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Chère Madame notre Ministre

Chère Madame notre Ministre

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Comment répondre à sa ministre quand elle « veut nous dire Â» (« Ce que je veux dire aux enseignants-chercheurs Â», Libération en date du 27 janvier 2009),  s'adresse à nous sur un ton presque timide, voulant dire (mais ne le disant pas ?), « disant Â» et non pas « déclarant Â». On aurait presque envie de lui « parler Â» en retour, de renforcer ce lien ténu qu'elle cherche â et n'est-ce pas nouveau, alors que jusqu'à récemment elle n'avait d'yeux que pour les Présidents de nos Universités â à instaurer entre elles et nous. Oui l'on aimerait bien abonder dans son sens, se féliciter avec elle de la "large concertation avec l'ensemble de la communauté universitaire" qu'elle a, nous dit-elle, menée ou encore, pourquoi pas, lui faire confiance comme elle nous fait confiance, puisque, nous dit-elle aussi, "le gouvernement a fait le pari de la confiance". Hélas les enseignants-chercheurs sont une engeance bien ingrate et il semblerait qu'ils n'aient pas compris qu'on les comprenait. Dans sa Réponse à Valérie Pécresse (Libération, 30/1), Isabelle This Saint Jean (SLR) souligne que le refus  de modification du décret de 1984 n'est pas celui d'une communauté figée dans son conservatisme, récusant a priori toute réforme mais celui d'une communauté qui a organisé en 2004 des Etats généraux et dont le ministère a  systématiquement négligé ou dévoyé les propositions. La même I. This Saint Jean accompagnée de Jean-Louis Fournel (SLU) a d'ailleurs fait preuve de la même incompréhension devant les efforts touchants de notre Ministre, ce lundi 2 février sur France Inter (vidéo en ligne). Hélas encore â en l'un de ces terribles malentendus qui minent les plus belles histoires d'amitié - V. Pécresse, cite, comme un cadeau qui devrait ravir les spécialistes de Sciences Humaines, trois mots de Jacques Derrida, tirés de leur contexte: « professer, c'est s'engager Â».  Or, s'ils ne sont guère performants, n'ont que peu d'autonomie et possèdent une culture qui n'est pas celle de la rentabilité, les enseignants-chercheurs savent parfois lire et, souvent, ont lu patiemment et longuement Derrida. Le cadeau n'a guère plu, comme en témoigne la réponse d'Anne E. Berger qui dans un effort méritoire de pédagogie (ne faudrait-il pas augmenter ses heures d'enseignement ?) donne à notre Ministre une leçon de philosophie : "L'université sous conditions", réponse d'Anne E. Berger à V. Pécresse. Chère Madame notre ministre, encore un petit effort pour faire de la philosophie, ce à quoi vous semblez aspirer de manière si touchante. Mais, sachez-le, philosopher c'est s'engager sur un chemin qui n'est guère rentable. Vous ne nous direz pas que nous ne vous l'avons pas ditâ¦