Questions de société
Une lecture du projet de modification du décret de 1984 sur le statut des EC par un président pressé: A. Kahn (Univ. Paris-Descartes).

Une lecture du projet de modification du décret de 1984 sur le statut des EC par un président pressé: A. Kahn (Univ. Paris-Descartes).

Publié le par Marc Escola (Source : SLU)

Pour ceux que rebuterait la lecture du texte intégral du projet de modification du décret de 1984 sur le statut des enseignants-chercheurs, actant notamment le principe de la "modularisation des services", ou qui serait tentés de juger alarmiste les premières réactions syndicales, rien ne vaut l'analyse éclairée d'un Président d'université, appelé dès septembre prochain, selon toute vraisemblance, à établir les services en même temps que la fiche de paye de ses employés.

On lira donc (document pdf ci-joint) les trois pages bien nettes d'une note adressée le 3/11/8 par Axel Kahn, président de l'Université Paris-Descartes, aux enseignants-chercheurs de son Université: les choses vont sans dire, mais tellement mieux en les disant…

* * *

La chose ne pouvait pas rester longtemps sans réponse:

Les membres l'Institut de Psychologie de Paris V ont adressé le 6 nov. à Axel Kahn le texte d'une motion ainsi libellée:

"Les personnels de l'Institut de Psychologie réunis en Assemblée générale le Jeudi 6 Novembre 2008, expriment leur ferme opposition au Décret L 954.1 et L 954.2 relatif aux modifications du statut des enseignants-chercheurs. Ce décret n'est que le énième avatar de projets fortement rejetés dans la communauté universitaire.

Sous couvert d'une « reconnaissance de tous les aspects de la mission d ?enseignant-chercheur », ce décret n'a d'autre finalité que celle de gérer, à budget constant, le déficit de personnel qui résultera des suppressions d'emploi liées au non remplacement des départs en retraite, dans les Universités et les Organismes de recherche.

Ce décret instaure une modulation du service des enseignants-chercheurs, dont aucune règle ne garantit l'absence de gestion arbitraire, voire abusive, par le président d'université. Au mieux, on peut s'attendre à une concurrence interne délétère et improductive, dans laquelle l'allègement des charges d'enseignement des « gros publiants » ne tiendra qu'à l'accroissement de celles des « moins publiants », qui se verront définitivement rangés dans une catégorie dont rien ne prévoit qu'ils pourront sortir. Dans cette perspective, c'est le fondement même de la pratique universitaire faite de collaborations, d ?échanges et de concertations qui se trouve anéanti, au profit de logiques individualistes.

Outre l'instauration infâmante d'un enseignement-punition, (les meilleurs recherchent, les autres étant toujours assez bons pour enseigner), le décret ouvre la voie à l'attribution discriminatoire de primes, la corvéabilité de personnels précaires, et il marchande le tarissement des Organismes de recherche par des récompenses symboliques (chaires « d'excellence »), et/ou autres gratifications sonnantes et trébuchantes.

Les personnels de l'Institut de Psychologie demandent donc au Président Axel Kahn de s'opposer à ce décret et d'entamer une concertation avec l'ensemble de ses personnels, qui font exister l'université. Dans le cas contraire, la mobilisation à Paris Descartes et au niveau national ne pourra que se renforcer."

(Voir sur le site de SLU la liste des signataires).


Le même jour, Isabelle Jambaqué-Aubourg, Chargée de Mission Evaluation de la Qualité Pédagogique auprès du Président A. Kahn adressait cette réponse aux signataires de la motion:

"Chers Collègues

Je vous apporte quelques éléments d'information suite à une entrevue ce matin avec le Président Axel Kahn dans le cadre de mes fonctions de Chargée de mission.

Son courrier en date du 3/11 visait d'abord à présenter le projet de décret de la Ministre Valérie Pécresse mais également à réaffirmer sa volonté de prendre en compte le critère pédagogique dans la carrière des enseignants-chercheurs.

Ce projet de décret doit être examiné par le Comité technique paritaire en novembre, puis par le Conseil supérieur de la fonction publique et enfin par le Conseil d'Etat. A l'heure d'aujourd'hui, notre Président n'envisage pas de s'opposer à un projet de décret permettant de proposer une modulation de services des enseignants-chercheurs avec davantage de souplesse dans le déroulement de carrière et une meilleure reconnaissance des différents types d'activités.

Il me semble essentiel de vous préciser les deux points suivants concernant la mise en oeuvre envisagée de ce décret dans le cadre de l'Université Paris Descartes :

- la modulation de services devrait laisser un minimum d'activités d'enseignement (64h équivalent TD) et de recherche, soit sur la base d'1/3 de chaque moitié du temps de travail. Il sera possible de prendre en compte certaines tâches pédagogiques autres que les heures de cours ou TD (TICE et formation à distance, tutorat, travaux d'études et de recherche, suivi des stages..) dans les 192h de service.

- le décret devrait rendre possible une promotion sur la base de la qualité pédagogique, ce qui était impossible auparavant.

La Commission de l'Evaluation de la Qualité Pédagogique va poursuivre sa réflexion et ses propositions concernant les modalités de quantification et d'appréciation des différentes activités pédagogiques des enseignants-chercheurs et les tâches administratives qui y sont rattachées. Il s'agira ainsi d'évaluer et de valoriser la diversité des tâches pédagogiques."