Editos
Actualités
Une femme du peuple
Publié le par Marc Escola

Après la mort de sa mère, Didier Eribon reprend le travail d’exploration personnelle et théorique qu’il avait entrepris dans Retour à Reims après la mort de son père. Dans Vie, vieillesse et mort d'une femme du peuple(Flammarion), il analyse le déclin de sa mère, ce qui l’amène à réfléchir sur la vieillesse et la maladie, sur nos rapports aux personnes âgées et à la mort, mais aussi sur l’expérience du vieillissement. Il s’interroge également sur les conditions de l’accueil des personnes dépendantes. Il montre que si l’expérience du vieillissement nous est très difficile à penser, c’est parce qu’il s’agit d’une expérience-limite dans la philosophie occidentale, dont l’ensemble des concepts semblent se fonder sur une exclusion de la vieillesse. Eribon reparcourt également la vie de sa mère, et notamment les périodes où elle était femme de ménage, ouvrière puis retraitée, la saisissant dans toute sa complexité, de sa participation aux grèves à son racisme obsessionnel. Il fait une place aussi à la question politique : comment pourraient se mobiliser des personnes qui n’ont plus de mobilité ni de capacité à prendre la parole et donc à dire "nous" ? Les personnes âgées peuvent-elles parler si personne ne parle pour elles, pour faire entendre leur voix ? Fabula vous invite à feuilleter l'ouvrage…

Aux mêmes éditions Flammarion, la collection Champs réédite l'essai qui a fait connaître Didier Eribon : Une morale du minoritaire. Variations sur un thème de Jean Genet, paru en 2001. Les structures inégalitaires de l’ordre social rangent certains individus dans des catégories infériorisées (femme, gay, noir, etc.). L’appartenance à l’une de ces catégories produit un type spécifique de psychisme et de rapport au monde. Prenant pour fil conducteur les écrits de Genet, mais aussi ceux de Proust, Green, Jouhandeau, Fanon et bien d’autres, Didier Eribon décrit ce que suscite dans la conscience et dans l’inconscient le fait d’être insulté, stigmatisé, voué à l’"abjection". Il élabore une analyse historique et sociologique de la subjectivité minoritaire, qui place en son centre l’un des affects les plus puissants de la vie sociale : la honte. Comment la honte est-elle inscrite dans le corps des individus différents ? Comment ceux-ci se réinventent-ils à partir de l’exclusion qui les a façonnés et deviennent-ils, par l’affirmation de ce qu’ils sont, les producteurs de nouvelles subjectivités ? En soulevant ces questions, Didier Eribon récuse la conception psychanalytique du sujet, et lui oppose une politique de décolonisation des esprits. Fabula vous propose de (re)feuilleter également l'ouvrage…