensafranats
Semeno pel cèl à manats.
Le Safra et la Roso, se dounon coumunomen à l’Albo.
Oubido li fa les pels de safra :
Placuit croceis Aurora capillis
Virgilo les y fa de rosos :
Crinibus et roseis tenebras aurora fugarat.
Le lièit li fa de safra :
Et jam prima novo spargebat lumine motes
Tithoni croceum linquens Aurora cubile.
L’Ariosto y demando plaço :
Spesso aprir la finestra ha per costume
Per veder s’anco di Titon la sposa
Sparge dinanzi al matutino lume
Il bianco giglio, e la vermiglia rosa27.

30La convocation d’auteurs antiques (ici Ovide et Virgile) et modernes, italiens (comme ici L’Arioste) ou français (ailleurs Ronsard) permet au poète en lengo moundino de placer sa création au plus haut niveau des littératures produites dans les grandes langues de culture. Godolin se situe lui-même dans une lignée, il est l’héritier d’ancêtres directement apostrophés :

Escribans aujols, de qui l’esprit coumoul de raros inbencius ten tant de plaço per toutis les camis de la sençio, que defeciblomen on pot passa per un sutgèt coumu sense bous tusta28.

31qui balisent, pour ainsi dire, la voie – haute – empruntée dans le recueil. Ces auteurs-aïeux servent de caution, pour l’œuvre qu’il s’agit de placer, en fournissant des preuves d’autorités, dans le cercle des œuvres poétiques de facture complexe et d’inspiration élevée, tandis que pour la langue dont c’est une manifestation spectaculaire il s’agit de légitimer une place revendiquée de fait parmi les grandes langues de culture, anciennes et modernes.

32Au début du recueil, à la suite des nombreuses pièces liminaires, Godolin place un texte en prose en guise d’avertissement, simplement intitulé « A Touts29 ». Le jeu de mots emprunté au jeu de cartes, « à tous / atouts », repris au début du texte, a valeur programmatique. Godolin entreprend de défendre son projet poétique contre les détracteurs de la langue qu’il emploie. Ce manifeste linguistique est aussi un manifeste poétique, voire un art poétique, dans lequel est réalisée une défense et illustration de la langue poétique. Parmi les arguments convoqués, les qualités phoniques, déclarées irréductibles, de la lengo moundino, toulousano, toulousenco sont particulièrement mises en avant. C’est ce matériau brut qui forme en effet la base concrète d’une création poétique dont le fondement paraît ancré dans l’affectif : « Nouirigat de Touloso, me play de manteni soun lengatge bèl ». Il n’y a pas lieu de douter que « l’amour de la langue » constitue l’une des motivations fondamentales dans l’élaboration et la réalisation d’un projet culturel ambitieux.

33Si l’attachement pour l’occitan, souvent relevé par les commentateurs, est premier, il n’en est pas pour autant exclusif. La déclaration du texte « A Touts » n’est pas dirigée contre le français. La première phrase propose en réalité de solder les comptes avec cette langue, d’être quittes avec les détracteurs de la langue (« Sion quitis dan les que dounon del nas à la lengo moundino »). Ce n’est pas au français en tant que tel que s’en prend Godolin mais à ceux de ses contemporains qui, au nom d’un choix exclusif en faveur de cette langue, en viennent à déconsidérer la langue occitane. On oublie ainsi souvent de rappeler, lorsqu’on évoque la préférence de Godolin pour l’occitan, que ce poète a aussi composé en français. La dernière édition parue de son vivant contient le beau chant royal qui lui avait valu en 1609 une fleur au concours des Jeux floraux. Dans ce même recueil, Godolin adresse des stances en français à Louis xiv, un huitain au saint patron des capitouls, et le fameux sizain par lequel il justifie une dernière fois son choix de l’occitan… en français. Auparavant, il avait publié plusieurs textes en prose française composés à l’occasion de ballets donnés en temps de Carnaval. Le choix linguistique de Godolin ne se fait pas contre le français, mais d’abord pour l’occitan. Le rapport qu’il entretient à la langue se caractérise par une tolérance, voire une fascination qui le pousse à composer lui-même dans différents idiomes. Une étude serait nécessaire pour recenser et analyser les autres langues que le poète toulousain a pu employer dans son œuvre. Sous bénéfice d’inventaire, on trouve en effet

34— des vers en catalan (v. 31-32 dans « Despièyt », 1617)

35— une chanson lisible tant en occitan qu’en catalan (« Aquesto passèc per catalano daban de francimans30 », 1647-1648)

36— des vers épars, des phrases et une chanson « en français à la gasconne » (« A Mademoiselle Chose31 », 1621)

37— un texte en prose italienne (« Prologo per un balè de quatre Italièns32 », 1638)

38— un texte en prose argotique française (« Le Polisson aux Rupines33 », 1635)34

39S’il y a bien, comme a pu le dire Ph. Gardy, un « goût pour la découverte » chez Godolin, il y a aussi – l’un ne va pas sans l’autre – un goût de l’expérience. Cette recherche permanente, marquée par un narcissisme, relevé par ce même chercheur (Gardy 1999, 174), d’ordre compensatoire, se déploie, certes, dans les limites de la langue aimée et exhibée mais au-delà, parce qu’il travaille en profondeur la matière poétique et qu’il manie d’autres langues, ce sont des terrains plus vastes encore que Godolin laboure, ceux placés, comme l’a le premier noté R. Lafont (1958),  « sota lo signe del Lengatge-Rei », sous le signe du Langage-Roi.

40L’œuvre de Godolin se situe dans le prolongement de l’esthétique pétrarquisante européenne mais, à son apparition et dans sa totalité, constitue donc une triple rupture, générique, esthétique et sociolinguistique, à mettre en rapport avec l’ambition qui sous-tend le projet littéraire et linguistique conçu par l’auteur. Les voies empruntées permettent l’érection de l’œuvre de Godolin en modèle littéraire, pour ses contemporains comme pour les générations futures, de telle sorte que l’on assiste à la fondation non seulement d’une véritable langue littéraire, mais, en un sens, d’une littérature. Si la littérature de langue occitane ne fonctionne pas encore, au xviie siècle, exactement suivant le mécanisme d’un système littéraire (Vaillant 2010), elle n’en possède pas moins un modèle endogène, très largement reconnu.

41L’absence de prédécesseurs que Godolin revendique en creux prend dès lors une signification liée à cette entreprise de fondation. Avant Godolin, il n’y a rien et il faut qu’il n’y ait rien pour que la fondation apparaisse. La réalité, pourtant, est différente et la volonté affichée de rupture n’enlève rien aux facteurs de continuité décelables dans l’œuvre. Cette continuité est d’abord toulousaine et floralesque et ensuite, de façon a priori plus lointaine, mais à peine, gasconne. L’effervescence relative qu’on note dans la Toulouse des années 1600, principalement entretenue par des auteurs gasconophones, ne peut qu’avoir joué un rôle d’émulation. Sous ce rapport, les liens avec Larade, peut-être à la fois modèle et contre-modèle, ont à coup sûr compté, tout comme l’invitation à écrire en occitan lancée par Du Bartas. La Nymphe toulousaine qui assure la narration des stances à Henri iv, texte également fondateur dans le projet godelinien, est bien fille, Ph. Gardy (1999) l’a amplement démontré, de la nymphe gasconne de Du Bartas. Quoi que Godolin puisse en dire – ou plutôt ne pas en dire –, la continuité est évidente, au moins autant que la rupture.

42Le destin de cette fondation est connu dans ses grandes lignes. La notoriété du poète toulousain aura beau être assurée, sa fortune n’en sera pas faite pour autant. Mourant dans une misère relative, Godolin illustre, comme l’a analysé Alain Viala (1985, 234), l’impossibilité de mener une carrière de poète en langue occitane. De son art, aucun de ses épigones contemporains ni de ses successeurs ne retiendra la leçon exacte, aucun ne possèdera sa puissance de création et sa maîtrise du langage poétique. Son œuvre servira de magasin d’accessoires, de carrière de matériaux poétiques. En même temps, elle fonctionnera un peu comme une icône, pourrait-on dire, l’emblème d’une littérature occitane à laquelle il a contribué, de fait, par les ruptures précisément qu’il a instaurées, à donner un cadre, à définir des voies, même si toutes, redisons-le, ne seront pas empruntées après lui avec autant d’éclat.

Éditions de textes

43Bellaud de La Bellaudière, Louis, Obros et Rimos (Sonnets et autres rimes de la prison), éd. Sylvan Chabaud, Montpellier, Presses universitaires de la Méditerranée, 2011.

44GAILLARD, Auger, Œuvres complètes, éd. Ernest Nègre, Paris, PUF, 1970.

45GODOLIN, Pèire, Œuvres de Pierre Goudelin,collationnées sur les éditions originales accompagnées d’une étude biographique et bibliographique, de notes et d’un glossaire par le Dr Jean-Baptiste Noulet, Toulouse, Privat, 1887 ; Le Ramelet mondin & autres œuvres, éd. Philippe Gardy, Aix-en-Provence, Édisud, 1984 ; Œuvres complètes, éd. Pierre Escudé, Toulouse, Privat, 2009.

46LARADE, Bertrand, La Margalide gascoue et Meslanges (1604), éd. Jean-François Courouau, Toulouse, SFAIEO, 1999.

Études

47Courouau, Jean-François, Premiers combats pour la langue occitane. Les manifestes linguistiques occitans. XVIe-XVIIe siècles, Anglet, Atlantica, 2001.

48Courouau, Jean-François, « Les chants royaux en occitan gascon de Bertrand Larade (1607) », Revue des Langues Romanes CVIII/1, 2004, 25-56.

49Courouau, Jean-François, « Une langue face à l’institution : le Collège de Rhétorique de Toulouse et l’occitan (1484-1694) », Travaux de Littérature publiés par l’ADIREL XIX, 2006a, 57-73.

50Courouau, Jean-François, « Transgression, plaisir et “libertinage” à Toulouse au début du XVIIe siècle à travers Le Ramelet moundi de Pierre Goudouli (1617) », in Maurice Daumas (éd.), Le Plaisir et la transgression en France et en Espagne aux XVIe et XVIIe siècles, Pau, Éditions Gascogne, 2006b, 237-269.

51Courouau, Jean-François, « Les stances “A l’hurouso memorio d’Henric le Gran” de Pierre Godolin », Lengas revue de sociolinguistique, 64, 2008, 61-97.

52Courouau, Jean-François, Moun lengatge bèl. Les choix linguistiques minoritaires en France (1490-1660), Genève, Droz, 2008.

53Courouau, Jean-François, « La littérature occitane sous le règne personnel de Louis XIV (1661-1715) », in Angelica Rieger (éd.),  L’Occitanie invitée de l’Euregio. Liège 1981-Aix la-Chapelle 2008 : Bilan et perspectives. Actes du Neuvième Congrès de l’Association internationale d’études occitanes, Aix-la-Chapelle, 24-31 août 2008, Aachen, Skajer, 2011, 887-908.

54Courouau, Jean-François, « Le moi autobiographique dans la poésie languedocienne des XVIe et XVIIe siècles (Gaillard, Godolin) », in Sylvie Mouysset, Jean-Pierre Bardet, François-Joseph Ruggiu (éds), « Car c’est moy que je peins ». Écritures de soi, individu et liens sociaux (Europe, XVe-XXe siècle). Actes du Colloque de Conques, 25-27 septembre 2008, Toulouse, CNRS / Université de Toulouse II-Le Mirail, 2011, 239-260.

55Courouau, Jean-François, Et non autrement. Marginalisation et résistance des langues de France (XVIe-XVIIe siècle), Genève, Droz, 2012.

56Courouau, Jean-François, « L’ombre de Godolin (1649-1790) », in Carmen Alén Garabato / Claire Torreilles / Marie-Jeanne Verny  (éds), Los que fan viure e treslusir l’occitan. Actes du Xe Congrès de l’Association internationale des études occitanes. Béziers 2011, Limoges, Lambert-Lucas, 2014, 716-738.

57Courouau, Jean-François, « Une tragédie, deux pastorales : l’œuvre dramatique de Bertrand Larade (1607) », in Jean-François Courouau / François Pic / Claire Torreilles (éds), Amb un fil d’amistat. Mélanges offerts à Philippe Gardy, Toulouse, Centre d’Étude de la Littérature Occitane, 2014, 383-401.

58Courouau, Jean-François (dir.), La Langue partagée. Écrits et paroles d’oc. 1700-1789, Genève, Droz, 2015.

59DUBOIS, Claude-Gilbert, La Poésie baroque, Paris, Larousse, 1969, 2 vol.

60DESILES, Emmanuel, « Formes et fonctions de la mythologie dans le Ramelet moundi de 1617 de Pierre Godolin », Revue des langues romanes CII/2, 1998, 297-305.

61ESCARPIT, David, « “Le pu naut escalou de la perfecciu”: les poètes occitans et l’air de cour (1600-1660) », Littératures 67, 2012, 155-171.

62GARDY, Philippe, « La prose impossible », Lengas revue de sociolinguistique 26, 1989, 95-110.

63GARDY, Philippe, La leçon de Nérac. Du Bartas et les poètes occitans (1550-1650), Presses universitaires de Bordeaux, 1999.

64GARDY, Philippe, « Autour du sonnet. Écriture en occitan et genres littéraires (1550-1650) », Bibliothèque de l’École des Chartes 159, 1, 2001, 53-68.

65LAFONT, Robert, Renaissance du Sud. Essai sur la littérature occitane au temps de Henri IV, Paris, Gallimard, 1970.

66LAFONT, Robert, Clefs pour l’Occitanie, Paris, Seghers, 1971.

67PASSERAT, Georges, « Pèire Godolin, chantre et peintre de Noël », Revue des langues romanes CII/2, 1998, 315-326.

68PIC, François, « Bibliographie des œuvres imprimées de Pèire Godolin », in Christian Anatole (éd.), Pèire Godolin (1580-1649). Actes du colloque de Toulouse 1980, Toulouse, Université de Toulouse-Le Mirail, 1983, 199-283.

69Rousset, Jean, La littérature de l’âge baroque en France. Circé et le paon, Paris, José Corti, 1953.

70VAILLANT, Alain, L’Histoire littéraire, Paris, Armand Colin, 2010.

71VIALA, Alain, Naissance de l’écrivain, Paris, Éditions de Minuit, 1985.

72VIGUIER, Anne, « Le fonctionnement linguistique et poétique de F. Maynard : le double choix de Maynard et de Godolin », Maynard et son temps, Toulouse, Association des Publications de l’Université de Toulouse-Le Mirail, 1976, 155-182.

73VIGUIER, Anne, « L’inscription du sujet dans le texte de Godolin », Annals de l’Institut d’estudis occitans 5na tièra / 2, 1977, 50-86.

74VIGUIER, Anne, « Figures et poétiques contrastées du “roi Henry” (Godolin, Maynard, Ader) », in Philippe Gardy (éd.), Guilhem Ader (1567 ?-1638). Actes du colloque de Lombez (21-22 septembre 1991), Béziers, Centre International de Documentation Occitane, 1992, 205-220.